Invité
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Posté le: Dim Mar 21, 2010 21:05 pm Sujet du message: Ligaments tressés.
Ecriture automatique.
La bouche s'ouvrait comme une immense caverne dégueulasse. Des flots de sons
mi-articulés s'en échappaient de façon presque liquide, des sons plus ou
moins gutturaux, plus ou moins abstraits qui devaient certainement former des
mots, au fond. Mais il n'y avait pas de pause, pas de répit pour permettre de
distinguer les syllabes, recouper les sons, c'étit un flot continu de mouches
mortes et de borborygmes putréfiés. Quelques fantasmes de poésie faisaient
peut-être aussi partie du voyage, c'était difficile à dire, mais oui,
c'était possible, quelques rimes croisées, quelques alexandrins et
métaphores filées sommeillaient peut-être au creux d'un de ces crocs
noircis, autrefois ocres, ou s'y accrochaient peut-être avec l'énergie du
désespoir.
Assis en face, je recevais le flot ininterrompu d'horreur en plein visage,
essayant de me concentrer sur les occasionneles et pour tout dire inespérées
taches de lumière, étoiles de couleur qui vrillaient le flot de paroles, le
lacéraient délicatement comme des lames de rasoir, avant de s'échouer
contre mon oeil ensanglanté, cicatrisé, muet de stupéfaction et de peine,
je crois. Cela faisait déjà/bientôt une demie-heure que le flot ne
tarissait pas, et je savais d'expérience que la réserve était quasi
inépuisable. Le coffre qui l'alimentait était une sorte/parodie de tonneau
des danaïdes, résevoir de mouches mortes et autres volatiles, nuisibles. De
temps en temps, un mot s'échappait et se distinguait. Je crus saisir un
"raté", et entendis distinctement le mot "avenir" à plusieurs reprises. Mais
j'avais vite abandonné, irrité par ces mouches que sa bouche infecte
vomissait, et qui venaient me titiller les narines de leurs vrombrissements
forcenés. Je crois que c'était ma propre bouche qu'elles cherchaient, mais
je n'en suis pas sûr. A ma droite, ma fiancée se tenait coite, figure
penaude et craintive, fantôme névrosé et cruel qui tempestait, tempestait,
toute sa petite vie. Elle n'écoutait pas plus que moi les vociférations
anéanties de la Chose, parce que la Chose ne désirait pas être entendue, de
toutes façons. A la gauche de la Chose, Mère faisait grise mine, se cognant
la tête contre le mur de salive à intervalles réguliers, la tête plus ou
moins aspirée par le mur, qui lui soupirait, mélancolique, le mur, il
soupirait contre nous, tout contre nous, le teint pâle, l'air quand même
auguste, le front bombé comme le Cid, les mains longues, élancées, les
doigts comme des tiges, enlaçant Mère, du cou jusqu'aux genoux, les doigts
s'étiraient, leurs jointures de plâtre écarlates. Nous trois nous
balançions au rythme des mouches et de leur vol bas et lourd, à des lieux
d'un ballet.
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Lyriss
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Posté le: Dim Mar 21, 2010 21:10 pm Sujet du message:
Qu'appel-tu écriture automatique ?
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Invité
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Posté le: Dim Mar 21, 2010 21:31 pm Sujet du message:
Citation: | "C'est au terme d’une quête sur la nature de l’inspiration
poétique qu’André Breton imagina cette technique consistant à écrire le
plus rapidement possible, sans contrôle de la raison, sans préoccupations
esthétique ou morale, voire sans aucun souci de cohérence grammaticale ou de
respect du vocabulaire. L’état nécessaire à la bonne réalisation est un
état de lâcher-prise, entre le sommeil et le réveil (proche d’un état
hypnotique)." |
Ce texte ne veut rien dire. Ecrit d'un jet. Finalement, seuls des sentiments
sont dégagés de ce maëlstrom dégueulasse. La tristesse et la profusion de
mots que je ne maîtrise pas, des phrases, des idées, des sentiments, qui se
tressent sans rationnel.
J'ai posté ça sans but.
Aussi pour savoir le sentiment qui ressortait de ce texte via votre lecture.
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Lyriss
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Posté le: Lun Mar 22, 2010 13:43 pm Sujet du message:
Je ne crois pas une seconde que ce texte ai été écrit dans les conditions
sus cités, et je crois encore moins que s'il l'avait été il aurait pu
présenter le moindre intérêt.
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Invité
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Posté le: Lun Mar 22, 2010 14:08 pm Sujet du message:
Tu as tort, Lyriss.
Tu n'as pas lu les surréalistes ?
