Que pensez-vous de Prévert ?


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alcibiade
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Message Posté le: Sam Oct 11, 2008 12:00 pm    Sujet du message: Que pensez-vous de Prévert ?
Prévert est un des poètes du 20ème siècle qui a eu le plus de succès, et l'on l'étudie à l'école. Je ne suis pourtant pas convaincu, après lecture complète de ses oeuvres, de son talent. Pensez-vous que c'est un grand poète, et pourquoi ?
VACVVS
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Message Posté le: Sam Oct 11, 2008 13:14 pm    Sujet du message: Re: Que pensez-vous de Prévert ?
alcibiade a écrit:
et l'on l'étudie à l'école


Prévert au moins n'écrirait pas de manière si cacophnique. Il savait mettre de l'esprit dans ses dialogues; ses jeux de mots étaient souvent bons. Il avait un côté rebelle qui plaisait. Aussi, le faire étudier lui fait-il perdre une grande partie de son charme.
alcibiade
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Message Posté le: Sam Oct 11, 2008 19:31 pm    Sujet du message:
Pour donner mon avis, je ne suis pas sur que le rôle d'un poête soit de faire des jeux de mots en jouant au rebelle.

Dieu sait que je bouffe volontiers ses curés, mais l'anticléricalisme primaire de Prévert me ferait presque entrer au séminaire. Sa critique de la philosophie(c'est compliqué donc c'est pas bien Rolling Eyes ) est pathétique et ne mène à rien. Quant à son style bourré de répétitions, ça donne le mal de mer, et je ne parle pas du vocabulaire et des tournures qu'il utilisait pour faire "homme du peuple", hypocrisie sans nom quand on sait qu'il est né à Neuilly.

Ouf ça fait du bien.
oeildenuit
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Message Posté le: Dim Oct 12, 2008 18:06 pm    Sujet du message:
Poétiquement, je le trouve pas excellent.
Mais il a fait quelques bonne choses.

Je préfère Brassens.
djal
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Message Posté le: Dim Oct 12, 2008 22:44 pm    Sujet du message:
alcibiade a écrit:
Pour donner mon avis, je ne suis pas sur que le rôle d'un poête soit de faire des jeux de mots en jouant au rebelle.

Dieu sait que je bouffe volontiers ses curés, mais l'anticléricalisme primaire de Prévert me ferait presque entrer au séminaire. Sa critique de la philosophie(c'est compliqué donc c'est pas bien Rolling Eyes ) est pathétique et ne mène à rien. Quant à son style bourré de répétitions, ça donne le mal de mer, et je ne parle pas du vocabulaire et des tournures qu'il utilisait pour faire "homme du peuple", hypocrisie sans nom quand on sait qu'il est né à Neuilly.

Ouf ça fait du bien.


J'ai lu quelques poèmes de Prévert et je ne comprends pas ton point de vue sur "son oeuvre". Prévert, avec son style, a rapproché, et ce peut-être plus que d'autres, la poésie avec une certaine oralité. La parole. Et cette autre musicalité du vers libre. Il fait partie des poètes qui ont fait évoluer la poésie.
oeildenuit
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Message Posté le: Dim Oct 12, 2008 22:48 pm    Sujet du message:
Le problème est : dans quelle direction.

Brassens a orienté la poèsie vers l'oralité, bien plus que prévert.
djal
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Message Posté le: Dim Oct 12, 2008 23:06 pm    Sujet du message:
Considérer un auteur hors de son histoire ne doit pas simplifier les choses pour avoir un point de vue sur son oeuvre. Libre à toi d'apporter des précisions, le sommeil me gagne Wink
alcibiade
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Message Posté le: Lun Oct 13, 2008 18:33 pm    Sujet du message:
Je l'ai déjà dit, je ne crois pas que l'art évolue. Il connait divers courants, que ce soit en poésie, en peinture, ou dans d'autres domaine, mais il n'y a pas évolution au sens propre du terme. Prévert a surement influencé la poésie, par contre. Il s'oriente vers l'oralité en effet, mais dépourvue de règles, or la poésie, c'est avant tout des pensées exprimées dans un cadre soumis à des règles. En le lisant, j'ai plus l'impression d'une discussion de bistrot, pas très rigoureuse question syntaxe, et ne traitant pas de grands thèmes en profondeur.
ggttinho
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Message Posté le: Lun Oct 13, 2008 18:47 pm    Sujet du message:
Ce que tu veux dire c'est qu'il n'y a pas de progrès, peut-être. Car je pense indubitable qu'il y ait évolution...
alcibiade
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Message Posté le: Lun Oct 13, 2008 18:54 pm    Sujet du message:
Evolution dans le sens de transformation, pas dans celui de progrès, ok.
djal
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Message Posté le: Mar Oct 14, 2008 22:07 pm    Sujet du message:
Je me permet de déposer brièvement ici ce poème de Prévert qui clot le recueil "Paroles", pour les lecteurs désireux de le lire.

