chiron
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Posté le: Sam Nov 26, 2005 01:36 am Sujet du message: E. Todd: systèmes familiaux et idéologies
Bonjour à tous,
D’où proviennent les différentes idéologies, philosophies, l’adhésion
ou la répulsion à un mouvement politique, une religion ou encore la
sensation que certaines valeurs nous semblent « naturelles » ou «
impensables » ?
Emmanuel Todd, à travers la définition de valeurs portées par les systèmes
familiaux nous propose un cadre explicatif transcendant l’ensemble des
cultures, les philosophies et les religions.
Personnellement, j’ai dévoré les travaux d’Emmanuel Todd car il m’a
fourni un cadre théorique explicatif à mes propres interrogations,
trouvailles et recherches sociales, avec l’idée qu’il n’existe pas une
seule nature humaine, mais bien des identités différentes, qui ont donné
naissance à des religions, philosophies et mouvement politiques différents.
Mais au-delà d’une analyse strictement géopolitique, je crois que cette
oeuvre nous donne la chance de nous ouvrir aux autres cultures et de proposer
des terrains d’entente et des collaborations entre nos différentes
cultures.
Aussi je propose deux petits exposés, espacés dans le temps, pour servir
d’axes de réflexion et de discussion :
- Le premier est une analyse géopolitique des cultures de l’Europe de
l’ouest ainsi que leurs positionnements sur quelques exemples historiques
- Le second, bien plus compliqué (et qui reste à faire ), un
essais sur la psychologie culturelle, ainsi que la pédagogie et le management
multiculturel, incluant une étude anthropologique de la famille maghrébine
et les problèmes liés à l’immigration en France
Chnoub et rêveur je vous avais promis un tel fil. De plus, j’utilise
tellement dans ce forum le terme de « différence culturelle » qu’il est
dommage de ne pas expliquer ce qui se trouve derrière. Hamilcar, Beau zozo et
Belle Cebe ,
ainsi que vous tous, j’espère que cela vous intéressera.
Mais n’hésitez pas à poster pour dire si cela vous semble intéressant ou
non, tiré par les cheveux, et ce qui vous semble manquer.
A plus et vous lire,
Dernière édition par chiron le Sam Nov 26, 2005 01:58 am; édité 1 fois
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chiron
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Posté le: Sam Nov 26, 2005 01:46 am Sujet du message: Re: E. Todd: systèmes familiaux et idéologies
Tout d’abord, Emmanuel Todd part du principe séduisant que l’homme est
éduqué par son milieu familial et donc formaté en vertu des valeurs de sa
famille. Ses relations avec ses parents préfigurent celles avec l’Etat ;
ses relations avec ses frères et sœurs, celles avec les citoyens.
Par exemple, un père autoritaire induit la vision d’un Etat fort, une
relation égalitaire avec ses frères et sœurs, une égalité entre les
citoyens.
Si l’enfant est en révolte avec sa famille, il n’échappe pas à cette
culture locale car il la retrouve (ou du moins dans une zone culturelle
homogène) parmi ses camarades d’école et également leurs familles.
Pour l’Europe de l’Ouest, Emmanuel Todd propose une segmentation des
systèmes familiaux à l’aide de deux variables privilégiées distinctes :
- l’autorité/ la libéralité des parents envers les enfants, mesurée en
fonction de la corésidence des générations en milieu rural (grand-père,
père et enfants en un même foyer étant un signe d’autorité)
- l’égalité/inégalité des enfants (étude des coutumes testamentaires
égalitaires ou inégalitaires)
ce qui nous donne quatre types de systèmes familiaux
libéralité+égalité : la famille nucléaire
égalitaire – cliché : les latins
rapport à la terre : ouvriers agricoles/grandes exploitations
idéologies (association aux dominés/dominants) : anarchisme/
libéral-militarisme
descriptif culturel : Rousseau, les droits de l’homme
libéralité+inégalité : la famille
nucléaire absolue – cliché : les anglo-saxons
rapport à la terre : fermage/ rentier
idéologies (association aux dominés/dominants) :
travaillisme~syndicalisme/droite libérale
descriptif culturel : utilitarisme, Rawls
(égalité des chances)
autorité+égalité : la famille communautaire – cliché : les russes ou
méditerranéens
rapport à la terre : métayage (propriétaire touchant une partie de la
récolte)/ propriétaire dirigeant
idéologies (association aux dominés/dominants) : communisme/fascisme
(dictature de droite non raciste)
descriptif culturel : Troyat, et bien sûr
l’idéologie communiste
autorité+inégalité : la famille souche –
cliché : les allemands
rapport à la terre : petite propriété familiale
idéologies (association aux dominés/dominants) :socialisme/droite
nationaliste à tendances ethnocentriques
descriptif culturel : Luther, Hegel
L’égalitarisme induit de plus la
notion de l’homme universel et souvent des idéologies considérées comme
applicables par toute l’humanité. Au contraire, la notion d’inégalité
segmente les citoyens en classes sociales distinctes, et introduit des
hiérarchies entre les peuples (inégalité forte) ou du moins un
différentialisme (inégalité faible).
