kiwimaro
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Posté le: Mer Déc 19, 2007 22:16 pm Sujet du message: Commentaire Composé Liaisons Dangereuses Lettre CII
Bonsoir, j'aimerai savoir si quelqu'un pourrait m'aider pour faire un
commentaire composé sur la lettre suivante:
" Que vous dirai-je enfin? j'aime, oui,
j'aime éperdument. Hélas! ce mot que j'écris pour la première fois, ce mot
si souvent demandé sans être obtenu, je paierais de ma vie la douceur de
pouvoir une fois seulement le faire entendre à celui qui l'inspire; et
pourtant il faut le refuser sans cesse! Il va douter encore de mes sentiments;
il croira avoir à s'en plaindre. Je suis bien malheureuse! Que ne lui est-il
aussi facile de lire dans mon cœur que d'y régner? Oui, je souffrirais
moins, s'il savait tout ce que je souffre; mais vous-même, à qui je le dis,
vous n'en aurez encore qu'une faible idée.
Dans peu de moments, je vais le fuir et l'affliger. Tandis qu'il se croira
encore près de moi, je serai déjà loin de lui: à l'heure où j'avais
coutume de le voir chaque jour, je serai dans des lieux où il n'est jamais
venu, où je ne dois pas permettre qu'il vienne. Déjà tous mes préparatifs
sont faits; tout est là, sous mes yeux; je ne puis les reposer sur rien qui
ne m'annonce ce cruel départ. Tout est prêt, excepté moi. Et plus mon cœur
s'y refuse, plus il me prouve la nécessité de m'y soumettre.
Je m'y soumettrai sans doute; il vaut mieux mourir que de vivre coupable.
Déjà, je le sens, je ne le suis que trop; je n'ai sauvé que ma sagesse, la
vertu s'est évanouie. Faut-il vous l'avouer, ce qui me reste encore, je le
dois à sa générosité. Enivrée du plaisir de le voir, et de l'entendre, de
la douceur de le sentir auprès de moi, du bonheur plus grand de pouvoir faire
le sien, j'étais sans puissance et sans force; à peine m'en restait-il pour
combattre, je n'en avais plus pour résister; je frémissais de mon danger
sans pouvoir le fuir. Hé bien! il a vu ma peine et il a eu pitié de moi.
Comment ne le chérirais-je pas? je lui dois bien plus que la vie.
Ah! si en restant auprès de lui je n'avais à trembler que pour elle, ne
croyez pas que jamais je consentisse à m'éloigner. Que m'est-elle sans lui,
ne serais-je pas trop heureuse de la perdre? Condamnée à faire
éternellement son malheur et le mien; à n'oser ni me plaindre, ni le
consoler; à me défendre chaque jour contre lui, contre moi-même; à mettre
mes soins à causer sa peine, quand je voudrais les consacrer tous à son
bonheur: vivre ainsi, n'est-ce pas mourir mille fois? voilà pourtant quel va
être mon sort. Je le supporterai cependant, j'en aurai le courage. O vous,
que je choisis pour ma mère, recevez-en le serment.
Recevez aussi celui que je fais de ne vous dérober aucune de mes actions;
recevez-le, je vous en conjure; je vous le demande comme un secours dont j'ai
besoin: ainsi engagée à vous dire tout, je m'accoutumerai à me croire
toujours en votre présence. Votre vertu remplacera la mienne. Jamais, sans
doute, je ne consentirai à rougir à vos yeux, et retenue par ce frein
puissant, tandis que je chérirai en vous l'indulgente amie confidente de ma
faiblesse, j'y honorerai encore l'ange tutélaire qui me sauvera de la honte.
"
Un plan détaillé m'aiderai beaucoup ...
Merci d'avance à ceux qui m'aideront.
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uacuus
Super actif

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Posté le: Mer Déc 19, 2007 22:28 pm Sujet du message:
I Une lettre de confidences érotiques
A L'idéalisation de l'être aimé
B L'expression de la douceur et de la sensualité
C L'autopunition et le sado masochisme
II Le rêve d'un ailleurs inaccessible
A Une dualité des lieux
B Les repères temporels
C Les expressions contradictoires, et les paradoxes, annonciateurs d'un
certain romantisme.
III L'orgueil du personnage
A Les expressions de domination
B Un destinataire voyeur
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Méphistophélès
Suprème actif