Tous les yeux d'une femme joués sur le même tableau
Les traits de l'être aimé traqué par le destin sous la fleur
immobile d'un sordide papier peint
L'herbe blanche du meurtre dans une forêt de chaises
Un mendiant de carton éventré sur une table de marbre
Les cendres d'un cigare sur le quai d'une gare
Le portrait d'un portrait
Le mystère d'un enfant
La splendeur indéniable d'un buffet de cuisine
La beauté immédiate d'un chiffon dans le vent
La folle terreur du piège dans un regard d'oiseau
L'absurde hennissement d'un cheval décousu
La musique impossible des mules à grelots
Le taureau mis à mort couronné de chapeaux
La jambe jamais pareille d'une rousse endormie
et la très grande oreille de ses moindres soucis
Le mouvement perpétuel attrapé à la main
L'immense statue de pierre d'un grain de sel marin
La joie de chaque jour et l'incertitude de mourir et le fer
de l'amour dans la plaie d'un sourire
La plus lointaine étoile du plus humble des chiens
Et salé sur une vitre le tendre goût du pain
La ligne de chance perdue et retrouvée brisée et redressée
parée des haillons bleus de la nécessité
L'étourdissante apparition d'un raisin de Malaga sur un
gâteau de riz
Un homme dans un bouge assommant à coups de rouge
le mal du pays
Et la lueur aveuglante d'un paquet de bougies
Une fenêtre sur la mer ouverte comme une huître
Le sabot d'un cheval le pied nu d'une ombrelle
La grâce incomparable d'une tourterelle toute seule
dans une maison très froide
Le poids mort d'une pendule et ses moments perdus
Le soleil somnambule qui réveille en sursaut au milieu
de la nuit la Beauté somneolente et soudain éblouie
qui jette sur ses épaules le manteau de la cheminée
et l'entraîne avec lui dans le noir de fumée masquée
de blanc d'Espagne et vêtue de papiers collés
Et tant de choses encore
Une guitare de bois vert berçant l'enfance de l'art
Un ticket de chemin de fer avec tous ses bagages
La main qui dépayse un visage qui dévisage un paysage
L'écureuil caressant d'une fille neuve et nue
Splendide souriante heureuse et impudique
Surgissant à l'improviste d'un casier à bouteilles ou d'un
casier à musique comme une panoplie de plantes vertes
vivaces et phalliques
Surgissant à l'improviste du tronc pourrissant
D'un palmier académique nostalgique et désespérément
vieux beau comme l'antique
Et les cloches à melon du matin brisées par le cri d'un journal du soir
Les terrifiantes pinces d'un crabe émergeant des dessous d'un panier
La dernière fleur d'un arbre avec les deux gouttes d'eau du condamné
Et la mariée trop belle seule et abandonnée sur le divan
cramoisi de la jalousie par la blême frayeur de ses premiers maris
Et puis dans un jardin d'hiver sur le dossier d'un trône
une chatte en émoi et la moustache de sa queue sous
les narines d'un roi
La chaux vive d'un regard dans le visage de pierre
d'une vieille femme assise près d'un panier d'osier
Et crispées sur le minium tout frais du garde-fou d'un
phare tout blanc les deux mains bleues de froid d'un
Arlequin errant qui regarde la mer et ses grands
chevaux dormant dans le soleil couchant et puis qui
se réveillent les naseaux écumants les yeux phosphorescents
affolés par la lueur du phare et ses
épouvantables feux tournants
Et l'alouette toute rôtie dans la bouche d'un mendiant
Une jeune infirme folle dans un jardin public souriant
d'un sourire déchiré mécanique en berçant dans ses
bras un enfant léthargique trace dans la poussière
de son pied sale et nu la silhouette du père et ses
profils perdus et présente aux passants son nouveau-né
en loques Regardez donc mon beau regardez donc
ma belle ma merveille des merveilles mon enfant
naturel d'un côté c'est un garçon et de l'autre c'est
une fille tous les matins il pleure mais tous les soirs
je la console et je les remonte comme une pendule
Et aussi le gardin du square fasciné par le crépuscule
La vie d'une araignée suspendue à un fil
L'insomnie d'une poupée au balancier cassé et ses
grands yeux ouverts à tout jamais
La mort d'un cheval blanc la jeunesse d'un moineau
La porte d'une école rue du Pont-de-Lodi
Et les Grands Augustins empalés sur la grille d'une
maison dans une petite rue dont ils portent le nom
Tous les pêcheurs d'Antibes autour d'un seul poisson
La violence d'un oeuf la détresse d'un soldat
La présence obsédante d'une clef cachée sous un paillasson
Et la ligne de mire et la ligne de mort dans la mains autoritaire
et potelée d'un simulacre d'homme obèse et délirant
camouflant soigneusement derrière les bannières exemplaires
et les crucifix gammés drapés et dressés spectaculairement
sur le grand balcon mortuaire du musée des horreurs
et des honneurs de la guerre la ridicule statue vivante de ses petites
jambes courtes et de son buste long mais ne parvenant
pas malgré son beau sourire de Caudillo grandiose
et magnanime à cacher ses irrémédiables et pitoyables
signes de la peur de l'ennui de la haine
et de la connerie gravés sur son masque de viande