L’autorité implique une très bonne
transmission culturelle (enfants partant plus tard du foyer familial, bien
plus éduqués), voire une obsession de transmissions aux générations
suivantes, qui doivent continuer le travail des anciens. Au contraire, dans
une famille égalitaire, l’enfant doit partir très tôt du milieu familial
et se faire ses propres expériences et sa propre philosophie. La priorité
est accordée à son indépendance, mais la transmission culturelle y est
moindre.
Mais voyons plutôt une application politique et historique de ces
différentes cultures familiales et le rôle de l’inconscient culturel dans
les prises de position politiques. La carte suivante propose une
décomposition géographique pour l’Europe de l’Ouest en fonction des
systèmes familiaux majoritaires par département ou équivalent.
Tout d’abord, on s’aperçoit que les nations n’ont pas conduit à une
homogénéité des systèmes familiaux, lesquels sont stables depuis 500 ans.
Cette carte a été réalise par superposition d’études de données
recueillies de 1850 à 1980.
Emmanuel Todd propose de lier l’apparition de ces cultures à l’accès à
la civilisation. La famille latine (nucléaire égalitaire) est pour lui liée
à d’anciennes zones d’implantation romaines. La famille communautaire
serait la continuatrice de la culture étrusque. La famille souche (en
Allemagne) proviendrait des invasions barbares des années 300-500, celle du
sud-ouest français pourrait être antérieure à la conquête romaine. Enfin,
la zone de la famille nucléaire absolue rappelle le royaume maritime de Cnut
le Grand (XIè siècle), alliant le Danemark, l’Angleterre et la Norvège.
A l’aide de cette simple carte, et de quelques concepts supplémentaires
(diffusion lente de l’alphabétisation à partir d’un axe Suède-Suisse,
et l’éloignement géographique de Rome), Emmanuel Todd nous ré-explique
les positionnements politiques à partir d’affrontements culturels. Le
déterminisme y est hallucinant !
Par exemple alors que vers 1500 toute l’Europe de l’Ouest est chrétienne,
la famille souche allemande dont la noblesse allemande, ayant une grande
avance culturelle, et étant éloignée de Rome, rejette l’autorité du
Vatican et affirme clairement sa revendication identitaire inégalitaire, à
travers le protestantisme : il y a des élus de Dieu et les autres sont
damnés. Face à cet inégalitarisme et cette révolte, la Contre-réforme se
redéfinit comme égalitariste.
La doctrine inégalitaire séduit immédiatement les zones d’implantation de
la famille souche et est rejetée par la famille nucléaire égalitaire, qui
rejoint la contre-réforme.
En effet, le calvinisme touche le sud-ouest français ainsi que le centre de
la vallée du rhône, la Hollande, la guerre des paysans touche le sud de
l’Allemagne et l’Autriche.
A l’opposé, la ligue catholique s’implante dans les régions
égalitaristes que sont le grand bassin parisien ainsi que la côte
méditerranéenne.
Autre exemple lors de la Révolution française. Le nord de la France est
alors beaucoup plus alphabétisé que le sud. Les valeurs de liberté et
d’égalité sont donc boostées et vont donner la devise de notre
république. Mais certaines régions françaises s’inscrivent dans
l’espace contre-révolutionnaire. Si l’on prend la carte de refus de la
constitution civile du clergé (serment de fidélité des prêtres à la
Constitution), les zones de refus majoritaire mises en évidence sont : le sud
ouest, le Nord, l’Alsace (la famille souche) ainsi que la Bretagne (famille
nucléiare absolue), ce qui représente l’espace inégalitaire français.