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Posté le: Jeu Déc 20, 2007 00:05 am Sujet du message:
Le plan n'est pas mauvais, cependant, balancer les grandes parties sans rien
autour, c'est un peu rugueux: je vais essayer de développer tout ça.
La thématique dominante de cet extrait, cela me semble assez évident ici,
est la représentation d'un l'amour idéal. Une idéalisation du sentiment
amoureux allant de pair avec une idéalisation du personnage ("Comment ne le
chérirais-je pas?") et un recours fréquent au champ lexical de la sacralité
qui vient mettre en évidence toute la pureté de cette nouvelle relation
("vertu", "serment"). L'on peut ainsi dégager - et c'est une idée très
importante je crois - les trois grandes étape de la propagation de l'amour
chez Sophocle, telles qu'elles sont décrites dans son célèbre traité De l'amour:
* La pénétration: le sentiment s'exprime sous sa forme la plus violente
("j'aime éperdument")
* L'expiation sado-masochiste: l'amant doit faire souffrir l'être aimé afin
d'en extraite toute la passion ("ne serais-je pas trop heureuse de (...) faire
son malheur et le mien ?")
* L'haplologie: point culminant de la relation, véritable orgasme
métaphorique, "enivrée du plaisir", que l'on retrouve par le biais de
manifestations physiques "rougir", ainsi que de nombreuses interjections
extatiques: "ah !", "he", "o", ...
Mais cette relation suggère aussi l'évocation d'un ailleurs, espace sacré
et cathartique, dans lequel leur amour pourra s'exprimer librement, à l'abri
du monde extérieur. Il y a donc une véritable dualité entre le monde réel,
et le monde idyllique de la passion vertueuse. Nous aurons d'ailleurs à
l'esprit la célèbre réplique de Baudelaire dans son Invitation au voyage:
Citation: | Là
tout n'est qu'ordre et beauté
Luxe, calme et volupté |
Cependant, selon une logique tout à fait shakespearienne, il est difficile
d'accéder à ce lieu, car seul l'amour véritable permet de s'y introduire:
d'où les craintes éprouvées par la locutrice ("ne croyez pas que jamais je
consentisse à m'éloigner"). Au travers de cette peur de l'éloignement,
implicitement, c'est la peur de voir l'amour s'estomper qui affleure de façon
allégorique. Ce paradoxe entre l'envie d'étreindre l'être cher et de s'en
éloigner, entre l'envie de vivre leur amour physiquement, et dans le même
temps, de le porter à la contemplation, à l'abstinence, permet d'aborder une
autre thématique majeure de l’œuvre de Laclos: l'amour n'a de sens que
dans la difficulté. Ce n'est qu'en surmontant un certain nombre d'obstacles
que l'amour peut atteindre son degré le plus complet : l'amour le plus pure
est donc un amour profondément sado-masochiste qui s’articule autour
d’une logique de tromperie et de libertinage - et là, je te conseille
fortement pour illustrer de citer le mythe de l'amour courtois et du bourgeois
gentilhomme.
Je passe sur la troisième partie - si tu as bien suivi nos indications, tu ne
devrais pas avoir trop de mal à la rédiger - et j'en viens directement à la
conclusion. Puisque l'amour est sado-masochiste, l'on peut considérer le
libertinage de Valmont comme une preuve de la pureté des sentiments de ce
dernier. En effet, il a mené une vie parfaitement ignoble jusqu’ici, mais
l'ensemble de ces vices sont rachetés dès lors qu’il se repend en tombant
véritablement amoureux de sa dulcinée. Je dirais même que ces vices
étaient nécessaire pour permettre leur rencontre et entamer dans les
meilleures conditions possibles leur relation : la fin justifie les moyens.
C’est très précisément ce que dit Laclos dans son préface aux Liaisons
Dangereuses: "tous les excès donnent du plaisir quand on est libertine, et le
mieux qu'une femme ait a faire, c'est de foutre". Une vision immorale qui lui
a été vivement reprochée, notamment par Louis XIV et la fameuse Mme de
Montespan.
Pour élargir, n'oublie pas de citer la grande amitié qui unissait Laclos a
Margueritte de Navarre, amitié qui explique l'influence de cette dernière -
et notamment de sa Princesse de Clèves - sur les Liaisons dangereuses.
Voilà
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Silver Mercure
Habitué(e)
Inscrit le: 24 Oct 2007
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Posté le: Jeu Déc 20, 2007 00:29 am Sujet du message:
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kiwimaro
Petit nouveau


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Posté le: Jeu Déc 20, 2007 17:36 pm Sujet du message:
Bonsoir !! Merci de m'avoir répondu, mais n'auriez vous pas une autre
interprétation qui n'est pas axée sur l'érotisme et le sexe ?!
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Méphistophélès
Suprème actif


