Le dévalement chez Heidegger


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Bulbizarrexx
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Message Posté le: Lun Fév 28, 2011 10:53 am    Sujet du message: Le dévalement chez Heidegger
L'une des grandes forces de la philosophie Heideggerienne c'est sa capacité à décrire des experiences communes mais difficilement exprimables.

Qu'est ce que le dévalement?

C'est cet état dont nous faisons tous l'experience.
Celle de l'incapacité à se fixer sur quelque chose, le besoin constant de nouveauté.
Notre dasein (littéralement "être là") s'affole et en "veut toujours plus", il redoute la finitude et exprime son insatisfaction de ce qui est présent là devant et de s'y arrêter, notre lassitude de tout et de rien: nous sommes devant un film et nous pensons déjà au prochain que nous verrons, nous venons d'avoir de nouvelles chaussures et nous craquons pour une autre paire, nous sommes en vacances et pensons déjà aux prochaines, nos désirs insatiables et notre fuite continuelle...
Ce dévalement conduit à l'angoisse.
Il est important de souligner, qu'à l'inverse de Pascal, Heidegger ne porte pas un jugement négatif sur ce dévalement, il le considère comme un mode d'être pleinement constitutif du Dasein, c'est à dire de notre existence.

J'avais relevé un petit texte de Être et temps sur la question qui m'avait bien plu, le voici (j'ai remplacé certains mots conceptuels par d'autres-ceux qui sont en gras donc- pour que ce soit accessible pour tout le monde.)

Gelmah de Rothmir
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Message Posté le: Lun Fév 28, 2011 13:32 pm    Sujet du message:
En gros c'est du Pascal en plus ampoulé.
Bulbizarrexx
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Message Posté le: Lun Fév 28, 2011 13:39 pm    Sujet du message:
Oh non loin de là.Smile

Comme je le disais d'ailleurs, mais peut être avec trop peu d'insistance dans mon précédent message,
Nous sommes justement très loin du moralisme (mortifère et prescriptif) de Pascal.
Et beaucoup plus proche d'une approche phénoménologique, ontologique en fait et donc existentielle, du phénomène de l'angoisse.
Faire un parallèle avec Kierkegaard est à la limite plus judicieux...et encore.

Pascal voit le divertissement comme une esquive alors que Heidegger exprime le dévalement comme une caractéristique de notre Dasein.

A noter aussi; ils n'usent pas du même terme : si divertissement et dévalement paraissent similaire dans leur emploi, Heidegger ne parle pas que du divertissement en tant que tel mais de la recherche continuelle de la nouveauté (qui peut aussi s'appliquer au travail ou à des activités de nature non purement divertissantes)
Un mode d'être presque nécessaire à l'existence.
De plus, comme je l'ai dis, il n'y a aucun moralisme chez Heidegger, tout comme il n'y a aucune forme de phénoménologie ou d'ontologie existentielle/existentiale chez Pascal.

Pour résumer en un mot le message du texte posté c'est clairement : EXISTEZ! Very Happy

Alors que Pascal dit : Travaillez à votre salut misérables! Laughing

Heidegger comme Nietzsche se contente de "l'ici bas" et fait avec ce qui est là devant sans miser sur une vie future.
Lyriss
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Message Posté le: Lun Fév 28, 2011 22:20 pm    Sujet du message:
J'aime quand les philosophes font de la psychologie de comptoir, moi aussi je peux :

La paraisse se caractérise par un rejet systématique et conscient du présent dans l'avenir. La base du raisonnement de l'indolence étant que le présent est une valeur supérieur a celle de l'avenir pour une raison première qui est que l'avenir est une possibilité la ou le présent est une effectivité. Il est impossible de pouvoir penser l'avenir avec certitude, aussi, tout ce qui d'une manière ou d'une autre peut être remis a l'avenir peut également rejoindre le néant d'un avenir singulier qui aurait pour effet l'entrainement de la disparition de la nécessité immédiate.

Autrement dit, les possibilités pluriels de l'avenir sont les pères d'un espoir rationnellement fondé ; l'espoir de voir ses corvées, filles du passé et tortionnaires du présent se perdent dans une conjoncture future qui aurait fait disparaître l'essence de leur existence, et donc leur nécessité.