Aussi il a toujours existé et il existe non pas une, mais deux Frances. La
France « officielle », nucléaire-égalitaire (~45 % de la population) mais
aussi une France de l’ombre, la souche (~30 % de la population). Ces
conflits idéologiques permanents hystérisent les affrontements politiques,
aussi bien concernant la Réforme, la Révolution, mais également l’affaire
Dreyfus, la relation envers l’étranger ou encore l’immigration.
Quant aux cultures minoritaires, trop faibles pour peser sur l’histoire de
France, elles s’expriment généralement par des revendications
d’indépendance.
C’est le cas également dans le nord de l’Espagne car le socle
anthropologique espagnol est relativement uniforme. Mais l’Italie est quand
à elle, un vrai cas d’étude.
Le nord-est est souche et n’est pas sans rappeler une partie d’Allemagne.
Le piémont est nucléaire-égalitaire, la toscane, Rome et le centre
communautaire et le sud nucléaire égalitaire.
Est-ce donc un hasard si la ligue lombarde italienne prône l’indépendance
de la padanie (nord-est) ? Est-ce un hasard si M. Erminio Boso, suggère de "
faire monter les nègres dans des Hercule militaires et les renvoyer chez eux
", au nom de la " défense de la race blanche " ? . Pas vraiment : une forme
d’idéologie conservatrice de la famille souche tout simplement.
Le centre, dominateur et centralisateur a quand à lui fourni tous les cadres
communistes et fascistes de l’Italie. Le sud par contre est plus complexe.
Au rejet de l’autorité s’est combiné celui de l’Etat. Néanmoins et
sans ordre, la famille nucléaire égalitaire risque l’excès de désordre
(un peu comme dans l’anarchisme espagnol). Il y a donc eu un phénomène
d’idéologie conservatrice violemment anti-romaine et centrée sur le
clientélisme : la maffia.
Je vous ai donc présenté quelques petits exemples d’analyse politique
tirés des travaux d’Emmanuel Todd, dont j’attends des critiques,
commentaires et impressions, ce que cela vous inspire et si cela vous semble
complètement tiré par les cheveux. Si si !
Pour ma part, cette grille d’analyse me semble intéressante et de nature à
comprendre les risques de conflits et les enjeux politiques plus ou moins
conscients des représentants politiques et des populations qu’ils
représentent.
Néanmoins, bien loin de m’inscrire dans un débat actuel de « chocs de
civilisations », où une civilisation ou une culture devrait vaincre, je
crois beaucoup plus intéressant d’en opérer la fusion ou au moins la
collaboration et ne retenir que les « avantages » de chaque culture tout en
neutralisant les « défauts », « peurs » ou « excès » empêchant cette
collaboration.
C’est pourquoi je suis très intéressé par la recherche dans le domaine
du management et de la pédagogie multiculturels qui, bien appliqués, me
semblent non seulement plus respectueux des personnes, mais aussi me semblent
aboutir à la plus grande productivité possible.
A plus et vous lire,
Sources : L’invention de l’Europe – Emmanuel Todd – Points
C’est un livre très riche, avec près de 80 cartes, une bibliographie
splendide et une orientation géopolitique. Il permet également une
découverte ou revisite de l’histoire moderne des pays européens. Le
sommaire en est :
- le socle anthropologique
- Religion et modernité
- Mort de la religion, naissance de l’idéologie
- La décomposition des idéologies (1965-1990)
Attention toutefois : c’est un livre de lecture difficile et tous ceux à
qui j’ai prêté ce livre et qui n’étaient pas passionnés par les
sciences politiques en ont abandonné la lecture
Un autre livre plus facile d’accès et qui expose le même type d’approche
:
L’enfance du monde ; structures familiales et développement – Emmanuel
Todd – Seuil
Analyse de la politique française :
La nouvelle France – Emmanuel Todd – Points
Analyse des systèmes culturels et impacts dans la politique française de la
Révolution française à nos jours.