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Lyriss
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Posté le: Lun Mar 22, 2010 14:49 pm Sujet du message:
je ne lis pas …
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Invité
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Posté le: Lun Mar 22, 2010 17:24 pm Sujet du message:
Tant pis, Baby.
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Copekaa
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Posté le: Mar Mar 23, 2010 04:52 am Sujet du message:
J'ai beaucoup aimé.
C'est sombre mais l'ecriture donne une impression fluide et heurtée a la
fois, très interessant.
Moi, ça me donne une impression de malaise et de légéreté, mais c'est un
ressenti personnel, ça ne vaut rien.
(Lyriss...que c'est triste)
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Monsieur Patate
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Posté le: Mar Mar 23, 2010 11:33 am Sujet du message:
C'est de la poésie ?
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Lyriss
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Posté le: Mar Mar 23, 2010 14:03 pm Sujet du message:
J'ai du mal a concevoir qu'on puisse écrire un texte sans conceptualiser
aucune trame narratrice, même simpliste.
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oeildenuit
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Posté le: Mar Mar 23, 2010 14:41 pm Sujet du message:
C'est pourtant très possible. Preuve en est.
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La Bête
Silver Mercure
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Posté le: Mar Mar 23, 2010 15:00 pm Sujet du message:
Lyriss a
écrit: | J'ai du mal a concevoir
qu'on puisse écrire un texte sans conceptualiser aucune trame narratrice,
même simpliste. |
y'en a même qui voudraient croire qu'ils savent le faire et qui n'en sont pas
foutus.
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Lyriss
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Posté le: Mar Mar 23, 2010 16:19 pm Sujet du message:
Oui, moi je sais que je ne pourrais pas, je vois pas comment déconnecter la
propension de mon esprit a rationaliser et a rendre cohérent tout ce que je
vois, entend ou fais.
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La Bête
Silver Mercure
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Posté le: Mar Mar 23, 2010 17:15 pm Sujet du message:
non, je voulais dire que ceux qui voulaient donner un semblant de cohérence
narrative à leurs écrits en étaient souvent incapables, et que ce n'est
donc pas si inconcevable dans le cas de quelqu'un qui n'y a prêté aucune
attention.
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Lyriss
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Posté le: Jeu Mar 25, 2010 17:34 pm Sujet du message:
Catilinaire a
écrit: | "C'est au terme d’une
quête sur la nature de l’inspiration poétique qu’André Breton imagina
cette technique consistant à écrire le plus rapidement possible, sans
contrôle de la raison, sans préoccupations esthétique ou morale, voire sans
aucun souci de cohérence grammaticale ou de respect du vocabulaire. L’état
nécessaire à la bonne réalisation est un état de lâcher-prise, entre le
sommeil et le réveil (proche d’un état
hypnotique)." |
Si il n'y a ni raison, ni recherche esthétique, ni préoccupation morale, ni
cohérence grammatical et pas de respect du vocabulaire, dis moi en quoi
l'écrivain dans cet état diffère d'un programme informatique qui
balancerait des mots au hasard ?
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Invité
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Posté le: Jeu Mar 25, 2010 17:39 pm Sujet du message:
Un ordinateur n'a pas d'inconscient.
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Lyriss
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Posté le: Jeu Mar 25, 2010 17:43 pm Sujet du message:
Peut-être, mais la forme serait identique. C'est un peu comme peindre un
tableau tout en bleu, que tu le fasse au pinceau ou au pulvérisateur, ca
revient au même.
Et puis franchement, concevoir un texte qui ne serait le fruit que de l'unique
inconscient me paraît un peu utopique.
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Invité
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Posté le: Jeu Mar 25, 2010 17:46 pm Sujet du message:
Bien sûr que c'est utopique. Après, il est évident aussi que l'écriture
automatique a donné de belles choses, et que ce n'était pas toujours
pleinement conscient chez l'écrivain.
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Mara Caldera
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Posté le: Jeu Mar 25, 2010 17:47 pm Sujet du message:
LuxLisbon a
écrit: | Un ordinateur n'a pas
d'inconscient. |
Ca viendra
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Lyriss
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Posté le: Jeu Mar 25, 2010 17:50 pm Sujet du message:
LuxLisbon a
écrit: | Bien sûr que c'est
utopique. Après, il est évident aussi que l'écriture automatique a donné
de belles choses, et que ce n'était pas toujours pleinement conscient chez
l'écrivain. |
A la foi c'est dans la nature de l'art de ne jamais être pleinement conscient
dans l'esprit de l'artiste. J'ai toujours comparé l'artiste a un ouvrier
pantin, en revanche je n'ai aucune idée en ce qui concerne l'identité du
maitre chorégraphe.
La plupart du temps l'artiste ne sais même pas pourquoi il fait tout mieux
que les autres.
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