hally
Membre
Sexe:
Inscrit le: 11 Fév 2006
Messages: 302
|
Posté le: Dim Fév 19, 2006 16:56 pm Sujet du message:
Al-Ghazali
Biographie en résumé
Philosophe, théologien et penseur (1058-1111) de l'éducation musulman.
Vie et oeuvre
"Jusqu'à une époque fort récente, la pensée islamique représentée par
al-Ghazali constituait le courant dominant dans la théorie et la pratique de
l'islam (sunnite en particulier). Ce géant de la pensée, au savoir
encyclopédique, a influé sur la pensée islamique et défini sa pratique
pendant près de neuf siècles. Il représentait «l'islam pacifique»..
La lutte entre la pensée d'al-Ghazali et celle d'al-Mawdudi continue, et elle
constitue sans doute un des principaux facteurs appelés à façonner l'avenir
du monde arabo-islamique.
Quelle que soit l'issue de cette lutte, al-Ghazali demeure l'un des plus
grands philosophes (bien qu'il s'en soit lui-même défendu) et penseurs de
l'éducation dans l'histoire du monde islamique. Sa vie — élève assoiffé
de savoir, puis enseignant dispensant le savoir, puis savant développant le
savoir — illustre bien ce qu'était la vie des étudiants, des enseignants
et des savants dans le monde islamique au Moyen Âge.
La vie d'al-Ghazali
Al-Ghazali est né en 450 de l'Hégire, soit 1058 de l'ère chrétienne, dans
la ville de Tus (Khorassan) ou dans un des villages avoisinants, au sein d'une
famille persane de condition modeste, dont certains membres étaient connus
pour leur savoir et leur penchant pour le mysticisme soufi. Al-Ghazali était
encore jeune lorsque son père mourut, après avoir chargé un de ses amis
soufis de s'occuper de l'éducation de ses deux fils. L'ami en question
s'acquitta de cette mission jusqu'à épuisement des fonds légués par le
père et conseilla aux deux frères de s'inscrire dans une madrasa où les
élèves suivaient des cours et étaient pris en charge matériellement.
Al-Ghazali aurait commencé, vers l'âge de sept ans, par étudier l'arabe et
le persan, le Coran et les principes de religion. À la madrasa, il entra dans
le cycle des études secondaires et supérieures comportant le fiqh
(jurisprudence islamique) et l'exégèse (tafsir) du texte coranique et des
hadith (propos du Prophète).
Vers l'âge de 15 ans, al-Ghazali s'installa à Jurjan (centre florissant du
savoir à l'époque, situé à 160 km environ de Tus) pour étudier le fiqh
auprès de l'imam Al-Ismayli. Ce type de «voyage à la recherche du savoir»
en vue de suivre l'enseignement des maîtres réputés du moment, était une
des traditions éducatives de l'islam. Il revint l'année suivante à Tus, où
il demeura trois années, consacrées à mémoriser et mieux comprendre ce
qu'il avait transcrit de l'enseignement de ses maîtres et à poursuivre
l'étude du fiqh. Il se rendit ensuite à Naysabur (Nishapur), où il étudia
le fiqh, la théologie dogmatique (kalam) et la logique, ainsi que,
semble-t-il, des éléments de philosophie, auprès de l'imam Al-Juwayni, le
jurisconsulte de rite chaféite le plus célèbre de l'époque. Al-Ghazali
avait alors 23 ans. Durant les cinq années qui suivirent, il fut l'élève et
l'assistant de l'imam al-Juwayni, et commença à publier quelques ouvrages et
à étudier le soufisme auprès d'un autre cheikh, al-Farmadhi.