NB édité pour nouvelle carte
Dernière édition par chiron le Lun Fév 21, 2011 00:02 am; édité 1 fois
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chiron
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Posté le: Mer Sep 16, 2009 00:17 am Sujet du message: Re: E. Todd: systèmes familiaux et idéologies
Bonjour à tous,
Cette discussion provient d'une disgression du topic sur les legislatives
avant les présidentielles
(http://www.genaisse.com/forums/viewtopic-37164-20.html)
Romulus a
écrit: | Mais je constate juste
que vous ne m'avez donné aucun exemple de
guerre purement religieuses ou culturelles,
|
Le problème est que nous avons des visions de l'histoire par trop
différentes. Je propose donc une autre approche ici sur les actuelles
revendications indépendantistes en Europe.
La carte des cultures présentée ci-dessus met en évdences les
revendications indépendantistes comme
1) La Bretagne vis à vis de la France
2) Les basques vis à vis de l'Espagne
3) Les catalans vis à vis de l'Espagne
4) l'occitanie vis à vis de la France (si si cela existe)
5) la Lombardie vis à vis de l'Italie
Or cette carte a été réalisée à partir de registres qui prouvent la
constance de l'inégalité (via les testaments) de de l'autorité (par la
corésidence des générations). Ces structures sont stables depuis 500 ans.
Qu'en était-il avant ? Probablemet la même chose, mais on n'a pas de
registres pour l'affirmer.
C'est troublant tout de même, qu'une telle carte mette en évidence les
revendications indépendantistes, non ?
|
Celeborn
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Posté le: Mer Sep 16, 2009 11:59 am Sujet du message:
J'aime bien cette théorie d'Emmanuel Todd. Qu'il ait en compte les structures
familiales pour expliquer la vision de la société.
Mais je ne l'aime plus quand elle prend son caractère normatif ou trop
explicatif : "Un tel peuple a fait ça parce que..." ou "Un tel peuple va
faire ça parce que...". Pour moi les structures familiales n'ont qu'un impact
très très mineur sur nos comportements. Par exemple ce n'est pas à cause de
ma structure familiale que je vais soutenir tel ou tel projet, que je vais
voter pour tel ou tel parti... Oui ça joue surement dans une fraction des
cas, mais dans une fraction petite. Disons une fois sur 10. De même que une
personne sur 10 est peut être influencée concretement par sa structure
familiale.
Les exemples donnés ci dessus confirment cette théorie, mais il existe une
foule d'exemples qui ne sont pas ci dessus et qui l'infirment. Ca ne parle pas
de la moitié de l'Italie qui aurait du rejoindre la Réforme, de même que la
très catholique Autriche.
Bref c'est une théorie très intéressante, mais très limitées aussi comme
toutes les théories sociologiques. On ne peut pas expliquer la totalité des
faits d'un groupe parce qu'il est composé d'individus bien différents.
|
Tommy Angello
Administrateur


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Posté le: Mer Sep 16, 2009 12:07 pm Sujet du message:
Elle met en relation d'innombrables frontières "culturelles" mais seules
quelques unes sont celles revendiquées par des indépendantistes. Je dirait
plutot que le fait qu'il y ai différentes populations d'europe de l'ouest (on
parlais avant de races) sont la cause des différences de culture familiales
et une des cause de la volonté d'indépendance.
De plus tu n'explique pas comment un adulte se retrouve à avoir avec
l'autorité d'etat la relation et les raisonnement qu'il avait enfant avec
l'autorité parentale. C'est la pièce la plus importante du raisonnement.
Par contre il y a un point que est faux dans le déscriptif de Todd: le
communisme n'est pas autoritaire, il vise même a supprimer la police et les
institutions. Dans les fait les révolutions sont faciles à récupérer et le
communisme connu est celui de staline, pol pot et autres enfants de cœur.
|
Romulus
Suprème actif


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Posté le: Mer Sep 16, 2009 20:29 pm Sujet du message:
chiron a
écrit: |
Romulus a écrit: | Mais je constate juste que vous ne m'avez donné aucun exemple de guerre purement religieuses ou
culturelles,
|
Le problème est que nous avons des visions de l'histoire par trop
différentes. Je propose donc une autre approche ici sur les actuelles
revendications indépendantistes en Europe.
La carte des cultures présentée ci-dessus met en évdences les
revendications indépendantistes comme
1) La Bretagne vis à vis de la France
2) Les basques vis à vis de l'Espagne
3) Les catalans vis à vis de l'Espagne
4) l'occitanie vis à vis de la France (si si cela existe)
5) la Lombardie vis à vis de l'Italie
|
Tiens c'est intéréssant que tu prennes ces exemples parce que justement ce
ne sont pas des guerres, ce sont des conflits culturels qui sont bien moins
que des guerres.
