Mandos
Actif
Sexe:
Inscrit le: 22 Jan 2006
Messages: 1148
|
Posté le: Dim Juin 25, 2006 23:42 pm Sujet du message: Crépuscule harmonique
Ecoulement de nuit,
Chante à ma paupière,
Comme chantaient, dans les jours morts de l'embrasure,
La poussière et la dune
Entrelacées.
Je goûte tes vapeurs dans un flux de nuages
Courant sans nombre,
Emportement des lueurs au ciel gris.
La boucle se referme, comme se ferment mes yeux
Sur un paysage de récif,
embaumé de couleurs, évaporé
dans les bruissements du monde.
Ecoute à ma paupière le feu doré,
je l'ai gardé pour toi, pour tes lèvres avides,
Pour ton émail vengeur, tes perles assassines,
Tu es brûlure, et perle en un ciel suspendu
qui s'efface en accords tumultueux,
qui s'effile dans un sommeil d'Orient,
frange indocile à mon front pâle
lumière enfuie de tes opales.
Raille-moi, toi qui sombres dans ta propre haleine,
dans ton souffle sans retour
tes entailles géantes.
Raille la cadence vengeresse qui anime mes brumes, quand je te jure mon
immobilité,
quand j'ouvre les bras pour te les offrir;
raille ces éclats qui me parsèment, ces reliquats d'aurore,
peuple mort de mes antiquités.
Va, dévoreuse, en un baiser nocturne
ombrage ma chair,
prélude d'une danse
que je ne danserai pas.
|
uacuus
Super actif
Sexe:
Inscrit le: 29 Mai 2006
Messages: 2753
|
Posté le: Lun Juin 26, 2006 18:09 pm Sujet du message:
C'est joliment écrit, mais j'ai beau relire, j'ai du mal à y voir autre
chose qu'un bric à brac d'images.
|
Mandos
Actif
Sexe:
Inscrit le: 22 Jan 2006
Messages: 1148
|
Posté le: Lun Juin 26, 2006 18:58 pm Sujet du message:
Je fonctionne toujours comme ça, quand j'écris en vers libres (et aussi,
dans une moindre mesure, quand j'écris tout court). J'écris en suivant une
ligne musicale, et le sens m'échappe complètement. Toutefois, le texte final
n'en est jamais vraiment dénué, puisque j'écris dans une certain état
d'esprit, qui fait que certains mots, certaines évocations me viennent, qui
orientent ce que j'écris dans une direction plus ou moins homogène.
Je ne vais pas me lancer dans une analyse détaillée de mon texte (ce serait
d'une part vain, d'autre part assez malhonnête, puisque je dirais alors sans
doute des choses qui ne m'effleuraient même pas au moment où je l'ai
écrit), mais on peut quand même repérer des éléments de cohérence. Le
narrateur s'adresse à la nuit, qui peut être entendue comme le côté sombre
de sa personne, où comme l'idée de fin, où encore, en combinant ces deux
aspects, comme l'idée du principe de ruine présent en tout être animé.
Certains mots font explicitement référence à l'idée de fin (morts, referme, se ferment, embaumé (sens
ambigu), s'efface, s'effile, enfuie,
reliquats, antiquités, que je ne danserai pas). On a aussi des
allusions plus voilées. "L'embrasure", au vers trois, évoque une porte à
demi close, et vraisemblablement, ici, en train de se clore, à l'instar des
yeux qui se ferment quelques vers plus loin. Qu'entend-on par "Ecoulement de
nuit, Chante à ma paupière" ? L'idée, peut-être, de larmes qui se
ravalent, l'idée d'un bilan... Et quand il est question de "feu doré",
offert en cadeau à la nuit, il peut s'agir de ce qu'il reste au poète de
beauté, de bonté ou de vie, offerte en sacrifice à l'élément ténèbres.
Evidemment, il reste beaucoup de tournures nébuleuses. Si tu t'interroges
particulièrement sur l'une ou plusieurs d'entre elles, j'essaierai de
t'éclaircir.
|
uacuus
Super actif
Sexe:
Inscrit le: 29 Mai 2006
Messages: 2753
|
Posté le: Lun Juin 26, 2006 19:15 pm Sujet du message:
Tiens moi dans ce poème j'avais vu une autre cohérence (relative) d'images,
celles d'un voilement des choses par des matières mouvantes qui laissent
percevoir un peu de ce qu'elles cachent. J'ai moins vu la fin des choses
qu'une opacité des choses. Y compris dans l'effacement.
"la poussière et la dune"
"emportement des lueurs au ciel gris"
"la cadence vengeresse qui anime mes brumes"
Bref on voit à travers la poussière ou les nuages gris.
Même le reliquat d'aurore, montre non une disparition, mais une persistance
à travers un voilement.
A côté les lumières, et les opales m'ont un peu énervé, un peu comme la
quinquaillerie d'un tableau de Gustave Moreau. Les "éclats qui me parsèment"
par exemple, ou le "feu doré".
ça donnerait presque envie de railler le poète, mais comme il en fait lui
même la demande, par esprit de contradiction, je vais tâcher d'éviter.
|