La mort d'al-Juwayni (478 H/1085) voit s'achever la période d'apprentissage
d'al-Ghazali - qui a alors 28 ans - et débuter celle de l'immersion dans la
politique et de la fréquentation des allées du pouvoir. Il se rend au
«camp» du ministre seljoukide Nizam al-Mulk, où il mène pendant six
années la vie des « juristes de cour », faite de combats politiques, de
joutes savantes et d'écriture, jusqu'à ce qu'il soit nommé professeur à la
madrasa Nizamiya de Bagdad, l'un des centres de savoir et d'enseignement
(sorte d'université) les plus importants et les plus connus dans l'Orient
islamique à l'époque. Durant les quatre années où il occupe ce poste, il
publie un certain nombre d'ouvrages sur le fiqh — qu'il enseigne — la
logique et le kalam, les plus importants étant le Mustazhiri et Al-Iqtisad
fil-I'tiqad [le juste milieu dans la croyance], deux ouvrages de jurisprudence
à caractère politique.
Al-Ghazali prend part à trois affrontements politiques et intellectuels
majeurs qui secouent le monde islamique à cette époque, à savoir la lutte
entre la philosophie et la religion (entre la culture islamique et la culture
grecque) — il prend position pour la religion contre la philosophie; la
lutte entre le sunnisme et le chiisme — il prend position pour le califat
abbasside contre les batinites; la lutte entre l'inspiration et la raison et
entre le fiqh et le mysticisme.
Durant la période où il enseigne à la Nizamiyya de Bagdad, al-Ghazali
étudie
longuement la philosophie (celle des Grecs, Aristote, Platon et Plotin en
particulier, et la philosophie islamique, notamment Ibn Sina [Avicenne] et
al-Farabi) afin de mieux la réfuter. Le problème essentiel auquel il est
confronté est celui de concilier la philosophie et la religion, et il le
résout en ces termes: la philosophie est dans le vrai dans la mesure où elle
est conforme aux principes de la religion (de l'islam) et dans l'erreur
lorsqu'elle est en contradiction avec ces principes. En prélude à ses
attaques contre la philosophie, al-Ghazali écrit un ouvrage, Maqasid
al-Falasifa [Les intentions des philosophes ], dans lequel il expose
l'essentiel de la pensée philosophique connue à son époque suivi de son
célèbre ouvrage, Tahafut al-Falasifa [ L'incohérence des philosophes]. Il
résume son opposition à la philosophie en vingt questions touchant l'homme,
le monde et Dieu. Pour al-Ghazali, le monde est une création récente, les
corps rejoignent les âmes dans l'au-delà et Dieu connaît les particuliers
comme il connaît l'universel.
Le Tahafut al-Falasifa [L'incohérence des philosophes] a eu un retentissement
considérable dans le monde arabo-islamique, et jusque dans l'Europe
chrétienne; cette oeuvre et son auteur ont été un des facteurs du déclin
de la pensée philosophique grecque dans le monde islamique, en dépit des
quelques tentatives de défense de la philosophie par Ibn Ruchd (Averroès) et
d'autres (4).
Avec l'intensification de l'affrontement militaire et intellectuel entre le
sunnisme et le chiisme, entre le califat abbasside, d'une part, et l'État
fatimide et ses partisans et alliés dans le Machreq, de l'autre, al-Ghazali
est mobilisé dans ce combat, et il publie effectivement une série d'ouvrages
à ce sujet, le plus important étant Les vices de l'ésotérisme et les
vertus de l'exsotérisme.
L'ésotérisme des batinites repose sur deux principes fondamentaux:
l'infaillibilité de l'imam, source obligatoire du savoir, et
l'interprétation ésotérique de la chari'a (la loi révélée de l'islam)par
l'imam et ses représentants. Al-Ghazali concentre ses attaques sur le premier
principe, celui de l'infaillibilité de l'imam, son but étant de défendre le
califat abbasside et de justifier son existence, fut-elle symbolique (le
califat se trouve alors en situation d'extrême faiblesse), d'assouplir les
conditions d'accession à l'imamat et de conférer une légitimité aux
sultans seljoukides, qui détiennent alors le véritable pouvoir militaire et
politique, problème juridico-politique auquel ont aussi été confrontés
d'autres fuqaha (jurisconsultes) musulmans, al-Mawardi en particulier. Mais la
campagne d'al-Ghazali contre les batinites n'est pas couronnée du même
succès que sa campagne contre les philosophes.