D'une autre manière, nous pouvons dire que la finitude de l'être engendre un déséquilibre fondamentale entre le présent et l'avenir dans la mesure ou le présent est lié a l'activité de la conscience et est donc infini car il ne peut exister de présent sans vie, et que la conscience s'éteignant avec la mort elle n'aura jamais conscience de l'absence du présent tandis que l'avenir est une matrice intellectuelle permettant une conscience artificiel de la mort, le présent est exempt de finitude la ou l'avenir en est parcellé. Se projeter dans l'avenir c'est nécessairement envisagé la possibilité de la disparition, et par corrélation tout ce qui peut être fait dans l'avenir au bénéfice du présent contient la possibilité de ne jamais avoir a être fait.
Bulbizarrexx
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Message Posté le: Lun Fév 28, 2011 22:39 pm    Sujet du message:
Laughing

Lyriss, je sais déjà que tu es evidemment le seul au monde à savoir philosopher et ce qu'est la philosophie, tu me l'as déjà fait remarquer sur un autre topic! XD
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Message Posté le: Mar Mar 01, 2011 01:06 am    Sujet du message:
Merci beaucoup. C'est toujours utile de se faire un lexique heideggerien. J'ai quelques questions toutefois :

1. "dévalement", ça désigne l'état de celui qui est impatient ou le processus par lequel la personne est prise dans cette impatience ? Bref, un processus ou un état ? Éventuellement, c'est quoi le terme allemand ?

2. Quelle traduction nous as-tu citée ?

3. Le texte sans les mots en gras, c'est possible ?

Merci d'avance !

EDIT : en cherchant le terme de "dévalement" dans le pdf correspondant à Être et temps trad. E. Martineau, je n'ai rien trouvé. Cette traduction diffère énormément de la traduction Vezin so : c'est moi qui ne sais pas faire une recherche ou comme l'ouvertude (etc.) c'est un néologisme abscons inventé par le traducteur ?

(en passant : vous noterez le succès fou de cette page facebook... http://www.facebook.com/group.php?gid=41483324351&v=wall )


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chiron
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Message Posté le: Mar Mar 01, 2011 01:31 am    Sujet du message:
Laughing

Lyriss, si c'est pas malheureux d'être aussi actif pour ne pas ranger sa chambre !
Allez on sort Pascal et le balais! No mais feignasse ! Laughing

Par contre, Bulbizarrexx, je crois qu'Heidegger - que je ne connais pas hors réputation - porte tout de même dans ce texte un jugement un peu hautain sur le dévalement, puisque je crois que pour lui, ce dévalement calme les angoisses qui pourraient nous faire grandir.

Et puis mettre dans le même panier le divertissement et la curiosité me choque... Qu'est ce que philosopher si ce n'est être curieux de tout: de soi, des autres et du monde ? Et si justement c'est la curiosité qui nous faisait grandir, qui repoussait nos limites ?
Et pourquoi la philosophie ne nous divertirait-elle pas ? C'est très platonicien ou protestant comme doctrine de ne jamais vouloir s'amuser ni de prendre de plaisir à ce que l'on fait.... Je crois bien au contraire qu'on peut apprendre en s'amusant, apprendre ensemble et s'amuser ensemble.
Bulbizarrexx
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Message Posté le: Mar Mar 01, 2011 13:50 pm    Sujet du message:
Oui Chiron, et je pense justement qu'Heidi est d'accord avec cette vision des choses.
Je pense vraiment que le dévalement pour lui est un constituant essentiel de l'individu.
Mais peut être qu'il constate le fait qu'il devienne premier et qu'on soit incapable de s'arrêter sur quoi que ce soit.
C'est comme lorsqu'il dit que tout est détruit par le politique ou que l'être est déraciné et en constante errance, il semble d'abord ne pas voir qu'il y a autre chose qui se construit à côté.
Pour le dévalement c'est pareil, il y a quelque chose de positif qui ressort de cette "bougeotte", de salvateur et de nécessaire même. Le problème c'est quand cet état perdure : il prend la forme d'un refus d'être face à soi même.

Ainsi le dévalement donne aussi à penser la condition de possibilité du dévalement : survivre dans la stricte vérité, est ce possible? Cela rejoint une des grandes questions Nietzschéenne : quelle dose de vérité l'homme peut-il supporter?
Avec le dévalement, il y a justement quelque chose qui est voilé.

Heidegger n'est absolument pas moraliste, c'est un existententialiste, phénoménologue (il a été l'élève d'Husserl) et pour la seconde periode de sa vie philosophique : un ontologiste radicale et aussi un poete (ce terme si péjoratif chez les cartésiens qui trouvent que la rigueur philosophique se perd en poésie (cf mon topic : "Heidegger et Hölderlin" Wink).
Je crois qu'il est très important, lorsqu'on aborde Heidegger, de sentir ce coté poétique et sensualiste, c'est peut être un peu ce qu'a voulu dire Lyriss par psychologue de comptoir d'ailleurs.
On parle d'un premier Heidegger et d'un second Heidegger.