Par ailleurs la résistance des états vis à vis des indépendantismes
régionaux est indéniablement une affaire de pouvoir.
Dans l'autre sens c'est moins vrai : l'action des régionalistes vis à vis de
l'état c'est peut être vraiment culturel (quoi que je ne serais pas étonné
qu'il y ait souvent des affaires d'argent et de pouvoir en jeux dérrière),
mais justement ces "insurgés" sont minoritaires. Il n'entrainent pas
dérrière eux tout un peuple qui se souleverait. Retires des droits aux
Corses, fait en sorte qu'ils en ait moins que les autres Français et là tu
verra qu'ils se révolteront vraiment, et je mets ma main à couper qu'ils le
feront au nom de la nation Corse, de la culture Corse, etc... Mais dans le cas
présent... pas de réèl enjeux de pouvoir, donc pas de vrai révolte, pas de
vrai guerre. L'écrasante majorité des Corses ne vont pas prendre les armes,
se mettre dans l'illégalité, risquer la prison ou je ne sais quoi pour
l'idée floue et artificielle qu'est la nation.
Concernant ton gouroux Todd :
Même chose que Celeborn et Tommy. je trouve qu'il accorde une place trop
importante et non fondée à la culture familiale. Bien sûr que cette culture
a une influence importante sur les individus et donc sur les idées et les
choix qu'ils feront mais ce n'est pas la seule source d'influence. Qu'en
est-il de l'influence de l'environnement scolaire? De l'environnement
professionnel? L'environnement médiatique? etc...
Au cours de notre vie on cotoie de multiples individus (professeurs, amis,
collègues,...) on lis où on visionne de multiples "oeuvres" qui nous
influencent. L'individu et la société est la somme de tout un tas de choses.
Cela explique la multitude de contres-exemples qui viennent contredirent la
théorie de Todd car de nombreux paramètres, autres que la culture familiale,
viennent jouer un rôle. Dont notamment les évènements historiques passés
qui marquent la mémoire collective et qui fait que les individus agissent en
en tenant compte (plus ou moins consciement), ils se repositionnent vis à vis
de cela et pas seulement vis à vis d'une pure culture familiale qui serait
fixe et inchangée au cours du temps.
|
chiron
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Posté le: Dim Sep 20, 2009 22:29 pm Sujet du message:
Bonjour à tous,
Celeborn a
écrit: | J'aime bien cette
théorie d'Emmanuel Todd. Qu'il ait en compte les structures familiales pour
expliquer la vision de la société.
Mais je ne l'aime plus quand elle prend son caractère normatif ou trop
explicatif : "Un tel peuple a fait ça parce que..." ou "Un tel peuple va
faire ça parce que...". Pour moi les structures familiales n'ont qu'un impact
très très mineur sur nos comportements. Par exemple ce n'est pas à cause de
ma structure familiale que je vais soutenir tel ou tel projet, que je vais
voter pour tel ou tel parti... Oui ça joue surement dans une fraction des
cas, mais dans une fraction petite. Disons une fois sur 10. De même que une
personne sur 10 est peut être influencée concretement par sa structure
familiale.
|
Todd présente une théorie macroscopique, au niveau des régions, qui n'est
scientifiquement pas déclinable au niveau de l'individu.
Mes applications de cette théorie au contraire considèrent les petits
groupes et l'individu. Je n'ai pas de justifications formelles, juste un
résultat: cela marche disons... dans 95% des cas.
Mon sentiment est que seuls les individus ayant parcouru une recherche
philosophique très poussée de par l'étude ou la dépression ou les
ethnologues de terrain se rendent compte de ce formattage initial et peuvent
tenter de le modifier. Mais je ne suis pas certain que le modifier soit une
bonne chose, ni qu'on puisse y échapper même si on croit l'avoir modifié.
Citation: |
Les exemples donnés ci dessus confirment cette théorie, mais il existe une
foule d'exemples qui ne sont pas ci dessus et qui l'infirment. Ca ne parle pas
de la moitié de l'Italie qui aurait du rejoindre la Réforme, de même que la
très catholique Autriche.
|
Pour l'Italie, je suis d'accord que la Vénétie aurait dû rejoindre la
Réforme. Ta remarque est d'ailleurs excellente. Mais j'ai vulgarisé une
thèse de 600 pages. Todd définit une troisième variable lors de la Réforme
qui est la proximité géographique avec Rome qui empêche toute révolte.