Vers 1095/488 H, al-Ghazali, alors âgé trente-huit ans, traverse une crise
spirituelle qui dure à peu près six mois et que l'on peut résumer à un
affrontement violent entre la raison et l'âme, entre le monde d'ici-bas et
celui de l'au-delà. Il commence par douter des doctrines et clans existants
(c'est-à-dire de la connaissance), puis se met à douter des instruments de
la connaissance. Cette crise l'affecte physiquement au point qu'il perd
l'usage de la parole et devient donc incapable d'enseigner, et elle ne prend
fin que lorsqu'il renonce à ses fonctions, à sa fortune et à sa
célébrité, après avoir atteint la vérité grâce à la lumière jetée
par Dieu dans son coeur. Al-Ghazali résume les doctrines dominantes à son
époque à quatre doctrines principales: la théologie dogmatique, fondée sur
la logique et la raison; l'ésotérisme, fondé sur l'initiation; la
philosophie, fondée sur la logique et la démonstration; le soufisme, fondé
sur le dévoilement et le témoignage. De même, les moyens de parvenir à la
connaissance se ramènent à: les sens, la raison et l'inspiration. Il finit
par choisir le soufisme et l'inspiration et, convaincu que l'unité du monde
et de l'au-delà était difficile, voire impossible, il prétexte un
pèlerinage à la Mecque pour quitter Bagdad et se rendre à Damas
Les influences soufis sont nombreuses et fortes dans la vie d'al-Ghazali. Il
vit à l'époque où le soufisme se propage: son père était proche du
soufisme, son tuteur est soufi, son frère le devient à un âge précoce, ses
maîtres penchent vers le soufisme, le ministre Nizam al-Mulk est proche des
soufis et al-Ghazali lui-même a étudié le soufisme. Mais le soufisme n'est
pas qu'un savoir théorique étudié dans les livres ou enseigné par des
maîtres, c'est aussi une action, une pratique et un comportement, dont les
principes de base sont, notamment, le renoncement au monde d'ici-bas, la
solitude et l'errance. C'est ce que fait al-Ghazali qui, pendant près de deux
ans, mène une vie d'ermite entre Damas, Jérusalem et La Mecque. C'est à
cette époque qu'il commence à écrire le plus important de ses livres, Ihya'
`Ulum al-Din [Vivification des sciences de la foi] - qu'il termine peut-être
ultérieurement. Divisée en quatre parties, consacrées respectivement aux
pratiques du culte, aux coutumes sociales, aux vices causes de perdition et
aux vertus conduisant au salut, cette oeuvre n'apporte rien de
fondamentalement nouveau, mais on trouve dans ses quatre volumes et ses
quelque 1.500 pages l'essentiel de la pensée islamique religieuse du Moyen
Age, sous une forme à la fois exhaustive, claire et simple qui explique la
place unique qu'elle occupe dans l'histoire de la pensée islamique.
Al-Ghazali regagne Bagdad en 1097/490 H et continue à vivre comme un soufi
dans le ribat d'Abou Saïd de Naysabur, qui se trouve en face de la madrasa
Nizamiyya. Il reprend pendant un certain temps l'enseignement, qu'il consacre
essentiellement à la d' Ihya' `Ulum al-Din [Vivification des sciences de la
foi], puis se rend à Tus, sa ville natale, où, continuant à vivre en soufi
et à écrire, il achève semble-t-il son oeuvre majeure susmentionnée et
produit d'autres ouvrages dont l'inspiration mystique est manifeste .
En 1104/498 H, al-Ghazali reprend ses fonctions à la madrasa Nizamiyya de
Naysabur, à la demande du ministre seldjoukide Fakhr al-Mulk, après quelque
dix années d'absence. Il continue néanmoins à vivre la vie des soufis et à
écrire. En 503 H, il quitte Naysabur et regagne à nouveau Tus, sa ville
natale, où il poursuit la vie de renoncement des soufis et l'enseignement.