Il tente plutôt ici de décrire l'experience de l'angoisse : ce que Sartre a appellé "la nausée" dans le livre du même titre (que j'avais adoré d'ailleurs) prendre conscience de la pure contingence de l'univers et de tout les objets qui s'y trouve.

Par ailleurs il ne critique pas du tout la curiosité et en fait même l'éloge en un sens "le on dit, la curiosité et l'équivoque sont le propre de l'existence comme ouverture de son être à lui même."


C'est le fait que cet état de dévalement perdure qui est périlleux. Parce que l'on devient de moins en moins capable de s'arrêter sur les choses, mais s'arrêter tout le temps ne serait pas bon non plus. C'est pour ça que le dévalement est bien un mode d'être de l'existence/du dasein et en ce sens il n'est pas critiqué du tout au contraire : c'est un processus naturel qui nous conduit à l'experience de l'angoisse, Heidegger décrit ici un vécu, une experience.


Quant à la traduction :

Elle est pourrie, c'est la pire, je sais bien, mais j'ai pris ce qu'il y avait à la BU. La meilleure est celle d'Emmanuel Martineau.

Quelques termes Heideggerien:

Angoisse : Angst

Dévalement : je n'ai pas trouvé, je ne possède pas le livre Etre et temps, mais j'éditerais dès que j'aurais l'info. De toute façon, j'ai une conférence sur Heidegger mi mars. Wink

Dasein : être là (et surtout pas présence comme on serait tenté de le traduire en français, présence est le terme utilisé par Aubenque pour l'ontologie Aristotélicienne contre celle d'Heidegger.) à la rigeur existence. L'être là indique un rapport avec le temps, en opposition avec l'être à soi.

être là devant : vorhanden

Arraisonnement : Gestell

Chose : Sache
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Message Posté le: Mar Mar 01, 2011 15:49 pm    Sujet du message:
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Bulbizarrexx
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Message Posté le: Mar Mar 01, 2011 16:22 pm    Sujet du message:
DJ a apporté sa contribution Laughing
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Message Posté le: Mar Mar 01, 2011 16:39 pm    Sujet du message:
Re !

C'est bien ce qu'il me semblait. La traduction Martineau a largement bénéficié d'Internet. Elle était introuvable du temps que seuls les exemplaires donnés par Martineau lui-même à des "amis" (des bibliothèques) contenaient ladite traduction mais maintenant elle est diffusé gratuitement en format pdf ou autres. Bref, ça doit être le seul ouvrage de philosophie du XXème disponible en version intégrale sur le Net.

Je te la recommande vivement. La première fois que j'ai ouvert Être et temps, c'était dans l'édition Gallimard et quoique le livre soit très beau, très agréable à manipuler, je l'ai vite refermé. ^^ Martineau, au contraire, ça se laisse lire aussi bien que Sartre.

A défaut du terme allemand, pourrais-tu me donner la référence exacte de cet extrait ? Je le retrouverai dans la traduction de Martineau, pour comparer (ça peut être amusant).
Bulbizarrexx
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Message Posté le: Mar Mar 01, 2011 16:40 pm    Sujet du message:
Je suis désolée, j'ai rendu le livre à la bibli mais je regarderais et j'en prendrais note, je mettrais aussi le vrai extrait, celui ci ayant été modifié Wink

Et merci d'avance pour la traduction! Smile
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Message Posté le: Mar Mar 01, 2011 16:45 pm    Sujet du message:
Bulbizarrexx a écrit:

Quelques termes Heideggerien:

être là devant : vorhanden

Par exemple, chez Martineau, on trouve :
vorhanden et zuhanden
ou
Vorhandenheit et Zuhandenheit traduits par (être-)sous-la-main et (être-)à-portée-de-la-main.

EDIT : http://www.google.fr/search?q=martineau+pdf+%22%C3%AAtre+et+te mps%22&ie=utf-8&oe=utf-8&aq=t&rls=org.mozilla:fr:official& client=firefox-a


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Message Posté le: Mar Mar 01, 2011 16:57 pm    Sujet du message:
[ Supprimé par l'auteur ]

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Message Posté le: Mar Mar 01, 2011 17:36 pm    Sujet du message:
Merci Cacocalie pour la traduction.
Je pense bien me procurer un exemplaire d'Etre et temps traduction Martineau un de ces jours. Smile

En tapant "Heidegger" sur google, j'ai trouvé ça Laughing :

Il est pour toi DJ, c'est un Heidegger tout nu que tu peux t'amuser à habiller fashion ou à laisser nu selon tes envies Razz
Enjoy yourself Wink

Invité








Message Posté le: Mar Mar 01, 2011 18:25 pm    Sujet du message: Re: Le dévalement chez Heidegger
Oh, tu comptes en acheter un exemplaire ? Vraiment ? Bon courage pour le trouver... Smile

Bulbizarrexx a écrit:



Ok. Alors le dévalement, c'est le Verfallen, aussi traduit par le terme de "déchéance" ou encore, chez Martineau, par le terme d'"échéance".

