Sisyphe
De passage
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Posté le: Dim Oct 22, 2006 16:21 pm Sujet du message: Eloignement
Bonjour,
Je propose aujourd'hui une prose poétique, métaphorique par endroit et
quelque peu hermétique. Bonne lecture et rendez-vous aux
commentaires/critiques/remarques pour ceux qui le souhaite.
A+
PS: Quelqu'un sait-il comment on peut mettre en forme un texte dans ce forum?
je veux dire, mettre des alinéas, centrer le texte, ce genre de choses...
Eloignement
— Ce vagabond, la croupe décharnée, le trot boiteux et le souffle rauque,
courant la steppe, tremblant sur le pâturin des kourganes, gémit et pleure
des larmes d’enfances, des perles qui se déploient et roulent au néant.
Elle s’ébroue, sombre face à l’immensité, révoltée sous un ciel
crépusculaire, et les lumières saturées du soleil mourant gagnent
l’encolure, son poitrail tourné à l’Orient. A l’arrière, la mer
Noire, hachée d’écume, qui s’étend et chuchote sur ses rivages, dans le
froissement de ses soies, ses soupirs profonds à la caresse du gazon…
— Au Nord, la poursuite des images, les dringuées avilissantes et les
gâteries idiotes, les brimades logiques dans les cartables, les paranoïas et
les méchancetés paternelles dans la cuisine ; on bave sur les patates, on se
retire…
Elles, la psychologie victorieuse et l’accord frivole, choisissent le mâle
à l’âge bête, à la bonne rente ou à l’épaule robuste, étant sûr
ainsi de ne s’occuper à l’avenir que des rôles les moins romanesques,
curieux, profonds …Non, nulle charité jusqu’ici.
Alors, on dérive vers ces terres, saccagées par l’assault des champions,
burinées aux vapeurs d’encens puis lavées aux sangs des sacrifiés pour
l’Olympe. Ne reste que des vestiges, dont la légende récite :
— En face, ce continent aux effluves de liqueur, descendu par un fleuve
d’huile dont le cours paisible ne délivre aucun murmure, est assis aux
lattitudes orageuses et étouffantes.
La-bas, l’île rocheuse, au gigantesque cratère d’où s’échappe ces
fumées toxiques et multicolores, où la vie en dormace, subsiste dans des
cavernes souterraines où nul soleil ne pénètre.
A babord, le pays des Myrmidons, en action et la diligence exemplaire,
échaufaude des tours vertigineuses qui s’éffondrent, s’échine et
dépense pour des mécanismes éternels qui ne servent à rien et qui se
détractent, s’ébranle et se fanatise pour les ouvrages les plus drôle…
— Nouvel ébrouement sous la lune. Un remblai de pierre pour abri, les yeux
séchés aux vents de ces prairies, elle renifle les parfums d’Asie, écoute
le remuement des étoiles, l’émoi des anges. Elle, pensive, s’endort sur
un lit de mystères, et rêve, et se sépare… Ah, ce canasson…
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Utopique
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Messages: 213
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Posté le: Dim Oct 22, 2006 18:31 pm Sujet du message:
Décidémment, j'aime beaucoup!
Tes hypotyposes dégagent toujours un fort air de réalisme et résonnent en
mon esprit comme des "chants" mélancolico-joyeux (par chant, j'entends
qu'elles me font à la fois penser au paysages décrits par Ovide et à
l'ambiance créée par Sophocle, comme une sorte de description poétisée et
très riche en sensations).
Personnellement, je trouve le premier paragraphe excellent, notamment ces
passages : "gémit et pleure des larmes
d’enfances", "les lumières saturées du soleil mourant gagnent
l’encolure", "hachée d’écume, qui s’étend et chuchote sur ses
rivages, dans le froissement de ses soies". Par contre j'ai un petit
problème de compréhension concernant la deuxième phrase : qui est le
"elle"? Ou peut-être est-ce un manque d'accord du genre ou du nombre?
J'aime cette sensation à la fois candide et triste qui se dégage du
deuxième paragraphe, comme une nostalgie refoulée.
Et je trouve ce jeu de sonorité magnifique: "burinées aux vapeurs d’encens puis lavées aux sangs des
sacrifiés"!
D'abord réaliste (enfin, un réalisme poétisé), ton poème prend une
tournure surréaliste dans laquelle j'aime énormément les allitérations!
C'est assez frustrant, tes écrits évoquent toujours en moi de nombreuses
sensations différentes mais toujours aussi indescriptibles! Je terminerai
donc simplement en disant que j'aime la frontière ambigüe rêve/réalité de
la fin
PS : Concernant la mise en forme, je te conseillerais de mettre des tirets en
début de nouveau paragraphe (comme tu l'as fait) puis de les mettre en
couleur blanche, ainsi ils ne se verront pas ou très peu une fois le texte
affiché et donneront une illusion d'alinéas.
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Sisyphe
De passage
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Posté le: Dim Oct 22, 2006 21:09 pm Sujet du message:
merci Utopique, pour ton réponse, pour tes réponses.
Il y a des effets que j'ai voulu crée (réalité/rêve, mélancolie,
descriptions crépusculaires ou légendaires ) que je retrouve dans ton
analyse, cela me fait plaisir.
Par contre le deuxième paragraphe n'est pas nostalgique, c'est plutôt un
retour amer sur certains éléments autobiographiques. C'est le passé qui
vient justifier le présent (premier et dernier paragraphe). Bien sûr ce
présent est imaginaire.
Quant au "Elle" du premier paragraphe, c'est une jument, un canasson, un
vagabond, un vieux cheval, animal domestiqué et servile, plié au bon vouloir
des hommes, qui s'échappe par les steppes.
Voilà, quelques éléments de compréhension, je préfère ne pas donner
davantage d'explications . Il est sûr que sans connaître le contexte, les
intentions de l'auteur, il est difficile de saisir pleinement la poésie.
Cela dit, certains éléments du poème m'echappe à moi aussi, cela frôle le
surréalisme...
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