Silver Mercure
Habitué(e)
Inscrit le: 24 Oct 2007
Messages: 16777195
|
Posté le: Sam Mar 29, 2008 15:51 pm Sujet du message:
ce n'est pas parce qu'on s'attache à la forme qu'on ne comprend pas
l'expérience qui est à son origine. mais aussi belle soit l'expérience, si
elle ne donne pas lieu à une extériorisation un brin travaillée, elle n'est
pas plus importante que n'importe quelle déblatération d'un inconnu dont la
vie ne nous préoccupe que peu.
si je vous raconte une soirée où j'avais trop bu, ce n'est pas
nécessairement poétique ni passionant pour un amateur de poésie, si je le
faisais avec autant de talent qu'un Baudelaire -dont nous parlions hier- ça
devient plus intéressant.
je peux prétendre que mon histoire DOIT vous intéresser, même si je n'y
mets aucune forme, mais sur le plan poétique, ça se défend mal. une poésie
peut-être un témoignage, mais un témoignage n'est pas nécessairement une
poésie.
|
Invité
|
Posté le: Sam Mar 29, 2008 16:07 pm Sujet du message:
Silver Mercure a
écrit: | une poésie peut-être
un témoignage, mais un témoignage n'est pas nécessairement une
poésie. |
tout à fait ! et pour en rajouter encore, c'est le "peut" qui est le plus
important. Oui, la poésie peut permettre d'exprimer des sentiments, peut
permettre de revendiquer des choses (poésie de la résistance par exemple),
peut permettre tout ce qu'on veut, mais son BUT premier n'est pas là. Ce
n'est pas ça qui la différencie des autres genres. Ce qui la différencie
des autres genres, c'est un maniement du mot différent, comme un matériau à
sclupter (d'ailleurs origine du mot poésie = poiein qui signifie fabriquer) :
au delà du sens, la poésie se sert également des lettres du mot et de ses
sons, comme d'infinis possibilités
|
Invité
|
Posté le: Sam Mar 29, 2008 16:20 pm Sujet du message:
Ca tu peux le dire. ^^
|
Silver Mercure
Habitué(e)
Inscrit le: 24 Oct 2007
Messages: 16777195
|
Posté le: Sam Mar 29, 2008 16:24 pm Sujet du message:
je pense tout de même que la poésie est faite pour transmettre des
émotions/messages/expériences -pas forcément vécus par l'auteur
d'ailleurs, ils peuvent très bien être imaginés ou fantasmés, mais faits
pour être exprimés.
pour moi, la poésie a malgré tout un but communicatif, mais doit l'atteindre
d'une manière précise et habile, par une technique qui doit servir ce but.
sans cette rigueur technique, le but n'est pas atteint.
s'il ne ne s'agissait que de raconter son week-end, on serait ici sur un forum
de poésie et ce serait bien triste.
on a passé l'âge des colliers de nouilles, quand on est capable de mieux, on
fait l'effort de produire quelque chose à la hauteur de son intention.
|
Invité
|
Posté le: Sam Mar 29, 2008 16:29 pm Sujet du message:
Silver Mercure a
écrit: | je pense tout de même
que la poésie est faite pour transmettre des émotions/messages/expériences
-pas forcément vécus par l'auteur d'ailleurs, ils peuvent très bien être
imaginés ou fantasmés, mais faits pour être exprimés.
. |
alors ça veut dire que tu fais partie de la 3ème catégorie : les 50/50
Le problème de cette position, c'est que cela sous entend qu'il y a tout un
panel de textes qui, alors qu'ils sont des poèmes, ne le seraient plus parce
qu'ils n'expriment rien.
