Mamzelle_Bulle
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Posté le: Dim Avr 29, 2007 20:47 pm Sujet du message: Pour les courageux
J'ai écris une nouvelle récemment, j'ai hésité à la mettre, mais
finalement me suis dit que les plus courageux la liront !
COMMISSARIAT DE POLICE
{Paris, 75 }
Rapport de Police
Officier au rapport : Capitaine Morel
Numéro de Matricule : 416
Bureau de Police : 24 Décembre 1999
Le 24 décembre à 0h01, 6 rue des Rosiers Mademoiselle Anna est découverte
morte dans sa baignoire. A l’arrivée des policiers, l’appartement est
rangé, propre, calme. Il se trouve dans un petit immeuble.
Dans l’entrée, il y a un sapin de Noël qui clignote.
Aucun signe d’effraction. Pas de signe de résistance ou de quelconque
altercation.
Le corps se trouve dans la baignoire. La victime a gardé ses vêtements. Elle
n’a subi aucune violence physique, on éloigne l’hypothèse d’un viol.
La victime mesure 1 mètre 65, 45 kilos. Pas de signe particulier. Elle
présente des coupures sur les bras. On écarte l’hypothèse d’un meurtre.
On déduit donc un suicide. La victime s’est coupée les veines à l’aide
d’une lame simple ( de rasoir ou autre ).
C’est un voisin qui a appelé la police. Il venait lui souhaiter un joyeux
Noël.
Nom du témoin : Jean Baptiste Well, 1 mètre 80. Pas de casier judiciaire. Le
témoin nous a avoué avoir envoyé des messages anonymes à la victime.
La victime n’a laissé aucune explication.
Elle ne semble pas avoir de famille proche.
L’arme du crime a été découverte sur le sol.
On attend encore le rapport du médecin légiste, mais la découverte d’une
boîte de somnifères laisse supposer la prise de cachets avant le suicide. La
victime présente aux doigts de la main gauche des traces sûrement du à la
pratique de vomissement. La victime travaillait dans un commissariat.
Ses collègues ne l’avaient pas vu depuis longtemps. Il semblerait qu’elle
avait quitté son travail. La fouille de l’appartement n’a rien donné.
Pas de découverte de documents aidant à l’avancée de l’enquête.
Capitaine Morel.
Numéro du dossier : 16623
Paris. Nuit du 24 décembre. Certains dînent, parlant de l’année qui
s’achèvent. D’autres sont devant la télé, attendant qu’il soit minuit
pour aller se coucher. Il y a ceux qui ouvrent leurs cadeaux avant l’heure,
il y a les enfants qui sont impatients. Il y a aussi ceux qui font la fête,
et il y a ceux qui sont seuls chez eux. Ils pensent à cette année qui
s’achève. Une année de plus qui s’en va, peut être la dernière. Ils se
demandent ce qu’ils feront le lendemain. Et puis ils pleurent. Noël pour
eux, c’est un jour triste. De plus, il neige …
0h01. Ce soir une vie s’est enfuie. C’était le premier jour de neige,
c’était le dernier souffle d’un Homme. Les voisins étaient devant
l’immeuble. Les Hommes sont curieux, on ne peut le nier. Au moindre
incident, ils sont là, à parler, à tenter de comprendre. Et ils se créent
leur histoire, étant persuadé d’avoir raison… Souvent ils ont tort.
Ce soir, une vie s’est enfuit. Le corps est dans la salle de bain. Une jeune
femme est morte. Elle était jeune et pourtant elle était triste. Triste de
ne plus pouvoir s’en sortir, triste de son malheur. Elle avait combattu
contre la mort. Elle avait perdu. C’est la réalité qui l’avait
provoquée.
Tout avait commencé par une peur de son corps, une peur d’elle-même, de
son reflet, de tout son être. Elle n’était pas folle, on l’avait juste
volée … Volée de quoi ? De sa pudeur, de sa virginité, de toute son
enfance, de sa confiance en elle … de toute une vie.
Pourtant, elle n’avait pas toujours été malheureuse. Elle avait été
élevée par une mère qui l’aimait et par un beau-père qui la gâtait.
Elle n’avait alors peur de rien, sauf du noir. Elle souriait souvent, et
aimait la vie. Puis un soir … elle s’était retrouvée nue face à un
homme cagoulé, qui l’avait frappée. Elle avait voulu crier, il avait
menacé de la tuer. Elle s’était alors tu, et s’était promis de mourir.
C’est à ce moment que tout à déraper. Elle n’a plus jamais parlé,
n’a plus jamais souris.
L’homme l’avait laissé partir. Elle était cassée, souillée, humiliée.
Elle avait couru le plus loin possible. Mais son passé la rejoignait et la
narguait. Elle voulait oublier, ne plus y penser. Les larmes coulaient, le
temps passait ... Et la douleur restait. Alors elle se détruisait. Ne
mangeant plus rien, se mutilant, c’est ainsi qu’elle vivait. Elle ne
pouvait oublier le souvenir de son violeur.
