Ahmed
De passage


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Posté le: Dim Aoû 13, 2006 11:59 am Sujet du message: Rachida, le film
"C’est comme si en Algérie il n’existait pas
de sociologues,
d’historiens, de philosophes, de journalistes ou de penseurs pour nous
faire le bilan psychologique de ce drame qui a perduré plus de 10 ans !"
Présenté en Sélection Officielle,
Section Un Certain Regard au Festival de Cannes 2002
Il y a quelques années, à la suite de la projection du film Rachida,
j’avais posé cette question : « C’est comme si en Algérie il
n’existait pas de sociologues, d’historiens, de philosophes, de
journalistes ou de penseurs pour nous faire le bilan psychologique de ce drame
qui a perduré plus de 10 ans ! » Je suis heureux de voir qu’ils existent
et qu’ils vont se manifester en plus grand nombre tel que cet auteur que je
suis en train de lire Saïd Zahraoui, Entre
l’horreur et l’espoir dont je place un extrait sur le forum
approprié.
J’ai vu « Rachida », le film de Yamina Bachir. Elle était présente à la
fin de la projection pour une période de questions. J’en ai profité.
Pour ce qui est du film, en matière de cinéma, d’art si vous voulez, il
n’y a pas grand chose à dire, c’en est un de facture linéaire et
réaliste avec un minimum de contexte. Il focalise sur les fâcheuses
conséquences de la femme assujettie à des us et coutumes contrôlées par
une espèce d’hommes des cavernes du XXI siècle. Comme le dira une personne
dans la salle, ce n’est pas le genre de film qu’on regarde en Algérie
puisqu’il ne leur apprend rien de plus que ce qu’ils vivaient là-bas tous
les jours et savait déjà. Moi non plus il ne m’a rien appris. Par contre,
il touchera certainement la sensibilité d’étrangers non familiers de la
réalité algérienne. Dans ce sens, le film de Yamina Bachir, est un
témoignage culturel éclairant pour les civilisations aux mœurs évoluées.
Pour les gens du bled, il restera cependant un odieux souvenir (je parle comme
si le pire était passé) de l’Algérie démoniaque car ce ne sont pas les
SS ou les Américains qui ont perpétré ces horreurs ; ce sont des algériens
qui l’ont fait à d’autres algériens : femmes, enfants et vieillards !
J’ai donc posé ma question. « Quelle est la source de ces atrocités ? »
Dans la salle, une rumeur s’élève dont je ne comprends pas la
signification. Yamina Bachir : « Si j’avais la solution. . . » « Si je
savais. . . » « La barbarie n’est pas le lot de l’Algérie seule. . .
voyez le Kosovo, l’Irak, le 11 septembre. . . » Elle ne manque pas, ici,
d’exprimer son désaccord avec l’impérialisme américain et tente une
timide explication en attribuant, peut-être, cette sauvagerie algérienne à
un pattern que la colonisation française aurait pu retransmettre. . . Mais
sur l’origine du mal algérien à proprement parlé – rien. Elle confirme
le sentiment que j’ai eu en regarder le film ; ce n’est donc pas dû à
une question esthétique mais vraiment morale si elle n’a pas abordé la
genèse de ce mal ; ou est-ce une contrainte sociale ? C’est comme si en
Algérie il n’existait pas de sociologues, d’historiens, de philosophes,
de journalistes ou de penseurs pour nous faire le bilan psychologique de ce
drame qui a perduré plus de 10 ans !
J’ai dit minimum de contexte, je rajouterai -minimum d’explications ;
c’est presque suspect. Par exemple quand elle dépeint les protagonistes de
cette violence, elle nous montre des voyous, genre brigand, de type
occidental. Les gens comme moi savent toutefois que la violence qui a sévit
en Algérie était largement revendiquée par les partis islamistes et
largement réprimée, jusque dans la population qui servait d’otage, par
l’armée et les représentants du pouvoir. De cela, dans le film, que dalle
! Pas un seul barbu avec sa calotte et sa djellaba ; pas un seul militaire !
Dommage. Aussi, elle nous brosse le tableau d’un village dans les montagnes
où la barbarie les rattrape mais Rachida Bachir demeure
avare d’informations sur le système d’organisation, même le plus
rudimentaire, le conseil tribal ; comme si un maire, un garde champêtre,
l’ancien du village, ça n’existaient pas dans ce pays-là.
Mais c'est un des rares films algériens, réalisé par une algérienne, et
traitant d'un sujet délicat qui risque la mort. Pour ça, Mme Bachir mérite
qu'on l'assiste dans ses projets.
Ahmed
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