Je pense à toutes les expériences de l'OULIPO, ou plus près de nous, aux
poèmes de Claude Roy (excellent), à certains poèmes de Desnos ou de
Prévert... où les range-t-on alors ceux là ?
|
Invité
|
Posté le: Sam Mar 29, 2008 16:40 pm Sujet du message:
Il me semble que la poésie est l'expression du malaise inhérent à la
création poètique ( ce serait sûrement un "autre malaise" pour une autre
forme artistique ). Ce malaise vient peut-être de ce que la création reste
un "acte douteux" ( car le créateur devient par être "exceptionnel". Chose
qu'il a du mal à digérer -> en quoi suis-je différents des autres, moi
qui ait ce pouvoir ? mais au fait, est-ce que l'ai vraiment ce pouvoir ? il
faut que les autres me le confirment - et si possible les non spécialistes,
car les autres " créateurs" ne seront pas sincères / objectifs, car
impliqués eux-aussi dans leurs propres créations ). Mais, à mon avis, ce
malaise, est celui du poète créateur qui a choisit de souffrir dans sa
création ( alors que d'autres choissisent de souffrir en courant après les
filles par exemple ). Pour moi, les poètes ont un ego en déroute. Mais
peut-être que ce genre de créations n'échappent pas à cette débâcle ?
Ceci n'est pas péjoratif. Qu'est-ce qu'un artiste ( dans la forme occidentale
depuis la Renaissance ) ? Une quête égotique. Pour Freud c'est un introverti
à la limite de la névrose et qui cherche -à travers sa création- un retour
à la réalité. Donc, un ego qui se cherche ( d'oû l'importance de cette
activité dans la période de la jeunesse ) mais en même temps qui se sait
fragile dans l'écrit et tend inconsciemment vers sa destruction ( car l'égo,
c'est trop lourd à porter ). Mais il doit être aussi ( et laissons Freud ),
c'est peut-être ce qui le sauve, "a sensitive man" - c'est ainsi que les
anglais désignent l'artiste. L'artiste est un être qui sait fournir aux
autres une sorte de "tremplin à émotions" ( le poème = le tremplin ) et ce,
dans le but de les conduire à percevoir des émotions, des sentiments qu'ils
ignoraient porter en eux, et qu'ils découvrent par la magie du poème. Afin
d'alléger le commentaire, je vous propose pour conclusion ces quelques
références ( avec celui de Freud ) pour vous inciter à devenir une
"bouffonne" ! ^^ { Cf. S.Freud, Introduction
à la psychanalyse ; Nietzsche, Le Gai savoir }
|
Méphistophélès
Suprème actif
Inscrit le: 10 Sep 2006
Messages: 4299
|
Posté le: Sam Mar 29, 2008 16:54 pm Sujet du message:
lilith888 a
écrit: | Bien que je ne
comprenne absolument pas ton langage (mélange de termes étrangemment
employés) [...]
tu mélanges tout, j'ai l'impression que tu effleures les sujets sans les
connaître vraiment. |
C'est tout à fait ça.
Si je devais choisir un bord, je serais plutôt du côté des "biographiques"
pour reprendre ton expression. J'aime par le biais du langage à pénétrer
dans l'intimité de l'auteur, à découvrir ses fantasmes, ses hallucinations,
ses bizarreries, ses petites inconséquences. Je vois dans l'écriture - et en
cela mon commentaire dépasse le cadre de la simple poésie - une porte
ouverte sur l'intériorité de l'écrivain. J'aime à me reconnaître dans ses
lubies - transfert, sûrement, et c'est là toute l'astuce - à sentir cette
proximité de deux êtres liés par l'esprit.
D'un point de vue formel, je suis particulièrement sensible à tout ce qui
peut concourir au primat de l'affect sur les conventions: rythmes
déconstruits, images dans ce qu'elles ont d'absurde et de troublant,
associations inédites et néanmoins porteuses de sens. Je conçois
l'écriture dans sa dimension presque mathématique: il y a un locuteur, un
récepteur, et meilleure sera la communication, plus grand sera le lien. Il va
sans dire que le style, de mon point de vue, est la condition sine qua non à toute tentative de
transmission.
Mes égérie poétiques, je les trouve chez des auteurs tels Dante, Sade,
Baudelaire, Kafka, Cocteau. Quoique très différents, tous possèdent à leur
manière, il me semble, cette tension de l'être qui tend à s'exprimer par
lui même.
Dernière édition par Méphistophélès le Sam Mar 29, 2008 17:06 pm; édité 1 fois
|
Silver Mercure
Habitué(e)
Inscrit le: 24 Oct 2007
Messages: 16777195
|
Posté le: Sam Mar 29, 2008 17:05 pm Sujet du message:
hé, les copains, aujourd'hui je suis d'accord avec Méphisto !
enfin... à chaque auteur convient une lecture différente je pense. pour ceux
qu'a cités lilith, d'abord je ne pense pas qu'ils n'expriment rien du tout.
même vouloir ne rien exprimer est une intention.
