Triptyque d'un échec collectif (II)

ggttinho

II

J’ai planté un rupin un soir de grosse cuite,
Un officier chauvin qui depuis vingt-cinq ans
Haïssait de nos rues les jeunes délinquants,
Ces mômes qui priaient que je prisse la fuite.

La police trouva ce corps gros, gras et mort
Le lendemain matin. – Horreur, frayeur et haine,
Ils détestaient déjà l’assassin sans remords
Qui dans le caniveau se lavait de sa peine.

Et mon cœur, ce tyran, palpitait la chamade ;
Je n’avais d’autre choix que d’assumer ma faute,
Traîner mes yeux meurtris de meurtrier nomade
Dans ceux du juge qui voulait qu’on me les ôte.

J’écopais de dix ans, c’était peu cher payé :
Je méritais plutôt la juste guillotine
Qui en son tendre temps aurait d’un coup rayé
Le souvenir si doux de tes mèches mutines.

Adieu l’astre soleil, adieu folle lumière,
Adieu nos nuits qui scintillaient jusqu’à l’aurore.
Dans une décennie, tes cheveux couleur or
Réchaufferont un autre et une autre chaumière.