Et l'Autriche a été touchée par la guerre des paysans.
Citation: |
Bref c'est une théorie très intéressante, mais très limitées aussi comme
toutes les théories sociologiques. On ne peut pas expliquer la totalité des
faits d'un groupe parce qu'il est composé d'individus bien
différents. |
Je crois qu'au niveau des groupes il est plus facile de déterminer des
comportements qu'au niveau des individus. C'est un peu la même chose qu'entre
vitesses de particules microscopiques et température moyenne de l'ensemble.
Néanmoins ce qui m'a plus dans cette théorie, ce n'est pas l'application
géopolitique régionale (qui est déjà sympathique) mais qu'elle m'a servi
à rassembler en un tout cohérent tous mes outils psychologiques et
sociologiques. Cela a été le coup de coeur. J'avoue commettre
volontairement l'erreur de considérer que cette théorie macroscopique puisse
s'exercer au niveau microscopique. Mais ma justification est empirique: de mon
point de vue, cela marche.
Voilà pourquoi ce livre est celui que j'aurai aimé avoir écrit (1)
j'aimerai beaucoup écrire son pendant pédagogique, managerial, psychologique
et de dynamiques des groupes.
Enfin ces travaux que j'ai plusieurs fois présenté ont souvent intéressé
les nucléaires égalitaires et les communautaires et très peu les souches ou
les nucléaires absolus.
Est-ce la notion d'égalité qui induit l'intérêt des autres cultures ou
cette théorie est-elle fatalement culturellement typée ?
(1) L’invention de l’Europe – Emmanuel Todd – Points
C’est un livre très riche, avec près de 80 cartes, une bibliographie
splendide et une orientation géopolitique. Il permet également une
découverte ou revisite de l’histoire moderne des pays européens. Le
sommaire en est :
- le socle anthropologique
- Religion et modernité
- Mort de la religion, naissance de l’idéologie
- La décomposition des idéologies (1965-1990)
Attention toutefois : c’est un livre de lecture difficile et tous ceux à
qui j’ai prêté ce livre et qui n’étaient pas passionnés par les
sciences politiques en ont abandonné la lecture
|
chiron
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Posté le: Dim Sep 20, 2009 23:10 pm Sujet du message:
Tommy Angello a
écrit: | Elle met en relation
d'innombrables frontières "culturelles" mais seules quelques unes sont celles
revendiquées par des indépendantistes. Je dirait plutot que le fait qu'il y
ai différentes populations d'europe de l'ouest (on parlais avant de races)
sont la cause des différences de culture familiales et une des cause de la
volonté d'indépendance.
|
Je suis sceptique sur les races mais suis d'accord sur des causes
différentes. Ce n'est pas parce qu'on est minoritaire qu'on est
indépendantiste.
Si l'on est une très faible minorité, on ne peut pas être indépendantiste
car on n'a pas le seuil critique pour l'être. Si l'on est une forte
minorité, on peu influer sur le destin de la nation donc on n'est pas non
plus indépendantiste. C'est une minorité "moyenne" qui ne peut peser au
national, de la taille d'un département à une région qui implique souvent
un fort mouvement indépendantiste.
Citation: |
De plus tu n'explique pas comment un adulte se retrouve à avoir avec
l'autorité d'etat la relation et les raisonnement qu'il avait enfant avec
l'autorité parentale. C'est la pièce la plus importante du raisonnement.
|
Elle ne me semble pas très difficile. Le citoyen voit l'Etat comme une
projection du père, tout comme également pour Dieu (on dit bien "notre père
qui est au cieux", et on appelle bien les représentants du Dieu "mon père").
L'état est d'abord perçu de par son rôle de chef (chef d'Etat continuateur
du chef de famille, Etat éducateur via l'école, Etat punisseur vie la
justice)
De même, le citoyen voit son rapport avec les citoyens comme une équivalence
de ses rapports avec ses frères.
Néanmoins, l'influence ne se limite pas à la famille car de 1500 à 1950,
même si les parents ne sont pas formateurs, c'est le village qui formatte,
car c'est finalement le mode d'exploitation de la terre qui formatte.