Stupidité R. c'est peut-être fait exprès, mais j'ai du mal à te lire.
|
Ozimandias
Banni(e)
Inscrit le: 21 Aoû 2006
Messages: 750
Localisation: Rien.
|
Posté le: Sam Mar 29, 2008 17:08 pm Sujet du message:
Qu'est-ce précisément que tu ne comprends pas lilith888 ?
Ça me surprend assez car j'ai pourtant répété 4 fois la même chose ...
|
Méphistophélès
Suprème actif
Inscrit le: 10 Sep 2006
Messages: 4299
|
Posté le: Sam Mar 29, 2008 17:10 pm Sujet du message:
D'une tu t'exprimes très mal, et de deux, tu ne dis pas grand chose. Mais
quand bien même, ce n'est pas l'ambition de ce topic que de susciter un
nouveau débat inepte en ta présence. La conversation est intéressante pour
une fois, laisse-nous donc.
|
Invité
|
Posté le: Sam Mar 29, 2008 17:16 pm Sujet du message:
Méphisto, je me reconnais en toi, vu que je ressentais exactement les mêmes
choses, mais avant, c'est à dire jusqu'à la maîtrise.
Je suis d'accord lorsque tu parles de mathématiques, car c'est exactement
cela : aujourd'hui, je suis sortie du fantasme pour entrer dans la rigueur
mathématiques.
Parce que, pour moi, tout le reste n'est que supposition (d'où le fait que
les scientifiques ne prennent généralement jamais les littéraires au
sérieux)
Ce qui m'a fait changer d'avis ? L'impasse devant laquelle je me suis trouvée
en étudiant un auteur en profondeur. Je me suis spécialisée dans l'étude
de François Mauriac, d'abord parce que ses romans "me parlaient", je me
reconnaissais en lui, je pensais ressentir ses propres sentiments à travers
sa plume. Ce fut l'objet de mon premier mémoire de maîtrise. En master, sur
le même auteur, je suis parti dans le sens totalement opposé. Car le gros
problème de Mauriac, comme bien d'autres écrivains, c'est que lorsque tu
étudies vraiment tout venant d'eux (j'ai fouillé ses correspondances, ses
mémoires, ses romans... tout) tu t'aperçois qu'ils disent souvent tout et
son contraire, qu'ils collent à une image que le lecteur leur donne parce que
c'est leur job tout simplement. L'écrivain est le plus grand des menteurs,
surtout s'il sait qu'il sera lu un jour. Et, sur un mensonge, on ne peut
fonder aucune affirmation sérieuse, tu n'est pas d'accord ?
Après, il reste bien évidemment le texte. A l'intérieur, des choses à
trouver, des conclusions à dégager, mais ne restant dans la sphère du texte
seulement.
Le problème de ta position (que je trouve inconfortable) c'est que tu parles
du style comme s'il était révélateur. Or, le style est imitable, c'est le
travail du pastiche (ou du faux en peinture). En ce sens, il n'est pas unique,
pas propre à un individu. Dans la première édition des poèmes de
Baudelaire en Pléiade, un petit malin avait glissé de ses propres poèmes
dedans, imitant le style de Baudelaire. Les lecteurs n'y ont vu que du feu,
croyant avoir sous les yeux des inédits du maître....
|
Invité
|
|
Silver Mercure
Habitué(e)
Inscrit le: 24 Oct 2007
Messages: 16777195
|
Posté le: Sam Mar 29, 2008 17:25 pm Sujet du message:
attends lilith, si la forme est imitable et que le fond peut n'être que
mensonge, que reste-t-il d'intéressant ?
personnellement ça ne me dérange pas tant qu'on me mente, tant qu'on m'a
transmis quelque chose, c'est d'ailleurs ce que je voudrais faire plus tard,
gentille illusionniste pédagogue.
