Invité
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Posté le: Mer Avr 13, 2011 20:06 pm Sujet du message:
Allez... à mon tour. Ayant hérité d'une pensée fataliste mais ayant quand
même ingurgité d'autres choses, ça risque d'être funky...
Vouloir vaincre, voilà un objectif qui peut être tout à fait stupide ou au
contraire extrêmement intéressant. La première question à se poser, c'est
: vaincre quoi ? pourquoi ?
Les lectures les plus littérales du Coran comprennent le Jihad comme une
guerre externe, et c'est par cette
lecture que l'Islam devient l'islamisme. Les lectures spirituelles accordent
elles aussi une part importante au Jihad mais elles en font une guerre interne, contre ses propres démons et
en cela elles favorisent l'introspection et la bonne entente entre les êtres.
Ainsi, selon l'objet et l'orientation de la guerre, on passe de la bêtise au
génie...
Quoi qu'il en soit, dans tous les cas, le problème du combat se pose toujours
ainsi - et c'est déjà un pas vers la victoire que de prendre l'habitude de
se poser ces questions dès que l'on entame un "combat" :
- un projet
- un obstacle
- des remèdes (= des affrontements).
La première chose à faire, c'est de bien
cerner le projet. Pourquoi lutter ? Ou plutôt pour quoi lutter ? En d'autres termes : à quel résultat
veut-on parvenir ?
Il peut être pertinent de s'imaginer l'échec ; une situation de souffrance,
d'injustice, de malaise a beau être positive par effet de compensation,
parfois ça représente pour nous un état insupportable. On se situe là dans
un système d'opposition, de dualité quelque peu manichéen. Il faut donc
parfois se faire peur, utiliser la peur en se projetant dans la situation
d'échec. «Si je perds, alors...» C'est encore la manière la plus
performante d'utiliser cette dualité et de canaliser la peur ; ainsi, cette
limitation qui consiste à ne percevoir qu'une seule face des évènements
devient le soufre des alchimistes, c'est-à-dire la pression de l'intérieur
qui crée le désir et par lui, l'action.
Si le système duel a été dépassé, ou si dans un cas particulier l'une et
l'autre possibilité semblent indifférentes, cf le problème n°1 des
mystiques : l'acédie. C'est une sorte de paresse qui résulte de la
perception de la perfection du monde. A trop voir que tout s'équilibre, on en
devient inactif, comme la tortue, trop stable.
(pour ceux qui ont vu Batman - The Dark
Knight, c'est l'idée que véhicule le Joker : si tu fais le mal,
quelque chose de bon résultera spontanément par réaction, si tu fais le
bien, idem. Donc faire le bien suscitera le mal et vice versa... Idem pour la
souffrance ; si tu en baves, tu développeras des renforts qui seront de
nouvelles armes et te grandiront -> compensation -> «Ce qui ne me tue
pas me rend plus fort.»)
Pour lutter contre l'acédie, il faut s'en remettre à ce que Nietzsche
appelle l'amor fati, soit l'amour du
destin. Il faut en revenir à une vision individualiste et égoïste du monde,
retrouver son Diable, cette force centrifuge qui nous anime, la nuit venue.
Sans cela, dans l'un ou l'autre cas, on n'aura aucune motivation et la
"guerre" restera une divagation, un avenir rêvé, sans cesse repoussé ou
bien commencé et abandonné aussi tôt. ce sont donc des solutions apportées
pour parvenir à créer une urgence que je viens d'avancer.