Pour info, tu citais des bouts de paragraphes d'Être et Temps, pp172-176 de l'édition allemande, qu'il convient d'annoter de la sorte :
Être et temps, Première partie, Première Section, Chapitre V (L'être-à comme tel), B (L'être quotidien du là et l'échéance du Dasein)
ou plus simplement :
Être et Temps, §§36-38 : La curiosité, L'échéance et l'être-jeté.

Différentes traductions... Je n'ai fait l'effort de rechercher que le premier passage cité, soit le premier paragraphe cité par Bulbi.

Citation:
C’est pourquoi la curiosité se caractérise par une incapacité spécifique de demeurer auprès de quoi que ce soit qui s’offre à elle. Elle ne recherche donc jamais le loisir de la demeure théorique, mais l’agitation et l’excitation qu’engendrent le renouvellement et la mutation des étants rencontrés. La curiosité se procure, par cette instabilité, la possibilité constante de la distraction. [Elle n’a rien de commun avec la considération admirative de l’étant, le thaumázein ; elle n’a point le souci d’être amenée par l’étonnement à comprendre qu’elle ne comprend pas : elle veut se procurer un savoir, mais seulement pour l’avoir su. Ces deux moments constitutifs de la curiosité, l’incapacité de demeurer dans le monde de la préoccupation et la dispersion en des possibilités toujours nouvelles, fondent le troisième moment essentiel de ce phénomène : une agitation incessante.] La curiosité est partout et nulle part. Ce monde de l’être-au-monde révèle ainsi un nouveau mode de ce déracinement constant, qui est caractéristique de l’être de l’être-là quotidien. »


Heidegger (Martin), L’être et le temps, § 36, traduction par Rudolf Boehm et Alphonse de Waelhens, Paris, Gallimard, collection «Bibliothèque de philosophie», 1964, p. 212.

Citation:
[Mais si la curiosité libérée se préoccupe de voir, ce n’est pas pour comprendre ce qui est vu, c’est-à-dire pour accéder à un être pour lui, mais seulement pour voir. Elle ne cherche le nouveau que pour sauter à nouveau de ce nouveau vers du nouveau. Ce dont il y va pour le souci d’un tel voir, ce n’est pas de saisir et d’être dans la vérité en sachant, mais de possibilités de s’abandonner au monde.] Aussi la curiosité est-elle caractérisée par une incapacité spécifique de séjourner auprès du plus proche. Aussi bien ne recherche-t-elle pas non plus le loisir du séjour considératif, mais l’inquiétude et l’excitation que donne le toujours nouveau et le changement incessant d’objet rencontré. En son non-séjour, la curiosité se préoccupe de la constante possibilité de la distraction. [La curiosité n’a rien à voir avec la contemplation admirative de l’étant, avec le thaumázein, ce qui lui importe n’est point d’être frappée d’incompréhension par la stupeur, mais elle se préoccupe d’un savoir simplement pour avoir su. Les deux moments constitutifs de la curiosité : l’incapacité de séjourner dans le monde de la préoccupation et la distraction vers de nouvelles possibilités, fondent le troisième caractère d’essence de ce phénomène, ce que nous appelons l’agitation.] La curiosité est partout et nulle part. Ce mode de l’être-au-monde dévoile un nouveau mode d’être du Dasein quotidien, où celui-ci ne cesse de se déraciner.


Être et Temps, M. Heidegger, traduction E. Martineau, §36 (La curiosité). p.146 (éd. Martineau) / pp.172-173 (éd. originale)

Pour chacune de ces deux traductions, le texte est lisible. Par contre, les coupes qu'il a subies lui font perdre beaucoup de son intérêt et la simplification lexicale grossit des concepts ciselés pour être fins. J'aurais donc tendance à trouver que cet "extrait" d'Heidegger est une catastrophe et si le repli total de Lyriss sur ce qu'il a sous-la-main m'attriste, ledit Lyriss n'avait pas tout à fait tort en dédaignant le texte.