Stupidité, tu ne crois pas si bien faire, c'est vraiment la forme compacte et
emmêlée de parenthèses et de bouts de phrases qui me confusait ^^, d'autant
que j'ai trop chaud à la tête à l'instant. Merci
|
Ozimandias
Banni(e)
Inscrit le: 21 Aoû 2006
Messages: 750
Localisation: Rien.
|
Posté le: Sam Mar 29, 2008 17:34 pm Sujet du message:
Silver Mercure a
écrit: | c'est d'ailleurs ce que
je voudrais faire plus tard, gentille illusionniste
pédagogue |
.Ne pas voir
.Ne pas entendre
.Ne pas penser
Pièce tragique en trois actes répété partout dans le monde qui fait la
fierté de ses acteurs.
J'applaudis.
|
Méphistophélès
Suprème actif
Inscrit le: 10 Sep 2006
Messages: 4299
|
Posté le: Sam Mar 29, 2008 17:45 pm Sujet du message:
Silver Mercure a
écrit: | personnellement ça ne
me dérange pas tant qu'on me mente, tant qu'on m'a transmis quelque chose,
c'est d'ailleurs ce que je voudrais faire plus tard, gentille illusionniste
pédagogue. |
C'est aussi ce que je te répondrais lilith888: ce qui importe au final ce
n'est pas tant de cerner la véritable personnalité de l'auteur, mais de
tirer profit de l'image que le texte nous renvoie.
De plus, la création littéraire m'intéresse également à un autre niveau,
plus "scientifique" peut-être: je vois dans la littérature une histoire des
idées, une histoire des fantasmes, une histoire des représentations de
l'être et de la société. Le cursus universitaire que je suis actuellement
va tout à fait dans ce sens: histoire/littérature pour historiens et lettres
modernes/histoire culturelle.
Ozimandias, je doute que tu sois en mesure de saisir la position de Silver,
position que - en amoureux du savoir - je partage tout à fait.
|
Ozimandias
Banni(e)
Inscrit le: 21 Aoû 2006
Messages: 750
Localisation: Rien.
|
Posté le: Sam Mar 29, 2008 17:52 pm Sujet du message:
Je comprend les résultantes, mais pourquoi vouloir ça ?
Effectivement je n'arrive pas à en saisir toute l'horreur.
|
K
Suprème actif
Sexe:
Inscrit le: 10 Avr 2006
Messages: 4871
|
Posté le: Sam Mar 29, 2008 17:55 pm Sujet du message:
C'est parce que tu es un génie. et un génie est un incompris, un paria, il
ne partage pas les valeurs du commun des mortels. je ne vois que ça.
|
K
Suprème actif
Sexe:
Inscrit le: 10 Avr 2006
Messages: 4871
|
Posté le: Sam Mar 29, 2008 17:55 pm Sujet du message:
Ah, attend, j'ai une autre idée. tu es peut-être très con, simplement.
|
Invité
|
Posté le: Sam Mar 29, 2008 17:58 pm Sujet du message:
lol sorry pour les parenthèses. ^^
Je suis assez d'accord avec toi lilith, les artistes sculptes ( maquillent )
le mot et travaillent le style ; à partir de cela, il est facile de
"refouler" une situation ( c'est très Freudien tout ça ). En fait, la
création est peut-être liée à l'idée de "vexation" ou de frustration -
sorte de justification quant il s'agit de cacher le "vrai" - détourner cette
vexation par le biais de l'art - l'inconscient l'interprète comme véridique,
oui : "je rejette tous ce qui ne m'est pas assimilable". Je ne sais pas si
j'ai été assez clair. ^^ D'autre part, ce que je trouve d'intéressant chez
un Baudelaire, c'est le fait qu'il donne au poème une dimension de "mythe".
|
Silver Mercure
Habitué(e)
Inscrit le: 24 Oct 2007
Messages: 16777195
|
Posté le: Sam Mar 29, 2008 18:10 pm Sujet du message:
j'entends très bien.
les choses ont justement besoin d'être digérées et de resortir comprises et
assimilées par moi, je décode et je recode d'une façon qui me paraît
claire et que j'espère signifiante pour d'autres.
c'est le sens que moi je donne à l'acte créatif, assimiler et transmettre.
c'est le sens des contes, pourquoi écrire l'histoire d'une jeune fille qui
rencontre un grand animal noir dont elle n'a aucune peur, qu'elle laisse la
débarasser de son ascendance et la manger elle-même ? ça me semble
évident.
|