zouaidi faycal
Petit nouveau
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Posté le: Ven Mar 07, 2008 12:28 pm Sujet du message: Le départ
Le départ
Nouvelle de Fayçal Mohamed ZOUAYDI (Tunisie)
Traduit de l’Arabe par Saïd Mohamed JENDOUBI (Tunisie /France)
O ! Gens patients devant la détresse, mes espérances se sont resserrées
avec l’age et, mon âme a éprouvé la douleur des drames…
Du Sud, le voyage fut entrepris un jour… ce jour-là il faisait froid…
mais une flamme me brûlait le visage. Des vents mêlés s’amusaient de mes
fragments dispersés. Ma mère se tient debout sur le seuil de la porte, à la
main un pot d’eau, s’apprêtant à le déverser sur mes pas, pour que je
lui revienne. Dans ses yeux brille une eau encore… elle ne dit rien, mais
ses lèvres produisaient des chuchotements indistincts. Je soupçonnai des
prières pour la sauvegarde et le retour… mon petit frère se tient à ses
côtés avec sa chemise tombante et, le doigt caressant le nez ; il nous
regarde étrangement… c’est qu’il ne sait pas encore le sens du
départ… ma sœur se tient à la fenêtre en bois peint en bleu, tout en
jetant de temps à autre un regard inquiet à l’intérieur de la chambre
où, mon père malade est alité. Une maladie l’avait assailli, pour ne plus
le quitter ; il en est maintenant impotent. Il y a deux jours son état
s’est amélioré, alors je l’informai de l’imminence de mon départ ; il
n’a rien dit, mais je sentis dans son terrible silence une supplication pour
que je reste… de ses yeux aux paupières lasses, retentit un cri tremblant
me suppliant de ne point partir… Mais que faire, alors que l’opportunité
d’un tel voyage ne me fut accordée qu’avec peine, et qu’une seconde
chance ne se représentera, peut-être, plus jamais ? Obtenir un visa pour le
pays où je vais n’est jamais une mince affaire… le flot du sang trébuche
dans mes artères, je ressens alors que la disparition de la terre avec tous
ses habitants n’est point la plus terrible des catastrophes…
Le vrombissement du moteur de la voiture stationnée devant notre maison
grandit quand le conducteur appuya sur l’accélérateur pour me brusquer ;
la portière du véhicule était grand ouverte m'invitant à une nouvelle
vie… une vie dont les contours furent tracés par les rêves et les
chimères… là-bas, au bout d’une longue traversées vers le pays des
blonds visages, de l’argent profus et des félicités. D’une maison
voisine, une porte s’ouvre laissant apparaître une jeune fille dont nos
deux familles arrangèrent naguère notre future union. À vrai dire, cette
fille – ma cousine – n’était pas laide pour que je la refuse comme
épouse ; elle était même dotée d’un certain charme, surtout
lorsqu’elle esquissait un sourire naïf, semblable à celui de son père
Tayeb. En revanche, je refusais cette relation qui me liait à la vie de
misère, ici. Ma mère s’essuie le nez avec un pan de sa robe et, je
remarque que ma sœur n’est plus à la fenêtre. Respirer normalement me
devient une opération difficile. Me parviennent à l’esprit les paroles de
mon père m’exhortant que je suis, après lui, l’homme de la maison ; à
ces mots j’avais l’habitude de répondre par la prière d’usage : «
puise Dieu allonger ta vie ! », et mon père de rétorquer : « qu’elle
soit longue ou courte, la vie d’un homme s’achève inéluctablement par un
enterrement ! ». Les images se brouillèrent dans mon esprit : de l’enfant
brun s’amusant à l’orée du désert, aux blonds visages dans les
contrées enneigé… les couleurs s’entremêlèrent dans une singulière
fusion. Je perds les mots que j’aurais pu dire dans de telles circonstances.
Je ne trouve rien à dire, alors, je me réfugie dans le silence. L’instant,
le temps n’a plus qu’un seul et unique sens, différent de celui
qu’affectionnent les horlogers… je crains une imminente explosion au fond
de mon être, je jette ma valise sur le siège arrière et, je m’apprête à
me jeter à l’intérieur du véhicule, mais…
Un pot d’eau choit par terre. Mon petit enfant fit tomber le verre qu’il
tenait… exactement comme tomba, ce jour-là, le vase d’eau des mains de ma
mère, quand retentit de la fenêtre en bois teint en bleu, l’âpre cri de
ma sœur, annonçant le pire…
Ma femme se baisse pour ramasser les débris du verre en esquissant, un
sourire naïf et bienveillant, me rappelant mon oncle Tayeb.
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