Les Eaux de Mortelune [BD]


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Joel Robuchon
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Message Posté le: Sam Mar 04, 2006 00:53 am    Sujet du message: Les Eaux de Mortelune [BD]
Les Eaux de Mortelune

Euh oui, cette BD est une petit peu un coup de coeur, que je considérerai sans doute comme l'une des plus belles BD francophones!
Voilà pourquoi! Smile


Dessin: Amadov
Scénario: Cothias
Bande dessinée, 5 albums
Aux éditions Glénat
1986-1992
Genre: Conte SF Fellinio-philosophico-écolo

Note : 8.5/10 (Gros coup de coeur)


Comment avons-nous fait pour en arriver là ? Est-ce une guerre chimique ou nucléaire qui est à l'origine de ce désastre? Peut-être est-ce les conséquences catastrophiques de l'effet de serre? Quoiqu'il en soit, un vaste nuage toxique a recouvert toute la surface de la planète, transformant les contrées jadis luxuriantes en terres arides, néfastes pour le développement de la vie. Bienvenue au royaume du Prince de Mortelune, royaume bâti sur les ruines d'un Paris apocalyptique.
Les quelques survivants tentent de recréer une société propice à l'ombre du passé décadent qui est le nôtre. Lui, c'est le Prince Jerôme, actuel souverain de ces terres dévastées. Tout son pouvoir réside en ses courtisans, en le secret qui lui permet de rester éternellement jeune et beau. C'est un des derniers maîtres de la terre il est en effet l'unique fournisseur d'eau potable de tout le royaume.
Cet autre personnage un peu usé et aux airs cruels se nomme le Duc Malik. Lui seul connaît les emplacements des réservoirs de pétrole, matière nécessaire au bon fonctionnement des machines du Prince qui purifient les eaux de pluies devenues acides afin de les rendre propres à la consommation humaine. Eh oui, dans ce futur macabre l'eau a quasiment disparue et c'est toute la survie de cette microsociété qui s'appuie sur ce pacte entre les deux hommes. Pacte fragile s'il en est puisque le Prince et le Duc Malik se détestent littéralement. Et voilà que tout bascule quand Jerôme s'éprend d'une p*****, cela donnera l'occasion ultime à Malik de lui prendre le secret de l'immortalité tant désirée. Action.

Intrigue et humour

Le premier opus des cinq albums commence à la manière d'un opéra baroque et romantique gorgé d'intrigues courtisanes comme dans Les Liaisons Dangereuses. Violhaine, la fille d'un boucher devient par hasard la prostituée favorie du Prince, Malik fomente un coup d'état doublé d'un meurtre... En bref, du sexe, des complots, de la violence sous fond d'intrigue politique et sociale. Mais la compilation des Eaux de Mortelune, c'est beaucoup plus que cela, un scénario audacieux qui emprunte à plusieurs genres à la fois, la complexité des nombreux personnages et la multiplicité des intrigues rendent cette oeuvre incroyablement passionnante à la lecture. Amadov et Cothias nous tissent là une histoire foisonnante de rebondissements et de panache, servi par un humour vénéneux qui évite à l'oeuvre de retomber dans une tonalité un peu trop sombre. Ce soupçon d'humour est dû en particulier à la crudité des dialogues et au graphisme d'Amadov qui s'apparente parfois à de grands délires visuels en référence aux films déjantés de Fellini et au monde féerique de Little Nemo (Winsor Mac Cay). Surtout lors des fêtes que tient le prince: habits mi-renaissance mi-Jean Paul Gaultier avec personnages en tutu et collants multicolores pendant que d'autres se cachent dans les alcôves luxieuses du palais en compagnie de rats domestiques, d'autres encore, abreuvés de sexe et de plaisirs se livrent à des orgies Caliguliennes. C'est cela qui est ironique, ce petit monde qui tente en vain de rendre un Paris détruit superficiellement plus agréable à vivre. Et le trait vérace, détaillé d'Amadov rend cet univers percutant de réalisme et stylisé à la fois. En immortalisant ces immeubles Hausmanniens dévastés, modifiés parfois en cathédrales néogothiques.

