Marquise
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Posté le: Ven Mar 31, 2006 18:55 pm Sujet du message: La Révolution Poétique
Il n'y en a pas eu qu'une, loin s'en faut.
Victor Hugo a jeté avec Hernani son gant romantique à la face classique...
Mais je ne peux pas le copier là. On oublie trop souvent tout ce que Hugo a
fait pour la libération de la poésie franaçaise, tant il a su se montrer
impeccable et irréprochable, même...
Mais je veux ce soir rappeler ce manifeste "symboliste" de Paul Verlaine.
C'est comme ça, qu'on libère la poésie... Avec de la souplesse et du
talent. Et il n'en manquait pas!
Art poétique
De la musique avant toute chose,
Et pour cela préfère l'Impair
Plus vague et plus soluble dans l'air,
Sans rien en lui qui pèse ou pose.
Il faut aussi que tu n'ailles point
Choisir tes mots sans quelque méprise :
Rien de plus cher que la chanson grise
Où l'Indécis au Précis se joint.
C'est des beaux yeux derrière des voiles,
C'est le grand jour tremblant de midi,
C'est par un ciel d'automne attiédi
Le bleu fouillis des claires étoiles !
Car nous voulons la Nuance encor,
Pas la Couleur, rien que la nuance !
Oh ! la nuance seule fiance
Le rêve au rêve et la flûte au cor !
Fuis du plus loin la Pointe assassine,
L'Esprit cruel et le Rire impur,
Qui font pleurer les yeux de l'Azur,
Et tout cet ail de basse cuisine !
Prends l'éloquence et tords-lui son cou !
Tu feras bien, en train d'énergie,
De rendre un peu la Rime assagie.
Si l'on n'y veille, elle ira jusqu'où ?
O qui dira les torts de la Rime !
Quel enfant sourd ou quel nègre fou
Nous a forgé ce bijou d'un sou
Qui sonne creux et faux sous la lime ?
De la musique encore et toujours !
Que ton vers soit la chose envolée
Qu'on sent qui fuit d'une âme en allée
Vers d'autres cieux à d'autres amours.
Que ton vers soit la bonne aventure
Eparse au vent crispé du matin
Qui va fleurant la menthe et le thym...
Et tout le reste est littérature.
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Alexandre-le-très-petit
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Posté le: Ven Mar 31, 2006 20:33 pm Sujet du message:
Le premier quatrain est ancrée dans l'histoire..!! J'adore ce poème!
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Marquise
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Posté le: Ven Mar 31, 2006 21:38 pm Sujet du message:
Je ne suis pas étonnée, Alexandre
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Ang3^
De passage


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Posté le: Ven Mar 31, 2006 21:55 pm Sujet du message:
Je viens de finir de l'étudier en cours...
Ce poème marque bien la continuîté de la volonté de la liberté
artistique.
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CLAIR OBSCUR
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Alexandre-le-très-petit
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Posté le: Ven Mar 31, 2006 22:19 pm Sujet du message:
Bien que je préfère Rimbaud à Verlaine, j'adore énormément ce poète,
particulièrement pour "Romances sans paroles". Mais à l'inverses ses "Fêtes
galantes" sont, à mon goût, trop répétitives. Néanmoins rien que pour
avoir le génir de dire: "Il pleure dans mon coeur comme il pleut sur la
ville" je l'aime!!
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Marquise
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Posté le: Sam Avr 01, 2006 10:08 am Sujet du message:
Ang3^>>> Oui, je suis d"accord.
CLAIR OBSCUR >>> crois-tu que j'aie pu le poster sans une pensée à
ma petite lapinette?
Alexandre-le-GRAND (je prends des libertés )
>>> Il m'a semblé, mais c'est très empirique, que Rimbaud touche
avant Verlaine. Non pas comme si l'un était plus accessible que l'autre, mais
j'ai l'impression que Rimbaud appelle plus "l'intuitif" en nous, alors que
Verlaine, malgré tout ce qu'il a apporté à la poésie (ou ce qu'il lui a
retranché, mais pour son bien, d'après moi) demeure souvent bien calé dans
les notions sociales de Bien et de Mal.