Près de sa maison, il fait construire un khangah (sorte d'ermitage soufi) où
il écrit à cette époque Minhaj Al-'Abidin [La voie de la dévotion] , qui
semble être une description de sa vie et de celle de ses élèves:
renoncement au monde d'ici-bas, solitude et éducation de l'âme. C'est ainsi
qu'il coule le reste de ses jours, jusqu'à sa mort en 1111/505 H.
La philosophie d'al-Ghazali
La philosophie d'al-Ghazali, comme la philosophie islamique de manière
générale, tourne essentiellement autour du concept de Dieu et de ses
rapports avec ses créations (le monde et l'homme). Certes, al-Ghazali
commence par suivre le courant de pensée islamique du fiqh et, plus
précisément, celui de la théologie dogmatique ash'arite, dans sa
description de l'identité et des attributs de Dieu, et des attributs de Dieu,
et le courant soufi dans la définition de la relation entre Dieu et l'être
humain, mais il va plus loin en proposant une idée neuve de l'identité de
Dieu, de ses attributs et de son action .
Al-Ghazali est en accord avec les jurisconsultes et les théologiens quant à
l'unicité et l'éternité de Dieu, un dieu sans substance ni forme, qui ne
ressemble à aucune chose et auquel aucune chose ne ressemble, un dieu
omniprésent, omniscient et omnipotent, un dieu doué de vie, de volonté,
d'ouïe, de vue et de parole. Mais le dieu d'al-Ghazali est différent en ce
que l'univers et ses composantes, et les actes des hommes, sont soumis à sa
forte emprise et à son intervention directe et constante, et que les concepts
propres à la justice des hommes ne sauraient lui être appliqués. Il
diffère aussi par la prise en considération du bien des créatures.
À l'instar de nombreux jurisconsultes et philosophes, al-Ghazali distingue
deux mondes, celui-ci, qui est éphémère, et l'autre qui est éternel. Le
premier, celui de l'existence matérielle, est une existence provisoire,
soumise à la volonté de Dieu; il n'est pas régi par un ensemble de lois
scientifiques, qui sont en réalité une partie de ce monde, mais dominé,
régi et dirigé par l'intervention directe et constante de Dieu (refus de la
causalité). Dieu n'est pas seulement le créateur de l'univers, de ses
caractéristiques et de ses lois (ou cause de l'existence), il est aussi la
cause de tout événement qui y survient, insignifiant ou important, passé,
présent ou à venir .
C'est dans cet univers que vit l'être humain, créature faite d'une âme
immortelle et d'un corps éphémère. L'être humain n'est ni bon ni mauvais
par nature, encore que sa disposition naturelle soit plus proche du bien que
du mal. Il se meut, en outre, dans un espace restreint, où les contraintes
l'emportent sur les possibilités de choix. Il est moins fait pour le monde
d'ici bas, où il souffre, que pour l'autre, auquel il dois aspirer et vers
lequel il doit faire tendre ses efforts.
La société, formée d'êtres humains, n'est pas et ne saurait être
vertueuse pour al-Ghazali. C'est une société où le mal l'emporte sur le
bien, au point que l'être humain a plus intérêt à l'éviter plutôt qu'à
y vivre. La société ne peut aller qu'en empirant. L'individu y a ses droits
et ses devoirs, mais son existence est insignifiant à côté de l'existence
et de la puissance du groupe. C'est aussi une société stratifiée, composée
d'une élite pensante et dirigeante et d'une masse, qui a entièrement
abandonné son sort aux mains de cette élite. Les questions de la religion et
de la doctrine sont du ressort des savants et les affaires de ce monde et de
l'État sont aux mains des dirigeants. Le peuple, lui, n'a qu'à obéir.
Enfin, la société est entièrement soumise à l'autorité de Dieu et à ses
injonctions, son seul but étant la religion et de donner aux êtres humains
la possibilité de vénérer Dieu .