Dernière édition par Invité le Mar Mar 01, 2011 18:54 pm; édité 1 fois
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Message Posté le: Mar Mar 01, 2011 18:37 pm    Sujet du message:
D'accord, c'était maladroit même si ça partait d'une bonne intention, je m'excuse.
Merci d'avoir posté ces deux extraits.

Après avoir lu les deux, je préfère la traduction de Martineau, je trouve qu'elle est plus fluide et rend bien compte du thême de l'habitation/du séjour très présent chez Heidegger.
Le dévalement peut se caractériser comme une tentative vaine d'échapper au monde dans lequel on se trouve avoir été jeté.

En tout cas je trouve ça vraiment très parlant ce concept de dévalement et ce besoin d'exclusivité continuelle qui nous fait "dévaler" (comme sur une piste de ski Wink ).
C'est vrai qu'on saute toujours d'une chose à une autre à la recherche d'une constante nouveauté, j'en fais sans cesse l'experience et c'est surtout cela que je voulais exprimer dans ce topic, le talent de description des experiences quotidiennes chez Heidegger.
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Message Posté le: Sam Mar 05, 2011 20:44 pm    Sujet du message:
Juste pour que je comprenne mieux le mot dévalement, est-ce qu'il s'appliquerait aussi bien aux expériences suivantes? Question

— Un individu est musicien. Il a du matériel. Il n'est pas satisfait de son son. Il achète plus de matériel. Il n'est toujours pas satisfait. Il achète encore, change, troque, etc., s'imaginant un jour trouver LE matériel parfait pour son son, alors qu'un observateur extérieur se rend rapidement compte que la caractéristique que cet individu cherche à suppléer est plutôt sa technique de jeu ou son apprentissage. - (Ce syndrome est très courant, certains lui ont même donné un petit mot : le GAS, Gear Acquisition Syndrome).

— Un individu a pour habitude de regarder le soir un DVD. Chaque fois un film différent. Au début, il regarde les films pour eux-mêmes ; cependant, rapidement, la chose la plus importante devient le rituel de regarder quotidiennement le film et non plus le film en lui-même ; et comme tu le disais au début du topic, il s'aperçoit alors souvent plus penser (parfois avec angoisse, parfois avec envie et les yeux plus gros que le ventre) à la liste de DVDs qu'il devrait acquérir et de films qu'il devrait voir. Et idem version livres.

— Un individu s'enferme chez lui et se passionne pour la littérature latine. Il y atteint un niveau d'érudition et de raffinement étonnant ; puis, il prend tout cela en horreur, laisse tout cela dans un coin, et se passionne pour le mélange de liqueurs alcoolisées ; il devient un véritable chef-compositeur en cette matière. Puis il en a marre, et décide alors de s'investir dans quelque autre pratique rare et précieuse. (En somme, il s'agit de des Esseintes, le héros du roman À Rebours de Huysmans).

Ces trois-là sont autant, comme tu le dis, “l'incapacité à se fixer sur quelque chose, le besoin constant de nouveauté”.
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Message Posté le: Sam Mar 05, 2011 23:21 pm    Sujet du message:
Citation:
L'homme a un genre d'être dans lequel il est mis devant lui-même et est découvert à lui-même en son pouvoir-être.

D'après-moi, c'est la notion la plus importante. La simple expression de ce postulat permet d'avantage la recherche/réflexion que des définitions.

Sinon, j'ai une question :
- Comment est décrite l'origine/la genèse de l'état d'âme angoisse (et autres) et du phénomène essentiel du pouvoir-être ?



CRITIQUE DES ATTITUDES PERÇUES

Je n'aime pas les gué-guerres de définition sur les mots clés inventés par un philosophe et pire : qu'on s'avance et se perde dans un "c'est le bien" ou "c'est le mal" ...
S'il y a une gène dans une notion centrale, il suffit de décrire de manière plus détaillée le phénomène et de repartir de cette description détaillée.
Il ne faut pas perdre du temps et des neurones à vouloir à tout prix coller aux bibles qu'on écrits les "grands philosophes" ... Surtout au prétexte de pouvoir être plus légitime : si vous faites cela vous serez justement MOINS légitimes car vous ne COMPRENEZ pas DE FAIT le contenu utile de l'écrit et ne vous attardez que sur les MOTS centraux sur lesquels le repliement des logiques de toute une œuvre/livre ne pourra JAMAIS coller correctement.

En résumé : plus de description des significations et moins de mots magiques.
(Mots que j'appèle souvent valeurs.)
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Message Posté le: Sam Mar 05, 2011 23:27 pm    Sujet du message:
Je trouve cette critique pertinente.

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