Toujours à hésiter entre la Sainte Vierge et le stupre le plus écheveulé!
Alors que, semble-t-il, Rimbaud est libre du Bien et du Mal. Il fait ce que
bon lui semble. C'est l'impression qui s'en dégage, je trouve.
Donc, intuitivement, on se sent plus libre avec Rimbaud, puisque Verlaine nous
met face à la conscience sociale. Rimbaud vit hors du temps quand il écrit:
il est très jeune, il fait des choix à l'emporte-pièce.
Verlaine, quant à lui, est plus mûr, mais tourmenté et, disons-le, pas
très net quand même
On a cette impression que Rimbaud peut aborder les pires vices de l'humanité
tout en conservant une certaine pureté, une intégrité, une fidélité à
lui-même: toucher la boue sans se salir (ceci ne concerne pas la deuxième
partie de sa vie... )
Bien, mais je m'égare en digressions. Et ceci n'engage que moi.
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CLAIR OBSCUR
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Marquise
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Posté le: Sam Avr 01, 2006 14:15 pm Sujet du message:
Merci, ma Plume de Lapin
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Mandos
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Posté le: Sam Avr 01, 2006 22:59 pm Sujet du message:
J'adore Verlaine, et particulièrement ce poème (mes préférés, toutefois,
sont "Mon rêve familier" et "La mort de Phillipe II", deux pièces des Poèmes saturniens)
Mais, et je ne sais pas si vous avez vous aussi été amenés à faire ce
constat, certains admirateurs de Verlaine (j'en ai rencontré deux dans ce cas
de figure, jusqu'ici, un poète et un professeur de français) ont une aproche
de Verlaine passablement aberrante. En fait, les deux personnes auxquelles je
fais allusion aimaient Verlaine... par opposition à Baudelaire. Et je me
demande franchement comment la chose est possible. Verlaine était un fervent
adorateur de Baudelaire, et toute sa poésie, quoique entièrement neuve et
originale, en porte la marque indélébile. Je ne peux pas concevoir Verlaine
autrement que comme la respiration lente, cherchant l'apaisement (et le
trouvant parfois, avec des fortunes diverses), qui se devait de succéder au
souffle immense de la poésie baudelairienne.
Vous avez une explication ?
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Marquise
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Posté le: Dim Avr 02, 2006 11:43 am Sujet du message:
Tout comme les adorateurs de Baudelaire se plaisent à dénigrer Hugo... pour
moi, c'est tout simplement un signe d'étroitesse (d'esprit, s'entend, puisque
ces personnes n'accepteraient qu'une partie de l'Histoire...) et
d'intolérance ("c'est lui qu'il fait les plus beaux poèmes alors que l'autre
c'est un vieux nul qui puducu", en gros).
Dernière édition par Marquise le Jeu Avr 06, 2006 08:39 am; édité 1 fois
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Mandos
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Posté le: Dim Avr 02, 2006 12:46 pm Sujet du message:
Je suis un adorateur de Baudelaire et de Hugo. Ma préférence pour le premier
vient surtout du fait que je l'ai découvert avant l'autre.
Il est vrai qu'il y a une tendance très marquée, dans la critique
littéraire actuelle, à snober Hugo. C'est en partie dû, je pense, à
l'amputation du romantisme à laquelle il a été procédé dans la
littérature française. Une amputation mal cicatrisée, et qui est ces
temps-ci en train de s'infecter (ces purulences se nommant Houellebecq,
Ango...). Mais pour Hugo, il y a un autre élément, peut-être encore plus
insupportable, c'est qu'il a durablement complexé les littérateurs français
(c'est d'ailleurs aussi le cas de Baudelaire, qui n'est pas en odeur de
sainteté partout, loin s'en faut, contrairement à Verlaine, dont le génie,
par bonheur, ne projette qu'une ombre en demi-teinte). Puisque son oeuvre
était tellement immense, que son génie pouvait engendrer mille vers à la
journée (en exagérant à peine), il était évident pour les moucherons
qu'il y avait une faille. Et ainsi fut inventé le mythe du Hugo à déchets,
du poète qui écrit à la pelle, avec négligence. Et là, le moucheron
pousse un soupir de soulagement : il lui est possible de mépriser Hugo, dont
la puissance semblait par trop inégalable.