Conscience et savoir sont les traits distinctifs majeurs de l'être humain,
lequel puise sa connaissance à deux sources, l'une humaine, qui lui permet de
découvrir le monde matériel où il vit, au moyen de ces outils limités que
sont la perception et la raison, et l'autre divine, qui lui permet de
connaître le monde de l'au-delà, par la révélation et l'inspiration. Ces
deux types de connaissance ne sauraient être mis sur un pied d'égalité, du
point de vue de leur source comme de leur méthode ou de leur degré de
vérité. Le vrai savoir ne peut venir que du dévoilement, une fois l'âme
réformée et purifiée par l'éducation de l'esprit et du corps, et en
conséquence prête à enregistrer ce qui est gravé dans la mémoire. Il
s'agit d'un savoir dont le vecteur n'est ni la parole ni l'écrit, un savoir
qui investit l'âme dans la mesure où celle-ci est pure et prête à le
recevoir. Et plus l'âme acquiert ce savoir, plus elle connaît Dieu et s'en
rapproche, et plus le bonheur de l'être humain est grand .
Selon al-Ghazali, l'individu vertueux est celui qui renonce à ce monde pour
tendre vers l'au-delà, qui préfère la solitude à la fréquentation de ses
semblables, le dénuement à la richesse et la faim à la satiété. C'est
l'abandon à Dieu et non le goût du combat qui dicte son comportement et il
est plus enclin à faire preuve de patience que d'agressivité . Curieusement,
au moment même où l'image de l'homme vertueux commençait à évoluer en
Europe, le «moine chevalier» supplantant le moine errant, le vêtement de
l'homme vertueux changeait aussi dans l'Orient arabe, avec la différence que
l'armure du cavalier combattant laissait la place aux haillons du soufi. Et
alors que Pierre l'Ermite ameutait les masses européennes et les mobilisait
pour les croisades, al-Ghazali exhortait les Arabes à se soumettre aux
souverains et à se détourner de la société. C'est ainsi que le penseur et
le philosophe contribuent à façonner la société et à modifier le cours de
l'histoire.
(...)
L'influence d'al-Ghazali
Al-Ghazali est mort à l'âge de cinquante-cinq ans, après une vie qu'on peut
estimer courte si l'on considère l'ampleur, la richesse et l'influence de son
oeuvre. Il est permis de dire qu'il a été un des plus grands penseurs
musulmans, un de ceux qui ont laissé l'empreinte la plus profonde, méritant
ainsi le surnom de «rénovateur du Ve siècle de l'Hégire». La grande
influence qu'a eue al-Ghazali peut-être attribuée à plusieurs éléments,
à savoir:
* La profondeur, la force et l'étendue de sa pensée, consignée dans plus de
cinquante ouvrages, dont les plus importants sont Ihya' `Ulum al-Din
[Vivification des sciences de la foi], Tahafut al-Falasifa [L'incohérence des
philosophes] et Al-Munquidh min al-Dalal [Erreur et délivrance], ouvrages que
l'on continue aujourd'hui à étudier;
* Ses vues étaient en accord avec son époque et son milieu, reflétant cette
époque sans doute plus qu'elles ne répondaient à ses besoins et à ses
exigences, et constituant un élément de continuité et d'ordre plus qu'un
facteur de renouveau et de changement;
* Après lui, la société et la pensée islamiques sont ensuite entrées dans
une longue ère de sclérose et de décadence, où les grands penseurs se sont
faits rares, ce qui explique que la pensée d'al-Ghazali soit restée vivante
et influente.
L'influence d'al-Ghazali sur la pensée islamique peut être ramenée aux
éléments ci-après:
* Retour du «principe de crainte» dans la pensée religieuse, et insistance
sur l'existence du Créateur siégeant au centre de l'existence humaine et
régissant directement et constamment le cours des choses (après que les
soufis eurent défait le «principe d'amour»);
* Introduction de certains principes de logique et de philosophie (nonobstant
les attaques d'al-Ghazali contre ces disciplines) dans la jurisprudence et la
théologie dogmatique;
* Réconciliation entre la «charia» et le soufisme (entre les jurisconsultes
et des soufis) et multiplication des confréries soufies;
* Défense de l'islam sunnite contre la philosophie et le chiisme;
* Affaiblissement de la philosophie et des sciences de la nature.