Une fois l'obstacle bien cerné, la motivation trouvée, on peut alors passer
à l'action. Il faut bien distinguer le sujet, l'objet et le verbe ; qui fait
quoi à quoi ? Qui agit ? (le sujet) Sur quoi
? (l'objet) Comment ? (le verbe)
L'erreur la plus courante est de croire que l'objet est quelque chose alors
que le véritable objet est soi. cela dit, toute action change le sujet en
même temps qu'il change l'objet... Ainsi le parent veut-il changer son enfant
pour que celui-ci devienne ce que lui-même n'est pas parvenu à devenir alors
qu'en fait, ce qu'il veut, c'est devenir lui-même x ou y ou achever son deuil
vis-à-vis d'un rêve. ERREUR GROSSIÈRE. S'il y parvient, il peut devenir un
gros con. son rêve sera réalisé par un autre mais entre temps, il sera
devenu un parent autoritaire. C'est en
forgeant que l'on devient forgeron... Alors mieux vaut ne vaut pas
devenir un forgeron véreux... On retrouve le problème des guerres
internes/externes.
Autre point ; agir sur l'intérieur aura des répercussions sur l'extérieur,
puisque nos actes postérieurs au changement (ou le changement lui-même)
seront vus, ils altèreront notre comportement après... et vice versa. Un
acte orienté vers l'extérieur aura sa répercussion à l'intérieur. Dès
que l'on fait quelque chose, on change le monde et l'on se change soi-même.
Il faut le prendre en compte sans oublier que l'on est maître des causes que l'on produit, pas de leurs
conséquences (et pourtant, on en sera responsable !...).
Enfin, pour revenir à l'acte lui-même... Il faut bien analyser le domaine
dans lequel on veut agir. Avoir une vaste culture dans le domaine dans lequel
on veut s'exercer ainsi que dans des domaines connexes est d'une utilité
extrême. Ainsi, il faut savoir identifier des catégories ; si on veut
résoudre un problème ayant trait à des personnes, la psychologie apporte
des solutions. Si l'on veut résoudre un problème ayant trait à la santé,
il faut connaître le corps... Etc. Ne pas hésiter à lire des manuels et des
essais, donc. Ça se travaille en permanence, pour être prêt à n'importe
quel moment.
L'information n'est pas que théorique, elle est aussi liée à l'observation
des faits. Il faut donc aussi bien analyser les fais, observer avec attention,
disposer de sources fiables et faire acte de lucidité. Ceci implique donc de
mettre ses aspirations de côté et d'être aussi ouvert que possible. Si
l'information était un vin, on pourrait dire que parfois, la défaillance est
du côté de la coupe... Pareil, ça se travaille tout le temps.
Enfin, les émotions... La peur, notamment. Une qualité a été citée
plusieurs fois, c'est la persévérance. Celle-ci tient à deux choses : le
courage d'une part, et ce n'est pas la témérité, et d'autre part la
motivation (cf début de mon post). Les émotions sont des informations
brutes, alors il ne faut pas chercher à les évincer car ce serait se priver
de données importantes. Mieux vaut savoir les gérer ; apprendre à pleurer,
à se maintenir dans un état de bien-être ou de mal-être suffisant.
L'équilibre est difficile à trouver ; il faut être assez bien pour pouvoir
agir posément mais il faut souffrir assez pour avoir une authentique envie de
vaincre. Veiller à maintenir son corps dans un état correct est essentiel
pour toute entreprise (sommeil, activité, alimentation, pas d'addictions,
...) mais il ne faut jamais oublier d'où on
vient et où on va.
Je pense au Labyrinthe de Pan ; la
petite Ofelia doit traverser la salle du banquet sans rien manger. Ulysse a le
même problème avec les sirènes ; il les entend mais il se rend impotent
pour un temps, laissant les marins sourds gérer le bateau ! Essentiel :
trouver en soi son Ulysse et le dissocier des marins, qui sont juste les
facultés, les bras de l'esprit, les forces agissantes. Quoi qu'il arrive, il
faut garder le cap, en ressentant les émotions, les tentations mais en
sachant, parfois, ne pas les prendre en compte.
Je pense que j'ai été assez longue... Désolée. J'espère que ça te sera
utile.
J'ajoute juste ceci... Au fond, quelle que
soit l'issue, l'important est-il d'arriver quelque part ou d'avoir parcouru le
chemin ?
Dernière édition par Invité le Mer Avr 13, 2011 21:36 pm; édité 5 fois
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