krakauer
De passage

Inscrit le: 26 Nov 2006
Messages: 46
|
Posté le: Dim Nov 26, 2006 10:52 am Sujet du message: Nietzsche
Bonjour j'ai un texte de nietzsche a etudier. J'ai commencé mon etude mais
des points restent encore très flous.
Il s'agit de ce texte là:
Pour ce qui est de la superstition des logiciens, je ne me lasserai jamais de
souligner un petit fait que ces esprits superstitieux ne reconnaissent pas
volontiers à savoir qu’une pensée se présente quand " elle " veut, et non
pas quand " je " veux; de sorte que c’est falsifier la réalité que de dire
: le sujet " je " est la condition du " prédicat " pense. Quelque chose
pense, mais que ce quelque chose soit justement l’antique et fameux " je ",
voilà, pour nous exprimer avec modération, une simple hypothèse, une
assertion, et en tout cas pas une " certitude immédiate ". En définitive, ce
" quelque chose pense " affirme déjà trop; ce " quelque chose " contient
déjà une interprétation du processus et n’appartient pas au processus
lui-même. En cette matière, nous raisonnons d’après la routine
grammaticale : " Penser est une action, toute action suppose un sujet qui
l’accomplit, par conséquent... " C’est en se conformant à peu près au
même schéma que l’atomisme ancien s’efforça de rattacher à "
l’énergie " qui agit une particule de matière qu’elle tenait pour son
siège et son origine, l’atome. Des esprits plus rigoureux nous ont enfin
appris à nous passer de ce reliquat de matière, et peut-être un jour les
logiciens s’habitueront-ils eux aussi à se passer de ce " quelque chose ",
auquel s’est réduit le respectable " je " du passé.
Extriat de Par delà le Bien et le Mal
Je ne comprends pas ce qu'est la superstitions des logiciens.
Si les Logiciens etudie la logique... Comment peuvent-ils etre superstitieux??
Ces deux termes me semble contraire.
Puis en quoi le " jE PENSE " de Descartes, n'est pas une donnée immédiate de
la conscience. Quel reproche vraiment fait-il de Descartes. En quoi ce n'ets
pas nous pour Nietchze qui pensons forcement. J'arrive pas a comprendre a
expliciter ça...
La thèse genral du texte se base sur " ce n'est pas forcement nous qui
pensons".... mais voilà j'arrive pas a expliciter ces deux questions.
Merci de votre aide.
|
Xénastre
Membre


Sexe: 
Age: 61
Inscrit le: 20 Juin 2005
Messages: 154
|
Posté le: Dim Nov 26, 2006 17:22 pm Sujet du message:
Superbe, ce bloc de Frédéric, libérateur et joyeux (je ne pourrais pas en
dire autant) ! J’ai ressorti mon bouquin, et un peu plus loin, au paragraphe
54, il ajoute en complément à votre paragraphe 17 :
"Que fait au fond toute la philosophie moderne? Depuis Descartes, et plutôt
pour braver sa pensée que pour la suivre, les philosophes s'attaquent de
toutes parts à l'ancienne notion d'âme, sous prétexte de critiquer la
notion de sujet et de verbe, autrement dit ils s'en prennent au postulat
fondamental de la doctrine chrétienne. En tant qu'elle est sceptique en
matière de connaissance, la philosophie moderne est, ouvertement ou non,
antichrétienne, encore que, ajoutons-le pour les esprits un tant soit peu
déliés, elle ne soit nullement antireligieuse. En effet, on a cru autrefois
à l'« âme » comme on croyait à la grammaire et au sujet grammatical : on
disait « je » est le déterminant, « pense » le verbe, déterminé; penser
est une activité à laquelle un sujet doit être attribué comme cause. On
s'efforça donc, avec une ténacité et une astuce remarquables, de sortir de
ce filet; on se demanda si la vérité n'était pas plutôt dans la
proposition contraire : « pense » déterminant, « je » déterminé, « je
» apparaissant alors comme une synthèse constituée par l'acte même de la
pensée. Kant voulut prouver au fond qu'il était impossible de trouver le
sujet à partir du sujet, - et qu'il était tout aussi impossible de prouver
l'objet. Il se peut par conséquent que sa pensée n'ait pas toujours été
étrangère à l'idée que le sujet individuel, donc l'« âme », possède
une existence illusoire, pensée qui est apparue une fois déjà sur la terre,
et avec une très grande force, dans la philosophie des Védantas."
Rappel : par définition, la superstition est la croyance qu'un événement
aléatoire ou un objet quelconque d'origine naturelle ou artificielle a une
signification anthropocentrique et est capable d'influencer l'avenir. Il
s'agit de perceptions d'intentions dans les choses. Par ailleurs, le
superstitieux pathologique considère l'existence d'un ordre supérieur,
invisible, qu'il est rarement capable de décrire, mais qui est là, présent,
et impose ses lois.
Or Frédéric, lorsqu’il nous convie de visiter le bestiaire philosophique,
de nous montrer (du monstrare latin mettre devant les yeux le monstre)
quelques monstruosités de la pensée. L’une d’elles est précisément la
superstition du logicien. Comment, la logique puit-elle être superstitieuse,
puisque censée dépourvue de morale c’est-à-dire amorale, sans jugement
sur le bien et le mal ? Ne pas confondre avec l’immoral étant opposé à la
morale et relative à elle, tandis que l’amoral s’en désintéresse. Eh
bien, là où le logicien est moral, c’est au niveau de la correspondance
implicite de vrai avec le bien et du faux avec le mal : en somme le vrai et le
faux du logicien, se sont substitués au bien et au mal du moraliste. Et
c’est d’abord à ce niveau qu’on peut estimer qu’il y a superstition
de la part du logicien. Comme dans la définition précédente, le logicien
considère de manière pathologique, l’existence d’un ordre supérieur,
invisible, et imposant ses lois : il s’agit de la logique, et des lois de la
logique. Mais le jeu de la scolarité n’est-il pas également superstitieux,
lorsque les notes en dessous de la moyenne sont considérées comme «
maudites » ? Et notre superstition pour les numéros bancaires, également
pathologique ? Il y a 2500 ans, Bouddha ne disait-il pas « ce qui est faux
peut être bon, le vrai n’est pas nécessairement bien » ? Pourtant, un
logicien est considéré comme « bon », si ses propositions sont justes : le
« bon » élève socialement gratifié et bien noté. Une fois indexée la
superstition, Frédéric en montre l’effet illusoire. Le « je pense donc je
suis » (cogito ergo sum) cartésien ne serait qu’une illusion. Or la
désillusion nietzschéenne est joyeuse, car elle nous libère de
l’aliénation dans laquelle la soumission contraignante aux règles de la
logique ou de la morale nous avaient placés. Par exemple, en pensant, je suis
perpétuellement délocalisées des idées que je pouvais avoir auparavant, je
ne suis plus ce que j’étais, en perpétuel devenir impermanent, alors en ce
sens, je pourrais dire également : je pense donc je ne suis pas – je ne
suis pas, j’existe en devenir. Enfin, un gros dodo, et cogito tombe à
l’eau.
|