Et je crois que depuis 1950, du fait des mobilités professionnelles et de la
fin de l'agriculture familiale, le formattage est moindre. Certaines cultures
à haute capacité de transmition (les souches) y résistent bien. D'autres à
faible capacité (les latins) me semblent plus perméables à l'idéologie
libérale.
[quote)]
Par contre il y a un point que est faux dans le déscriptif de Todd: le
communisme n'est pas autoritaire, il vise même a supprimer la police et les
institutions. Dans les fait les révolutions sont faciles à récupérer et le
communisme connu est celui de staline, pol pot et autres enfants de
cœur.[/quote]
Mais tu oublies Tito, Fidel, Mao... La dictature du prolétariat est avant
tout une dictature et les communistes ont toujours sacrifié la liberté à
l'égalité. Même dans la résistance française, les communistes ne sont
intervenus que sur l'ordre de Moscou.
Rien de tout cela chez les nucléaires égalitaires ou absolus: la Révolution
française, la Commune de Paris ou la guerre d'Espagne n'ont pas amené une
dictature communiste soutenue par une grande partie du peuple car la dictature
aurait / a fait horreur au peuple.
Si tu est communiste et si tu détestes les dictatures, il y a fort à parier
que tu es plutôt anarchiste. Ainsi pour Proudhon, "l'anarchie, c'est l'ordre
sans le pouvoir", "la propriété (des rentiers), c'est le vol" et " la
propriété (pour les travailleurs), c'est la liberté".
Proudhon a théorisé les mutuelles, les banques municipales de crédit
gratuit, les coopératives, le fédéralisme auto-gestionnaire... toutes ces
choses existent encore ce jour et qui je l'espère, ont un bel âge d'or qui
va poindre.
|
chiron
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Posté le: Lun Sep 21, 2009 00:12 am Sujet du message:
Romulus a
écrit: |
Tiens c'est intéréssant que tu prennes ces exemples parce que justement ce
ne sont pas des guerres, ce sont des conflits culturels qui sont bien moins
que des guerres.
|
Jai voulu faire simple étant donné qu'on n'a pas la même lecture de
l'histoire et que du coup, mes exemples semblaient plutôt générateurs de
confusion.
Citation: |
Par ailleurs la résistance des états vis à vis des indépendantismes
régionaux est indéniablement une affaire de pouvoir.
Dans l'autre sens c'est moins vrai : l'action des régionalistes vis à vis de
l'état c'est peut être vraiment culturel (quoi que je ne serais pas étonné
qu'il y ait souvent des affaires d'argent et de pouvoir en jeux dérrière),
|
Je suis d'accord mais on ne fait pas une disgression là-dessus, hein ?
Je crois que, comme pour toute révolution, pour qu'il y ait un mouvement
indépendantiste, il faut
1) Une élite qui n'est pas associée au pouvoir et qui veur sa part de
pouvoir
2) Une assise populaire qui reconnaît comme légitime et "naturel" le
discours politique des élites dissidentes.
Donc pour moi, il n'existe pas de mouvement indépendantisme sans le soutien
d'une forte partie du peuple, qui considère comme "naturelles" ses valeurs
culturelles.
Citation: |
mais justement ces "insurgés" sont minoritaires. Il n'entrainent pas
dérrière eux tout un peuple qui se souleverait. Retires des droits aux
Corses, fait en sorte qu'ils en ait moins que les autres Français et là tu
verra qu'ils se révolteront vraiment, et je mets ma main à couper qu'ils le
feront au nom de la nation Corse, de la culture Corse, etc... Mais dans le cas
présent... pas de réèl enjeux de pouvoir, donc pas de vrai révolte, pas de
vraie guerre. L'écrasante majorité des Corses ne vont pas prendre les armes,
se mettre dans l'illégalité, risquer la prison ou je ne sais quoi pour
l'idée floue et artificielle qu'est la nation.
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Non, parce qu'économiquement ils perdraient au change. De plus, avec les
régions, on a pas mal donné du lest sur le centralisme étatique. Et encore
plus avec les régions d'Europe qui pointent. Cela a un peu calmé les
indépendantismes mais la charte des langues européennes risque de les
raviver. La Révolution puis l'Etat centralisé avait nivellé les cultures
locales, en interdisant la pratique des patois et langues. On peut le
regretter mais c'est cela qui a fait la cohésion nationale, au contraire de
la Yougoslavie. On a vu ce que cela peut donner...