On trouve des relents de cette mesquinerie jusque dans l'édition des oeuvres
de Hugo en pléiade, l'éditeur de La
Légende des Siècles croyant bon de souligner en Avertissement,
histoire de se faire bien voir, que le poète "donne parfois l'impression
d'abuser de sa facilité"
Mais le fait est, et il faudra bien l'admettre un jour, que l'oeuvre de Hugo
ne contient pas plus de déchets qu'une autre. Et que ce qui n'est pas déchet
(l'immense majorité de ses écrits, donc) atteint un degré de magnificence
qu'on ne trouve à peu près nulle part ailleurs.
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Marquise
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Posté le: Dim Avr 02, 2006 12:51 pm Sujet du message:
Je ne peux pas débattre avec toi, puisque je suis toujours de ton avis...
Je laisse
venir les autres.
Tu as, à mon sens, absolument raison.
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Romantisme
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Posté le: Mar Avr 04, 2006 22:07 pm Sujet du message:
Les autres sont aussi d'accords, j'adore Baudelaire et Hugo (ses poèmes sur sa fille
morte mon mis, je l'avoue, la larme pesante à l'oeil.)
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Alexandre-le-très-petit
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Posté le: Mer Avr 05, 2006 12:21 pm Sujet du message:
De toute façon chacun des poètes dont le nom est gravé dans l'histoire est
un excellent poète, il faut le dire! On peut trouver trop religieux
Lamartine, il n'empèche qu'il nous a décrit un ciel de splus somptueux! Si
l'on se souvient de leurs noms, c'est bien grâce à leur talent! Evidemment
on a des préférences, et c'est normal je trouve!, pour moi les quatres
piliers de la poésie française sont tous du même siècle (désolé pour
Ronsard!), et sont certainement les plus connus! Je veux parler bien sûr d'
ARTHUR RIMBAUD, CHARLES BAUDELAIRE, PAUL VERLAINE ET VICTOR HUGO! Chacun d'eux
est doué d'un talent surhumain qui dépasse toute la littérature
d'aujourd'hui, les princes poètes! Chacun a son charme, Hugo inspire le plus
grand des respects par sa puissante oeuvre poétique, Verlaine l'attachement
de ce pauvre malheureux à la musicalité aussi douce qu'une femme, Baudelaire
la plus grande classe par ses indomptables vers aussi qui posent un point
final à ses sujets, Rimbaud l'admiration la plus gargantuesque pour son
démoniaque talent aussi précoce, qu'indépassable, qui a été plus loin
qu'aucun poète sur la quête de la vérité. Chacun son style, chacun son
genre, chacun son thème, chacun ses poèmes, mais l'ensemble de ces
inestimables oeuvres témoigne du plus somptueux graal au monde, du plus
sublime trésor, de notre fier patrimoine: la littérature française...
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Romantisme
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Posté le: Mer Avr 05, 2006 13:13 pm Sujet du message:
Personnellement, bien que j'aime rimbaud, il me laisse plus froid que les
autres excepter quelque poèmes, je lui préfère et de loin Émile Nelligan,
également un génie précosse.
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CLAIR OBSCUR
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Romantisme
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Posté le: Jeu Avr 06, 2006 07:39 am Sujet du message:
Je vais te mettre quelques uns de ses poèmes (explication du vaisseau d'or:
Nelligan de 16 à 19 ans écrivis des poèmes et il fut ensuite interner pour
schysophrénie à la fin du XIX siècle, le vaisseau d'or parle de la démense
qui l'envaissa)
VAISSEAU D'OR (LE)
Ce fut un grand Vaisseau taillé dans l'or massif :
Ses mâts touchaient l'azur, sur des mers inconnues ;
La Cyprine d'amour, cheveux épars, chairs nues,
S'étalaient à sa proue, au soleil excessif.