Inscrit le: 10 Sep 2006
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Posté le: Jeu Déc 20, 2007 17:46 pm Sujet du message:
L'érotisme et le sexe sont des composants essentiels aux Liaisons dangereuses, j'imagine que votre
professeur n'a pas négligé ce détail: à quoi t'attendais-tu en lisant du
Laclos ? Je te rappelle que la démarche première de l'auteur au travers de
cet ouvrage était de relater métaphoriquement ses folâtreries coquines - pour reprendre les mots de Ronsard -
avec la charmante et déclicieuse Marguerite de Navarre... Ce serait faire un
très grave et très facheux contresens que de n'en pas du tout parler, mais
enfin, tu fais ce que tu veux.
Cependant, au-delà de cet érotisme, nous abordons aussi le problème de
l'idéalisation et de la cristallisation sophocléenne de l'être cher, du
fin'amor et de la virtù machiavélesque - voir tout le
passage consacré au champ lexical de la sacralité dans cet extrait.
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kiwimaro
Petit nouveau


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Posté le: Jeu Déc 20, 2007 17:53 pm Sujet du message:
Ok !! J'avoue que les liaisons
dangereuses est beaucoup basée sur l'adultère et tout ce qui s'en
suit. Mais moi j'aurais vu un plan comme celui-ci (fait vite fait) :
I) L'aveu de Tourvel
II) Son désespoir
Mais hélas je ne sais pas vraiment comment argumenter. Je ne suis pas très
fort en procédés littéraires et stylistiques ...
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Méphistophélès
Suprème actif


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Posté le: Jeu Déc 20, 2007 17:54 pm Sujet du message:
Ca, ce n'est pas un plan de commentaire composé, c'est une ébauche de rien
du tout: cela dénote d'une lecture linéaire et superficielle du texte. Or,
ce n'est pas cela qu'on te demande. Ton professeur attend sans doute de toi
que tu saches décrypter les messages codés, les grandes thématiques qui
font de cet extrait un passage caractéristique de l'oeuvre de Laclos, et
au-delà, d'une certaine approche de la production littéraire du XVIIIème -
ce que uacuus a très brillament démontré dans son plan.
Dernière édition par Méphistophélès le Jeu Déc 20, 2007 17:56 pm; édité 1 fois
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kiwimaro
Petit nouveau


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Posté le: Jeu Déc 20, 2007 17:56 pm Sujet du message:
Ouïe ... mais on ne peut donc rien dire sur mon ébauche ?
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kiwimaro
Petit nouveau


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Posté le: Jeu Déc 20, 2007 18:02 pm Sujet du message:
si je propose comme problèmatique : Mme de Tourvel a-t-elle réellement envie
de fuir ?
Parce que j'ai proposé cette problèmatique à ma prof' et elle m'a dit
qu'elle était plutot bien...
Je ne vais pas faire un plan comme celui de uacuus.
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Méphistophélès
Suprème actif


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Posté le: Jeu Déc 20, 2007 18:05 pm Sujet du message:
Bonne chance.
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uacuus
Super actif

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Posté le: Jeu Déc 20, 2007 18:06 pm Sujet du message:
(Entre nous tu auras tout à fait raison de ne pas suivre mon plan)
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Méphistophélès
Suprème actif


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Posté le: Jeu Déc 20, 2007 18:11 pm Sujet du message:
(Ca suffit les messes basses, laissez-nous lire ce qu'il y a entre vos
parenthèses !)
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kiwimaro
Petit nouveau


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Posté le: Jeu Déc 20, 2007 18:14 pm Sujet du message:
Mais vous ... que pourriez vous dire sur une problématique comme la mienne ?
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Méphistophélès
Suprème actif


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Posté le: Jeu Déc 20, 2007 18:18 pm Sujet du message:
Moi rien.
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kiwimaro
Petit nouveau


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Posté le: Jeu Déc 20, 2007 18:19 pm Sujet du message:
Donc tout est basé sur l'érotisme ?!
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kiwimaro
Petit nouveau


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Posté le: Jeu Déc 20, 2007 18:35 pm Sujet du message:
Pourriez vous me donner quelques procédés stylistiques sur cette extrait de
la lettre CII s'il vous plait ?
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Silver Mercure
Habitué(e)
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Posté le: Jeu Déc 20, 2007 19:28 pm Sujet du message:
kiwimaro a
écrit: | Mme de Tourvel a-t-elle
réellement envie de fuir ? |
si tu veux, mais on en reviendra à l'érotisme : elle fuit son désir...
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Méphistophélès
Suprème actif


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Posté le: Ven Déc 21, 2007 18:33 pm Sujet du message:
Ma foi, des procédés stylistiques je veux bien t'en donner tant que tu le
voudras, mais encore faut-il que tu cherches à en tirer quelque chose.
Repérer et nommer une figure de style c'est bien, expliquer à quoi elle sert
c'est mieux.
Cependant, si tu en trouves dans cet extrait, je veux bien te susurrer
discrètement leur petit nom dans le creux de l'oreille, afin qu'elles ne
soient pas vexées par ton oubli.
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