La crise économique qui va nous laminer va stresser ces appartenances
culturelles. J'espère que notre cohésion nationale sera plus forte que les
identités culturelles. Au besoin, on peut imaginer un gouvernement
multi-culturel, promulgant des lois acceptables par toutes les cultures.
L'Assemblée Nationale est d'ailleurs ainsi faite, et me semble supérieure à
un scrutin national proportionnel du point de vue de la représentation des
cultures.
Citation: |
Concernant ton gouroux Todd :
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L'invention de l'Europe est livre est excellent, qui de par cette théorie,
les très nombreuses cartes et l'hitoire commentée de tous les ays
européens, est un livre de travail et de référence .
Au contraire, je trouve ses autres ouvrages nettement moins bons. Et enfin, ce
n'est pas lui qui a inventé cette théorie, mais par contre, c'est lui qui
l'a développée et lui a donné de solides assises.
Citation: |
Même chose que Celeborn et Tommy. je trouve qu'il accorde une place trop
importante et non fondée à la culture familiale. Bien sûr que cette culture
a une influence importante sur les individus et donc sur les idées et les
choix qu'ils feront mais ce n'est pas la seule source d'influence. Qu'en
est-il de l'influence de l'environnement scolaire? De l'environnement
professionnel? L'environnement médiatique? etc...
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Colmme vu plus haut, jusque 1930 tu vis et restes dans ton village (les
congés payés étant liés au Front Populaire), donc tu baignes dans ta
propre culture.
Citation: |
Au cours de notre vie on cotoie de multiples individus (professeurs, amis,
collègues,...) on lis où on visionne de multiples "oeuvres" qui nous
influencent. L'individu et la société est la somme de tout un tas de choses.
Cela explique la multitude de contres-exemples qui viennent contredirent la
théorie de Todd car de nombreux paramètres, autres que la culture familiale,
viennent jouer un rôle.
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Ha bon ? Dis-moi qui tu fréquentes et je te dirais qui tu es... En effet, nous
avons des atomes crochus avec nos amis et c'est justement là qu'est le
problème: bien souvent ils sont le reflet de nous-mêmes donc de notre
culture. Nous construisons nos environnements de par des choix inconscients
culturels. Nous vivons tous dans des mondes parallèles sui se cotoent mais ne
se mélangent pas.
L'exception reste tout de même le travail: le seul lieu où nous cotoyons des
personnes "différentes", souvent synonymes de "connes", "stupides",
"débiles" mais qui en fait ne font pas partie de notre propre culture. Le
travail est un lieu d'affrontement culturel individuel et collectif (je pense
aux "cultures" d'entreprises).
Mais les forum aussi, où l'on se rend compte de sa spécificité culturelle
lorsque nous voyons des raisonnements ou valeurs que nous jugeons
"déplorables", "impensables" mais qui ont surtout le tort d'être opposées
aux nôtres.
Citation: |
Dont notamment les évènements historiques passés qui marquent la mémoire
collective et qui fait que les individus agissent en en tenant compte (plus ou
moins consciement), ils se repositionnent vis à vis de cela et pas seulement
vis à vis d'une pure culture familiale qui serait fixe et inchangée au cours
du temps. |
Mais ces individus agissants sont-ils libres ? Imagines-tu un De Gaulle
Allemand ? C'est impensable... Et nombreux avaient prédit la venue d'un
Napoléon suivi d'un impérialisme français devant la décomposition de la
révolution.
Il aurait pû être breton et se nommer Moreau, venir de Provence et
s'appeller Barras ...
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chiron
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Posté le: Jeu Mai 09, 2013 13:32 pm Sujet du message:
Bonjour à tous,
A tout hasard, je vous signale la sortie d'un nouveau bouquin très
intéressant sur ce thème:
Le mystère Français
d'Hervé Le Bras et Emmanuel Todd - Edition seuil
avec de magnifiques cartes de socio (dont des cartes de niveau éducatif,
évolution de population, évolution des richesses et amplitude des revenus,
sans compter bien sût les dernières cartes de vote).
Présentement, je m'en sers honteusement, à la demande de ma douce, pour
localiser un possible investissement Dufflot (probablement Bordeaux, Nantes ou
Montpellier d'après mes analyses)
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