Mais il vint une nuit frapper le grand écueil
Dans l'Océan trompeur où chantait la Sirène,
Et le naufrage horrible inclina sa carène
Aux profondeurs du Gouffre, immuable cercueil.
Ce fut un Vaisseau d'Or, dont les flancs diaphanes
Révélaient des trésors que les marins profanes,
Dégoût, Haine et Névrose, entre eux ont disputés.
Que reste-t-il de lui dans la tempête brève ?
Qu'est devenu mon coeur, navire déserté ?
Hélas! Il a sombré dans l'abîme du Rêve!
BEAUTÉ CRUELLE
Certe, il ne faut avoir qu'un amour en ce monde,
Un amour, rien qu'un seul, tout fantasque soit-il ;
Et moi qui le recherche ainsi, noble et subtil,
Voici qu'il m'est à l'âme une entaille profonde.
Elle est hautaine et belle, et moi timide et laid :
Je ne puis l'approcher qu'en des vapeurs de rêve.
Malheureux ! Plus je vais, et plus elle s'élève
Et dédaigne mon coeur pour un oeil qui lui plaît.
Voyez comme, pourtant, notre sort est étrange !
Si nous eussions tous deux fait de figure échange,
Comme elle m'eût aimé d'un amour sans pareil !
Et je l'eusse suivie en vrai fou de Tolède,
Aux pays de la brume, aux landes du soleil,
Si le Ciel m'eût fait beau, et qu'il l'eût faite laide !
LA ROMANCE DU VIN
Tout se mêle en un vif éclat de gaîté verte.
Ô le beau soir de mai ! Tous les oiseaux en choeur,
Ainsi que les espoirs naguères à mon coeur,
Modulent leur prélude à ma croisée ouverte.
Ô le beau soir de mai ! le joyeux soir de mai !
Un orgue au loin éclate en froides mélopées ;
Et les rayons, ainsi que de pourpres épées,
Percent le coeur du jour qui se meurt parfumé.
Je suis gai ! je suis gai ! Dans le cristal qui chante,
Verse, verse le vin ! verse encore et toujours,
Que je puisse oublier la tristesse des jours,
Dans le dédain que j'ai de la foule méchante !
Je suis gai ! je suis gai ! Dans le cristal qui chante,
Verse, verse le vin ! verse encore et toujours,
Que je puisse oublier la tristesse des jours,
Dans le dédain que j'ai de la foule méchante !
Je suis gai ! je suis gai ! Vive le vin et l'Art !...
J'ai le rêve de faire aussi des vers célèbres,
Des vers qui gémiront les musiques funèbres
Des vents d'automne au loin passant dans le brouillard.
C'est le règne du rire et de la rage
De se savoir poète et l'objet du mépris,
De se savoir un coeur et de n'être compris
Que par le clair de lune et les grands soirs d'orage !
Femmes ! je bois à vous qui riez du chemin
Où l'Idéal m'appelle en ouvrant ses bras roses ;
Je bois à vous surtout, hommes aux fronts moroses
Qui dédaignez ma vie et repoussez ma main !
Pendant que tout l'azur s'étoile dans la gloire,
Et qu'un hymne s'entonne au renouveau doré,
Sur le jour expirant je n'ai donc pas pleuré,
Moi qui marche à tâtons dans ma jeunesse noire !
Je suis gai ! Je suis gai ! Vive le soir de mai !
Je suis follement gai, sans être pourtant ivre !...
Serait-ce que je suis enfin heureux de vivre ;
Enfin mon coeur est-il guéri d'avoir aimé ?
Les cloches ont chanté ; le vent du soir odore...
Et pendant que le vin ruisselle à joyeux flots,
Je suis si gai, si gai, dans mon rire sonore,
Oh ! si gai, que j'ai peur d'éclater en sanglots !
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CLAIR OBSCUR
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Posté le: Jeu Avr 06, 2006 08:41 am Sujet du message:
J'aime surtout le premier. Merci, Romantisme
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