Depuis, elle s’était convaincue qu’elle repoussait les hommes, et avait
voulu finir seule … C’est elle qui avait choisi sa solitude. . Elle avait
peur du regard des autres, et surtout de celui des hommes. Elle s’était peu
à peu enfermée dans son monde. Elle vivait loin de tout, craignant qu’on
la blesse. Malgré la peur des corps des autres, malgré la peur de la vie, du
noir, des gens, elle avait continué ses études. Elle avait, dans un espoir
désespéré, passé son concours d’entrée à l’école de Police. Elle
était ainsi devenue policière. Petit à petit, elle était montée en grade.
Mais elle étouffait. Elle n’en pouvait plus de voir tous ces morts, tous
ces gens qu’on abusait, toutes ces injustices.
Un matin, elle avait démissionné. Ensuite, elle avait bu. Beaucoup bu. Elle
avait fini aux urgences. Trois points de suture au bras gauche.
Pourtant, un jour, une lueur d’espoir était apparue. Elle ne l’avait
jamais vue, elle ne l’avait jamais approchée. Chaque jour, un homme lui
déposait un mot dans sa boîte aux lettres, pour lui dire combien elle lui
plaisait. Elle retrouvait un sourire, une envie de vivre et elle s’imaginait
que cet inconnu venait l’enlever à cette dure réalité.
Des fois, elle laissait ses peurs la contrôler, elle se mettait alors à
détester cet homme. Mais à chaque mot qu’elle recevait, elle ne pouvait
s’empêcher de l’apprécier.
Puis les messages se ont cessé. Un matin, elle trouva un anneau dans sa
boîte aux lettres.
Elle mit cette bague, seul lien entre elle et son inconnu. Jamais elle ne
l’avait quitté.
Puis les mois s’écoulèrent. Malgré tous ses efforts, Anna vit naître en
elle une nouvelle envie. Elle voulait mourir. Elle se mutilait, se faisait
souffrir. Elle aimait sentir la douleur vive sur son bras mais il était temps
qu’elle parte. Anna eut peur de ce nouveau sentiment. Pourquoi voulait-elle
en finir maintenant ? Pourquoi en était-elle arrivée là ?
Elle avait voulu comprendre, mais elle ne pouvait. Son passé lui faisait
peur.
Elle s’était posée devant la glace, et s’était regardée. Un corps
frêle, des cernes soulignant de grands yeux gris. Des cheveux en bataille, et
des vêtements beaucoup trop larges. C’était donc ça Anna ? Un cadavre que
la vie baladait ? C’était donc ça qui la faisait survivre ? Une carapace
déjà trop abîmée ?
Le 24 décembre, elle est allée dans sa salle de bain. Elle a ouvert le
robinet d’eau de la baignoire. Elle a prit sa lame. Elle se faisait pitié.
Les gens parleraient de cette pauvre fille qui s’était coupée les veines
un soir de Noël comme d’une pauvre petite folle suicidaire. Mais personne
ne savait. Ils ignoraient tous l’humiliation qu’elle avait vécue.
Mais ce soir, elle allait oublier. C’était sa délivrance, la fin de son
enfer. Elle avait peur …
Elle est rentrée toute habillée dans l’eau. Elle ne supportait pas
d’être nue. Elle savourait ce moment, elle savait que c’était le
dernier.
Elle appuya fort, le sang se mit à couler. Elle laisse tomber l’arme, et
ferma les yeux. Elle sentait la mort s’enfuir, la vie la quittait. Celle-ci
prenait son temps, comme pour faire savourer à Anna le prix de sa mort, sa
victoire.
La porte s’est fermée. Les pompiers sont partis. Le capitaine Morel a
commencé à taper la rapport. Elle n’avait pas envie de rentrer, elle
n’aimait pas Noël.
Elle finit le rapport, et lu sa lettre de démission. La vie lui avait tout
enlevé. Sa famille, sa confiance. A l’âge de dix ans, sa mère et son
beau-père se tuaient dans un accident de voiture. Elle ne s’en était
jamais remise. Elle tomba ensuite dans une famille d’accueil, où le père
abusa d’elle. Elle se tut. C’était la vie qui dirigeait, elle le savait.
Elle n’était qu’une marionnette.
Elle aurait voulu prendre son temps, réfléchir. Puis elle se dit qu’on
cherchait tous à courir contre le temps. Elle, elle ne voulait plus se
battre. On a beau se dire « je suis à l’heure » on ne l’a jamais
assez. Peut-être qu’en étant arrivé une minute avant, on aurait pu sauver
une vie. Elle le savait, son métier le lui avait montré.
Elle alla voir son supérieur, lui remit sa lettre. Elle revint dans son
bureau, prit un carton dans le coin et commença à rassembler ses objets.
Elle prit sa plaque, la regarda. Elle était doré avec une gravure portant
son grade, son prénom et son nom. Elle la jeta dans le carton … Sur la
plaque était écrit :
Capitaine Morel Anna.
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