Souki
Modératrice

Sexe: 
Age: 38
Inscrit le: 05 Nov 2011
Messages: 3273
Localisation: Lyon
|
Posté le: Ven Jan 13, 2012 15:18 pm Sujet du message: De l’inutilité de ressasser des proops anti-mental, ego…
De l’inutilité de ressasser des propos
anti-mental, ego et désir.
Autant y aller franchement, puisque ce sujet ne trompera personne ; il est
essentiellement destiné à notre nouvel inscrit Beaudoin. D’ailleurs, je ne
souhaite pas ici m’attaquer à l’homme mais à ses idées, voire à sa
pratique. D’autre part, ce débat est ouvert à chacun, et pas forcément
dans une prise de position pour ou contre Beaudoin.
Commençons par le mental. Ce mot est revenu
bien souvent dans son discours mais sans jamais être défini. Je tenterai
donc moi-même une définition… Dans un système de pensée distinguant en
la psyché différentes instances
comme l’âme, l’Esprit et le mental, ce dernier est la part la plus
singulière, celle qui rattache l’âme et l’Esprit à un corps. C’est
donc une part à la fois personnelle et périssable de la « chose qui pense
», qui correspond plus ou moins au « moi » de la psychanalyse. C’est
l’idiosyncrasie, l’identité qui se forge historiquement, au fil de nos
aventures et autres mésaventures, l’instance qui calcule, qui veut pour
elle-même, pas pour les autres.
L’âme est quant à elle une part
presque toujours donnée comme immortelle, parfois particulière, parfois
universelle, en ce qu’elle serait un morceau de Dieu en chacun. Par
ailleurs, elle est définie comme étant la part de nous qui est capable
d’un amour inconditionnel ─ et donc forcément de pardon, de la
tolérance, ce qui explique que la recherche d’une concentration sur
l’âme soit donnée comme un moyen d’atteindre un état de paix
intérieure. Elle est parfois simplement donnée comme le principe
d’animation, soit la vie en elle-même, le souffle ou pneuma qui dynamise la matière.
L’Esprit est une notion que je
maîtrise moins, je dois bien l’avouer. Cette notion rejoint l’idée
d’une intelligence suprême, soit divine alors je le demande si on peut ou
non la rapprocher du logos grec. Le
mot « spiritualité » en découle, si ça vous cause, puisqu’il y est
question de dépasser les simples connaissances du mental pour accéder à un
autre type d’intelligence, essentiellement marquée par la synthèse et les
correspondances. En somme, la quête de l’Esprit est une quête de
compréhension intime du monde, pas forcément dicible mais en tout cas
harmonisante.
Donc, ceci étant posé, je vais tenter de vous expliquer pourquoi il me
semble inutile, voire aberrant, de rabâcher sans cesse des propos tels que «
c’est ton mental qui parle » ou autres. J’y glisserai aussi mes remarques
à propos du désir et de l’ego (qui, bien souvent, rejoindront le thème du
« mental »). Tout ceci prendra la forme d’une liste d’objections. Par
avance je préviens : je tenterai d’employer le langage le plus simple
possible mais la précision primera.
1. La répétition des paroles et/ou des actes
crée l’illusion. En somme, plus on ressasse un propos, plus on se
donne à soi-même l’illusion d’être quelque chose en particulier dans la
mesure où l’on s’enferme dans une représentation de soi-même
(c’est-à-dire un ethos). Or, et
c’est pour cela que j’emploie le terme d’illusion, pour quiconque tente
de rejoindre un principe éternel, cette personnalisation est une entrave
majeure dans la quête elle-même, les instances visées étant l’âme et
l’Esprit, qui bien sûr perdraient tout leur sens si elles se laissaient
enfermer dans une boîte, dans des propriétés, dans des particularités.
Quel que soit le propos, sa répétition fait de celui qui le profère «
celui qui dit x » et, ce faisant, l’éloigne de « Celui-qui-est ».
2. Nous sommes tous en chemin. Dès
lors, inutile de professer, d’évangéliser, puisque la source est à
portée de chacun et que ceux qui ne veulent pas y boire n’ont peut-être
pas (encore) la coupe adéquate pour y puiser. Dans tous les cas, il est très
présomptueux de se poser comme celui qui sait et qui vient dire aux autres
qu’ils vivent dans des illusions, alors que ce geste même laisse penser
qu’on ignore tout de la nécessité temporaire des illusions, de la douleur
d’un voile déchiré, de la douceur qu’il faut pour ouvrir des yeux. Dans
tous les cas, chacun a le choix en permanence et pourra se tourner, en temps
favorables, vers ce dont il a besoin. De plus, sachant que le chemin est long,
qui peut présumer de son avancement ? On ne sait jamais ce qu’il reste à
traverser.
3. L’absence de désir n’est souvent
qu’une illusion – ou une dépression. « La nature a horreur du
vide », comme disait Jean de la Croix… Alors, en chassant le désir de
ceci, on fait apparaître le désir de cela et qui peut bien inciter autrui à
se plonger dans des états aussi pénibles sans même en faire mention ?
C’est qu’en agitant sans cesse le mot d’illusion, le discours de
Beaudoin est marqué par une dévalorisation de ceux qu’il marque. Si ce
discours était efficace, il serait sournois malgré lui.
Je me contenterai de citer René Daumal :
Citation: | Je
suis mort parce que je n'ai pas le désir ;
Je n'ai pas le désir parce que je crois posséder ;
Je crois posséder parce que je n'essaie pas de donner ;
Essayant de donner, je vois que je n'ai rien ;
Voyant que je n'ai rien, j'essaie de me donner ;
Essayant de me donner, je vois que je ne suis rien ;
Voyant que je ne suis rien, j'essaie de devenir ;
Essayant de devenir, je vis. |
Laissons lever la pâte, il ne sert à rien de forcer.
4. Le mental assure la cohésion de l’être
temporel. J’aurais donc beaucoup de peine à croire que ceux qui le
critiquent, de préférence chez les autres, en soient dépourvus… Sans
parler des exemples que l’histoire nous a donnés ; dans la sphère
chrétienne, par exemple, il n’y a pas tant d’exemples d’êtres ayant
atteint un état de sainteté et la plupart du temps, ils y ont voué toute
leur existence et cela dans un contexte on ne peut plus favorable ! Bref, je
ne vois pas pourquoi certains se casseraient la tête à aller vivre dans le
désert, à passer leurs journées à prier, à faire des vœux de silence,
etc, si au final, n’importe qui peut en faire autant à moindre coût.
Peut-être que certains nous cachent des choses sur Genaisse mais je ne
m’attends pas, ici ou ailleurs, à croiser des êtres absolument lumineux
sans même m’en apercevoir, et encore moins des qui passent leur temps à
bloquer sur une idée, sans même parvenir à rédiger un message un temps
soit peu clair. Ça m’est arrivé une fois de croiser un mystique sur le net
; chacun de ses propos était lumineux d’une intelligence, sans outrage,
bien largement supérieure à celle de n’importe qui ici (moi y compris,
bien sûr). Peu de mots, des mots simples et pourtant d’une profondeur
abyssale, des mots d’un poids incroyable. Bref, si nous avons chacun un
mental si puissant, c’est aussi parce que nous en avons besoin.
D’ailleurs, je ne vois pas comment on pourrait se débarrasser du mental
sans avoir épuisé ses possibilités.
J’arrête ici, c’est déjà très long.
Dernière édition par Souki le Ven Jan 13, 2012 15:25 pm; édité 1 fois
|