Un pessimisme philosophique



Les Eaux de Mortelune met en scène un monde terriblement pessimiste avec son cortège d'âmes damnées, de personnages cruels et répugnants qui n'hésitent pas à tuer pour accroître leur pouvoir ou tout simplement pour survivre. Un univers impitoyable ! Surtout avec le Duc Malik qui incarne sans conteste un des personnages les plus immondes de toute la BD Francophone :

Kali_ Vous êtes un monstre, monsieur ! Même les bêtes féroces ne se comportaient pas de cette manière ! Même les fauves les plus impitoyables de la terre !
Le duc Malik_ Tu dis ça pour me faire plaisir, ma bonne Kali, ou bien tu le penses vraiment ? En vérité, Kali, je suis encore PIRE que tout ce que tu imagines. Il m'arrive même parfois de me craindre moi-même !

Le monde qui nous est décrit est de toute façon voué à la décadence, avec ces scènes presque pornographiques qui montrent une humanité prisonnière de sa folie en dépit de l'apparence festive qu'elle tente d'instaurer. Seul le petit Nicolas, une des rares figures "positives" apporte une dimension onirique. A partir du tome trois, le scénario "décolle" mué en une course-poursuite entre Malik, le Prince Jerôme et ses amis. Ils partent dans le sud désert de la France à la rencontre de personnages dégénérés et d'insectes mutants qui vont peu à peu leur dévoiler... la nature humaine. Ainsi l'oeuvre prend t-elle un aspect beaucoup plus philosophique et un ton plus grave par rapport aux premiers albums. Quant au dessin, le trait devient plus sec, plus efficace dans ce qu'il suggère.
L'Homme disparaîtra par son arrogance et sa betîse. La cité de Mortelune n'est plus alimentée en eau, nos protagonistes meurent un par un. Les auteurs épiceront le dernier album de quelques scènes vénéneuses que je ne dévoilerai point. Signe que l'oeuvre se plait à érafler le politiquement correct. Enfin, la scène finale, le Duc Malik périt, las de chasser ses proies dans ces terres inconnues. A ce moment précis, une pluie d'eau douce arrose la région pour ensuite faire naître une forêt luxuriante comme si la comédie humaine n'était qu'une simple transition parmi tant d'autres, comme si tout était éphémère afin de mieux renaître.


Les Eaux de Mortelune: toujours cet esprit entre l'horreur et le merveilleux qui se pare d'ironie. Messieurs Amadov et Cothias, je vous tire ma révérence.


Tome 1 L’Echiquier du rat
Tome 2 Le café du port
Tome 3 Le prince et la poupée
Tome 4 Les yeux de Nicolas
Tome 5 Vague à lames
Il existe d'autres tomes de cette série, mais comme beaucoup d'amateurs, je préfère en rester là! Wink


Avis aux modos: Il n'esiste pas de rubriques propres aux bandes dessinées ou du moins je n'en ai pas vu. Voilà pourquoi j'ai mis ce topic dans coup de coeur...
TheDark
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Message Posté le: Sam Mar 04, 2006 11:59 am    Sujet du message:
Citation:
Avis aux modos: Il n'esiste pas de rubriques propres aux bandes dessinées ou du moins je n'en ai pas vu.


Remarque pertinente Joel. Je ne vais pas ouvrir un thread public sur la question, par contre ce sera pris en compte chez les admins à suivre.


Dernière édition par TheDark le Mer Mar 08, 2006 00:21 am; édité 1 fois
Lucinda
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Message Posté le: Mer Mar 08, 2006 00:20 am    Sujet du message:
Pour ma part, si mes souvenirs sont bons, j'ai trouvé des passages de cette BD très vulgaires et pronographiques. Et je ne la conseillerai pas au jeune public, c'est sûr.
Cochise
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Message Posté le: Sam Avr 01, 2006 18:31 pm    Sujet du message:
Lucinda a écrit:
Pour ma part, si mes souvenirs sont bons, j'ai trouvé des passages de cette BD très vulgaires et ponographiques. Et je ne la conseillerai pas au jeune public, c'est sûr.
Vulgaire et porno, les eaux de mortelune ????????

Bien sûr il y a des scènes assez corsées mais de là à taxer de vulgaire et de porno c'est vachement dur comme jugement !

Qu'il y ait de la violence, à la limite mais ça ... et voir un sein à demi découvert, alors SKYDOLL est plus que vulgaire et porno !!!

Je conseille cette BD aussi mais je voudrais rectifier, ce n'est pas 5 tomes mais 10.
Le chiffre de la bête (6), la guerre des dieux (7), la mort de Nicolas (Cool, de profondiis (9), et last but not least, la recherche du temps perdu (10).

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