L'influence d'al-Ghazali s'est étendue au-delà du monde islamique pour
s'exercer jusque sur la pensée européenne chrétienne. À la fin du XIe
siècle et surtout au XIIe siècle de l'ère chrétienne, de nombreuses
oeuvres arabes, de mathématiques, d'astronomie, de sciences naturelles, de
chimie, de médecine, de philosophie et de théologie ont été traduites en
latin, dont certaines oeuvres d'al-Ghazali, notamment, Ihya' `Ulum al-Din
[Vivification des sciences de la foi], Maqasid al-Falasifa [Les intentions des
philosophes ] (que d'aucuns ont prise par erreur pour un exposé de la pensée
d'al-Ghazali alors qu'il s'agissait d'une récapitulation des principes
philosophiques en cours à l'époque), Tahafut al-Falasifa [ L'incohérence
des philosophes] et Mizan al-'Amal [critère de l'action]. En outre, un
certain nombre de savants européens connaissaient l'arabe et ont pu prendre
directement connaissance des vues d'al-Ghazali, l'influence est très
nettement perceptible chez de nombreux philosophes et savants du Moyen Âge et
du début de l'ère moderne, particulièrement chez Thomas d'Aquin, Dante et
David Hume. Thomas d'Aquin (1225-1274), dans sa Summa Theologiae [Somme
théologique] doit beaucoup à al-Ghazli (notamment - à la Ihya' `Ulum al-Din
[Vivification des sciences de la foi] , à Kimiya-yi Sa'adat [L'alchimie du
bonheur] Ar-Risala al-Laduniyya [«La sagesse chez les créatures de Dieu» et
au «Message divin». Les écrits de Dante (1265-1321) révèlent clairement
le pouvoir islamique d' al-Ghazali et de Risalat al-Ghufran [Épître du
pardon ] d'al-Maari. Et al-Ghazali a également exercé une influence sur
Pascal (1623-1662), surtout en donnant la primauté à l'intuition sur la
raison et les sens, et cette influence se fait sentir chez Hume (1711-1772),
dans sa réfutation de la causalité.
Il semble qu'al-Ghazali ait exercé une influence plus profonde sur la pensée
juive que sur la théologie et la pensée chrétiennes. Nombreux en effet
étaient les savants juifs du Moyen Age qui connaissaient parfaitement la
langue arabe, et certaines oeuvres d'al-Ghazali ont été traduites en
hébreu. Son livre Mizan al-'Amal [Critère de l'action], en particulier, a
trouvé un public chez les juifs du Moyen Âge: il a été plusieurs fois
traduit en hébreu, et même adapté, les versets du Coran étant remplacés
par les mots de la Torah. Un des grands penseurs juifs qui ont subi
l'influence d'al-Ghazali a été Maïmonide (en arabe: Musa Ibn Maimun; en
hébreu: Moshe ben Maimom [1135-1204], cette influence étant manifeste dans
son Dalalat al Ha'irin [Guide des égarés ], rédigé en arabe, l'une des
oeuvres les plus importantes de la théologie juive
Médiévale .
Les écrits d'al-Ghazali sur l'éducation représentent l'apogée de la
pensée éducative dans la civilisation islamique. La conception de
l'éducation qu'il a élaborée peut être considérée comme la construction
la plus achevée dans ce domaine, définissant clairement les buts de
l'éducation, traçant la route à suivre et exposant les moyens de parvenir
au but recherché. Al-Ghazali a exercé une influence évidente sur la pensée
éducative islamique du Vie au XIIIe siècle de l'Hégire (du XIIe au XIXe
siècle de l'ère chrétienne). On peut presque dire qu'à de rares exceptions
près, les praticiens et les théoriciens de l'éducation n'ont rien fait
d'autre que copier al-Ghazali et résumer ses vues et ses écrits.
(...)
La quasi-totalité de la pensée éducative islamique (et en particulier
sunnite) a suivi le chemin tracé par al-Ghazali, dont l'influence
ininterrompue a survécu au déferlement de la modernité occidentale et à
l'apparition de la civilisation arabe moderne contemporaine.
ps: cette science nest pas de moi c du copié collé
|