fauve et blême comme les graffiti obscènes de la
mégalomanie gravés par les lamentables tortionnaires
de l'ordre nouveau dans les urinoirs de la nuit.
Et derrière lui dans le charnier d'une valise diplomatique
entrouverte le cadavre tout simple d'un paysan pauvre
assailli dans son champs à coups de lingots d'or
par d'impeccables hommes d'argent
Et tout à côté sur une table une grenade ouverte avec
toute une vie dedans
Et toute la douleur de cette ville rasée et saignée à blanc
Et toute la garde civile caracolant tout autour d'une civière
Où rêve encore un gitan mort
Et toute la colère d'un peuple amoureux travailleur
insouciant et charmant qui soudain éclate brusquement
comme le cri rouge d'un coq égorgé publiquement
Et le spectre solaire des hommes aux bas salaires
qui surgit tout sanglant des sanglantes entrailles d'une
maison ouvrière tenant à bout de bras la pauvre
lueur de la misère la lampe sanglante de Guernica
et découvre au grand jour de sa lumière crue et
vraie les épouvantables fausses teintes d'un monde
décoloré usé jusqu'à la corde vidé jusqu'à la moelle
D'un monde mort sur pied
D'un monde condamné
Et déjà oublié
Noyé carbonisé aux mille feux de l'eau courante du
ruisseau populaire
Où le sang populaire court inlassablement
Intarissablement
Dans les artères et dans les veines de la terre et dans
les artères et dans les veines de ses véritables enfants
Et le visage de n'importe lequel de ses enfants dessiné
simplement sur une feuille de papier blanc
Le visage d'André Breton le visage de Paul Eluard
Le visage d'un charretier aperçu dans la rue
La lueur du clin d'oeil d'un marchand de mouron
Le sourire épanoui d'un sculpteur de marrons
Et sculpté dans le plâtre un mouton de plâtre frisé bêlant
de vérité dans la main d'un berger de plâtre debout
près d'un fer à repasser
À côté d'une boîte de cigares vide
À côté d'un crayon oublié
À côté des Métamorphoses d'Ovide
À côté d'un lacet de soulier
À côté d'un fauteuil aux jambes coupées par la fatique des années
À côté d'un bouton de porte
À côté d'une nature morte où les rêves enfantins d'une
femme de ménage agonisent sur la pierre froide
d'un évier comme des poissons suffoquant et crevant
sur des galets brûlants
Et la maison remuée de fond en comble par les pauvres
cris de poisson mort de la femme de ménage désespérée
tout à coup qui fait naufrage soulevée par les lames de fond
du parquet et va s'échouer lamentablement
sur les bords de la Seine dans les jardins du Vert-galant
Et là désemparée elle s'assoit sur le banc
Et elle fait ses comptes
Et elle ne se voit pas blanche pourrie par les souvenirs et
fauchée comme les blés
Une seule pièce lui reste une chambre à coucher
Et comme elle va la jouer à pile ou face avec le vain
espoir de gagner un peu de temps
Un grand orage éclate dans la glace à trois faces
Avec toutes les flammes de la joie de vivre
Tous les éclairs de la chaleur animale
Toutes les lueurs de la bonne humeur
Et donnant le coup de grâce à la maison désorientée
Incendie les rideaux de la chambre à coucher
Et roulant en boule de feu les draps au pied du lit
Découvre en souriant devant le monde entier
Le puzzle de l'amour avec tous ses morceaux
Tous ses morceaux choisis par Picasso
Un amant sa maîtresse et ses jambes à son cou
Et les yeux sur les fesses les mains un peu partout
Les pieds levés au ciel et les seins sens dessus dessous
Les deux corps enlacés échangés caressés
L'amour décapité délivré et ravi
La tête abandonnée roulant sur le tapis
Les idées délaissées oubliées égarées
Mises hors d'état de nuire par la joie et le plaisir
Les idées en colère bafouées par l'amour en couleur
Les idées terrées et atterrées comme les pauvres rats
de la mort sentant venir le bouleversant naufrage de l'Amour
Les idées remises à leur place à la porte de la chambre
à côté du pain à côté des souliers
Les idées calcinées escamotées volatisées désidéalisées
Les idées pétrifiées devant la merveilleuse indifférence
d'un monde passionné
D'un monde retrouvé
D'un monde indiscutable et inexpliqué
D'un monde sans savoir-vivre mais plein de joie de vivre
D'un monde sobre et ivre
D'un monde triste et gai
Tendre et cruel
Réel et surréel
Terrifiant et marrant
Nocturne et diurne
Solite et insolite
Beau comme tout.

Lanterne magique de Picasso, Jacques Prévert, 1944
Silver Mercure
Habitué(e)




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Message Posté le: Mar Oct 14, 2008 23:09 pm    Sujet du message:
il a fait des choses lisibles, mais un peu rares, beaucoup de chose trop simples (ce serait voulu ? soit, mais c'est parfois trop, pour certains de ses poèmes s'il les avait posté ici pour demander vos avis, vous l'auriez envoyé paître)

mais pour initier les enfants aux poèmes, moi j'ai été ravie d'illustrer mon cahier et de relever les rimes (quand il y en avait) et les figures de style simples quand j'étais en primaire.

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